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14/10/2009 | FRANCE | N°320543

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 14 octobre 2009, 320543


Vu le pourvoi, enregistré le 10 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour l'ASSOCIATION ESPERANCE ENVIRONNEMENT, dont le siège est Comté de Loheac à Sainte-Rose (97115), Mme A, demeurant ..., M. et Mme B, demeurant ... et M. C, demeurant ... ; l'ASSOCIATION ESPERANCE ENVIRONNEMENT et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 22 juillet 2008 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Basse-Terre, statuant en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté leur demande

tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 10 avril 2...

Vu le pourvoi, enregistré le 10 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour l'ASSOCIATION ESPERANCE ENVIRONNEMENT, dont le siège est Comté de Loheac à Sainte-Rose (97115), Mme A, demeurant ..., M. et Mme B, demeurant ... et M. C, demeurant ... ; l'ASSOCIATION ESPERANCE ENVIRONNEMENT et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 22 juillet 2008 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Basse-Terre, statuant en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté leur demande tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 10 avril 2008 par lequel le préfet de la Guadeloupe a autorisé la société Sita Espérance, anciennement dénommée société Ecopole de l'Espérance, à exploiter une installation de stockage de déchets non dangereux au lieu-dit l'Espérance sur le territoire de la commune de Sainte-Rose ;

2°) statuant en référé, de faire droit à leur demande de suspension présentée devant le tribunal administratif de Basse-Terre ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu l'arrêté du 22 septembre 1994 relatif aux exploitations de carrières et aux installations de premier traitement des matériaux de carrières ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Richard Senghor, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de l'ASSOCIATION ESPERANCE ENVIRONNEMENT et autres et de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la société Sita Espérance,

- les conclusions de Mme Isabelle de Silva, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de l'ASSOCIATION ESPERANCE ENVIRONNEMENT et autres et à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la société Sita Espérance ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

Considérant, d'une part, que si l'article R. 742-5 du code de justice administrative prévoit que la minute de l'ordonnance est signée par le magistrat qui l'a rendue, aucune disposition n'impose cette signature pour l'ampliation de cette ordonnance notifiée aux parties ; que, par suite, la circonstance que les exemplaires de l'ordonnance adressés aux requérants n'étaient pas eux-mêmes revêtus de cette signature est sans influence sur sa régularité ;

Considérant, d'autre part, qu'il appartient au juge des référés qui rejette une demande tendant à la suspension de l'exécution d'une décision administrative au motif qu'il n'est pas fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette décision, d'analyser soit dans les visas de son ordonnance, soit dans les motifs de celle-ci, les moyens développés au soutien de la demande de suspension, afin, notamment, de mettre le juge de cassation en mesure d'exercer son contrôle ; que, dans l'analyse de l'argumentation présentée par l'ASSOCIATION ESPERANCE ENVIRONNEMENT et autres au soutien de leurs conclusions tendant à ce que soit suspendue l'exécution de l'arrêté du 10 avril 2008 autorisant la société Sita Espérance à exploiter une installation de stockage de déchets non dangereux, l'ordonnance attaquée a indiqué, dans ses visas, que les requérants faisaient état notamment d'un moyen tiré des irrégularités entachant l'ouverture de l'enquête publique du fait de la méconnaissance des dispositions des articles R. 512-14, R. 515-27 et R. 512-15 du code de l'environnement ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le juge des référés, qui n'était pas tenu de viser chacun des arguments présentés à l'appui du moyen soulevé, a entaché son ordonnance d'un défaut de motivation ;

Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 515-27 du code de l'environnement: I. - L'enquête publique est régie par les dispositions des articles R. 512-14 à R. 512-17 et les précisions apportées par le présent article. Elle est, sauf exception justifiée par des circonstances particulières, confondue avec l'enquête ouverte sur la demande d'autorisation de l'installation classée. /II. - Le dossier établi en vue de l'enquête publique, mentionné aux articles R. 512-3 à R. 512-9, est complété par : 1° Une notice de présentation ; 2° Un plan faisant ressortir le périmètre établi en application de l'article R. 515-25 ainsi que les aires correspondant à chaque catégorie de servitudes ; 3° Un plan parcellaire des terrains et bâtiments indiquant leur affectation ; 4° L'énoncé des règles envisagées dans la totalité du périmètre ou dans certaines de ses parties. ... ;

