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27/10/2009 | FRANCE | N°297960

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 27 octobre 2009, 297960


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 octobre 2006 et 5 janvier 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE TRANS COTE D'AZUR, dont le siège est 29, rue Georges Clémenceau à Cannes (06400), représentée par son gérant en exercice ; la SOCIETE TRANS COTE D'AZUR demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 29 mai 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, statuant sur les recours de la Congrégation des Cisterciens de l'Immaculée Conception (CCIC) et du ministre de l'équipement, d

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Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 octobre 2006 et 5 janvier 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE TRANS COTE D'AZUR, dont le siège est 29, rue Georges Clémenceau à Cannes (06400), représentée par son gérant en exercice ; la SOCIETE TRANS COTE D'AZUR demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 29 mai 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, statuant sur les recours de la Congrégation des Cisterciens de l'Immaculée Conception (CCIC) et du ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, a, d'une part, annulé les articles 1er, 3 et 5 du jugement du 15 avril 2003 du tribunal administratif de Nice annulant la décision du préfet des Alpes-Maritimes du 22 mars 2000 interdisant l'accostage des pontons de l'île de Saint-Honorat aux compagnies maritimes de navigation à l'exclusion de la compagnie Planaria et les décisions implicites de cette même autorité du 24 avril 2000 refusant de rétablir les droits des usagers du domaine public maritime et des ouvrages publics d'accostage de l'île Saint-Honorat et les conditions d'une desserte concurrentielle de l'île, d'autre part, rejeté les conclusions présentées par la société requérante tendant à l'annulation de la lettre-circulaire du préfet des Alpes-Maritimes du 22 mars 2000 et des deux décisions implicites de la même autorité du 24 avril 2000 et, enfin, jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur ses conclusions à fin d'injonction ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel interjeté par la CCIC et le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer et de faire droit à sa demande d'injonction ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc El Nouchi, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SOCIETE TRANS COTE D'AZUR, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la Congrégation des Cisterciens de l'Immaculée Conception (CCIC) de l'abbaye de Lérins et de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de la société Planaria,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SOCIETE TRANS COTE D'AZUR, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la Congrégation des Cisterciens de l'Immaculée Conception (CCIC) de l'abbaye de Lérins et à la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de la société Planaria ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la Congrégation des Cisterciens de l'Immaculée Conception (CCIC) est propriétaire de l'île de Saint-Honorat (Alpes-Maritimes), où est construite l'abbaye de Lérins, à l'exception du domaine public maritime, lequel comporte notamment des ouvrages d'accostage ; qu'elle est concessionnaire de ces ouvrages - dont, de fait, un seul est exploitable depuis 1992 - en vertu d'une convention en date du 24 août 1989 conclue avec l'Etat ; que dans le cadre de cette concession, la CCIC a d'abord accordé les droits d'accostage pour la desserte de l'île à plusieurs compagnies maritimes, dont la SOCIETE TRANS COTE D'AZUR, avant de décider, en 1999, de réserver l'exclusivité de cette desserte à la société Planaria, qu'elle avait créée, en faisant valoir la nécessité de maîtriser le flux de visiteurs susceptibles de se rendre dans l'île, pour préserver son caractère monastique et son environnement ; que la SOCIETE TRANS COTE D'AZUR se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 29 mai 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé les articles 1er, 3 et 5 du jugement du 15 avril 2003, par lesquels le tribunal administratif de Nice a annulé, respectivement, la décision du préfet des Alpes-Maritimes qui serait contenue dans la lettre en date du 22 mars 2000 qu'il a adressée au sujet de cette desserte à l'ensemble des sociétés de transport maritimes intéressées et deux décisions implicites de ce préfet, en date du 24 avril 2000, rejetant des demandes portant sur le rétablissement des droits d'accès au domaine public maritime et aux ouvrages publics d'accostage et celui des conditions d'une desserte concurrentielle de l'île ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes de la lettre du 22 mars 2000 du préfet des Alpes-Maritimes susmentionnée que, par cette correspondance, le représentant de l'Etat dans ce département a rappelé aux sociétés de transport maritime pouvant être intéressées par la desserte de l'île Saint-Honorat que, compte tenu du caractère privé et religieux de l'île, la CCIC était libre d'organiser et de définir les modalités de desserte de sa propriété et que, à ce titre, l'utilisation du ponton lui restait concédée à titre exclusif ; que cette lettre a un caractère informatif et ne comporte aucune prescription ; que, par suite, en jugeant que cette lettre s'est bornée à rappeler la situation juridique de l'île et de sa desserte pour les visiteurs, sans la modifier, de sorte qu'elle ne peut être regardée comme une décision faisant grief susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ni dénaturé les pièces du dossier ; que, dès lors, sont inopérants le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise la cour en refusant d'annuler l'acte du préfet, en tant qu'il instituerait un monopole illégal d'exploitation des installations d'accès à l'île, ainsi que le moyen tiré de la méconnaissance des principes d'égalité, de liberté du commerce et de l'industrie et de libre concurrence à ne pas avoir relevé que la société Planaria avait bénéficié d'un monopole injustifié ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'en jugeant que l'île Saint-Honorat constituait entièrement une propriété privée, à l'exception du domaine public maritime et du point d'accostage litigieux, et en l'absence d'autres zones ou voies ouvertes à la circulation publique, la cour aurait dénaturé les pièces du dossier ;

Considérant, en troisième lieu, que c'est sans commettre d'erreur de droit que la cour a jugé que la liaison maritime entre le continent et l'île Saint-Honorat ne constituait pas un service public, dès lors que, en raison de la configuration même de l'île, les utilisateurs de cette liaison ont généralement pour but de visiter les bâtiments du monastère, propriété privée de la CCIC ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'en jugeant qu'il découlait des stipulations de la convention susmentionnée du 24 août 1989, par laquelle la CCIC s'est vu attribuer la concession de l'utilisation des ouvrages d'accostage sur l'île, que la congrégation disposait d'un droit exclusif de choisir les sociétés assurant le transport par bateau des passagers entre l'île et le continent, la cour, qui n'en a pas déduit que la concession impliquait par elle-même qu'une seule société de transport maritime devait assurer cette desserte, n'a pas dénaturé ces stipulations ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE TRANS COTE D'AZUR n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la SOCIETE TRANS COTE D'AZUR au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des mêmes dispositions et de mettre à la charge de la SOCIETE TRANS COTE D'AZUR le versement à la Congrégation des Cisterciens de l'Immaculée Conception et à l'EURL Planaria, chacune, d'une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la SOCIETE TRANS COTE D'AZUR est rejeté.

Article 2 : La SOCIETE TRANS COTE D'AZUR versera à la Congrégation des Cisterciens de l'Immaculée Conception et à l'EURL Planaria, chacune, une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE TRANS COTE D'AZUR, à la Congrégation des Cisterciens de l'Immaculée Conception, à l'EURL Planaria et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 297960
Date de la décision : 27/10/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 oct. 2009, n° 297960
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: M. Marc El Nouchi
Rapporteur public ?: M. Olléon Laurent
Avocat(s) : SCP BACHELLIER, POTIER DE LA VARDE ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:297960.20091027
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