Considérant que les requérants soutenaient devant le juge des référés que le défaut de mention du périmètre et des servitudes d'utilité publique envisagées dans l'arrêté d'ouverture d'enquête publique et l'avis d'enquête publique entachait la régularité de la procédure de cette enquête ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier soumis au juge de référés que celui-ci a commis une erreur de droit ou dénaturé les faits de l'espèce en considérant que ce moyen n'était pas, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté attaqué ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 123-6 du code de l'environnement, doit figurer dans le dossier soumis à l'enquête publique : 7° La mention des textes qui régissent l'enquête publique en cause et l'indication de la façon dont cette enquête s'insère dans la procédure administrative relative à l'opération considérée ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges des référés que le chapitre contexte réglementaire du dossier administratif établi par la société Sita Espérance mentionne l'ensemble des législations dont relève le projet, y compris la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau, tandis que des développement spécifiques sont consacrés à la place de l'enquête publique dans la procédure d'autorisation ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier soumis au juge des référés que l'étude de danger, qui fait notamment état des moyens de secours disponibles, serait insuffisante au regard de l'importance des risques engendrés par un centre de stockage de déchets non dangereux ; que, par suite, le moyen tiré de ce que c'est au prix d'une erreur de droit et d'une dénaturation des faits que le juge des référés a estimé que les moyens tirés de l'irrégularité du dossier de demande d'autorisation n'étaient pas propres à créer un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté attaqué ne saurait être accueilli ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du 8° de l'article R. 512-6 du code de l'environnement : I. - A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : (...) 8° Pour les carrières et les installations de stockage de déchets, un document attestant que le demandeur est le propriétaire du terrain ou a obtenu de celui-ci le droit de l'exploiter ou de l'utiliser (...) ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés, que la société pétitionnaire a disposé, avant la délivrance de l'autorisation contestée, d'un courrier du président du conseil général, expressément mandaté à cette fin par la commission permanente de l'assemblée du département, propriétaire du terrain d'implantation du projet, lui consentant le droit d'exploiter ou d'utiliser cette parcelle dans le but d'y réaliser un centre de stockage de déchets ainsi que de déposer une demande d'autorisation en ce sens et l'autorisant à déposer une demande de permis de construire ; que, d'autre part, la délivrance d'une autorisation d'exploitation d'une installation classée n'est pas nécessairement subordonnée à la maîtrise foncière par le pétitionnaire des chemins d'accès ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le juge des référés a entaché son ordonnance d'erreur de droit et de dénaturation des circonstances de l'espèce en estimant que n'était pas de nature à créer un doute sérieux le moyen tiré de ce que la société pétitionnaire ne disposait pas de la maîtrise foncière du site, n'est pas fondé ;

Considérant, en quatrième lieu, que l'activité d'affouillement inhérente au développement de l'exploitation d'un centre de stockage de déchets, ne saurait être assimilée à l'exploitation d'une carrière ; que, par suite, les requérants ne sauraient utilement invoquer les dispositions de l'arrêté du 22 septembre 1994 relatif aux exploitations de carrières et aux installations de premier traitement des matériaux de carrière ; qu'il en va de même des dispositions figurant dans le guide technique relatif aux centres de stockage de déchets ménagers et assimilés, dont le contenu est dépourvu de caractère réglementaire ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges des référés que les prescriptions de l'arrêté attaqué ont pris en compte la collecte et le traitement de lixiviats dont les modalités techniques de mise en oeuvre figurent dans le dossier technique ; que, par suite, c'est sans commettre d'erreur de droit ni dénaturer les pièces du dossier que le juge des référés a estimé que n'était pas de nature à créer un doute sérieux, en l'état de l'instruction, le moyen tiré de l'insuffisance des prescriptions figurant dans l'arrêté attaqué ;

Considérant, en cinquième et dernier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le site d'implantation du projet ne fait l'objet d'aucune mesure de protection ou de classement au titre de la législation sur l'environnement ; que la parcelle accueille une décharge non contrôlée qui a vocation à disparaître avec la construction du centre de stockage ; que plus d'un tiers de sa superficie sera dédié à des activités agricoles et que l'augmentation du trafic routier générée par le fonctionnement de l'installation sera modeste ; que par suite, c'est sans dénaturer les faits que le juge des référés a pu estimer, en l'état de l'instruction, que n'était pas propre à créer un doute sérieux le moyen tiré de ce que le préfet de la Guadeloupe avait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de ce qu'il précède que l'ASSOCIATION ESPERANCE ENVIRONNEMENT et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demandent l'ASSOCIATION ESPERANCE ENVIRONNEMENT et autres au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'ASSOCIATION ESPERANCE ENVIRONNEMENT et autres une somme totale de 1 000 euros au titre des frais exposés par la société Sita Espérance et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de l'ASSOCIATION ESPERANCE ENVIRONNEMENT et autres est rejeté.

Article 2 : L'ASSOCIATION ESPERANCE ENVIRONNEMENT, M. A, M. et Mme B, et M. C verseront chacun une somme de 250 euros à la société Sita Espérance en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION ESPERANCE ENVIRONNEMENT, à M. A, à M. et Mme B, à M. C, à la société Sita Espérance et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 14 oct. 2009, n° 320543
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Schrameck
Rapporteur ?: M. Richard Senghor
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN ; SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 14/10/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 320543
Numéro NOR : CETATEXT000021164487 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2009-10-14;320543 ?
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