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29/10/2009 | FRANCE | N°331135

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 29 octobre 2009, 331135


Vu la requête, enregistrée le 26 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la société ENFENCONFIANCE, représentée par sa gérante, Mme Fabienne DUISIT, et dont le siège social est sis Le Colombier à Sandrans (01400) ; la société ENFENCONFIANCE demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision de signer la convention d'objectifs et de gestion portant sur la période 2009-2012 entre l'Etat et

la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) en date du 9 avril 2...

Vu la requête, enregistrée le 26 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la société ENFENCONFIANCE, représentée par sa gérante, Mme Fabienne DUISIT, et dont le siège social est sis Le Colombier à Sandrans (01400) ; la société ENFENCONFIANCE demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision de signer la convention d'objectifs et de gestion portant sur la période 2009-2012 entre l'Etat et la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) en date du 9 avril 2009, ainsi que la suspension de l'exécution des clauses à caractère réglementaire de cette convention, notamment de ses articles 1, 2, 3, 4 et 24 et de ses annexes 1, 2, 3, 5 et 6, en tant que cette décision et ces clauses mettent en place le site Internet mon-enfant.fr ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que l'urgence est caractérisée dès lors que la signature de la convention porte une atteinte grave et immédiate tant à ses intérêts financiers qu'à l'intérêt public qui s'attache au maintien d'une situation de concurrence effective dans le secteur concerné ; que les actes attaqués sont entachés d'incompétence, en ce que le ministre chargé du budget n'est pas signataire de la convention ; que les décisions attaquées méconnaissent le principe de spécialité des établissements publics ; qu'elles méconnaissent également les compétences que les présidents de conseil général et les maires tiennent respectivement des articles L. 421-8 et L. 214-2-1 du code de l'action sociale et des familles ; qu'elles méconnaissent enfin les dispositions de l'article L. 227-1 du code de la sécurité sociale, qui définit le contenu des conventions d'objectifs et de gestion ; que la mise en place par la CNAF du site mon-enfant.fr méconnaît les dispositions du droit communautaire et du code de commerce relatives à la libre concurrence ;

Vu les décisions dont la suspension est demandée ;

Vu la requête à fin d'annulation des mêmes décisions ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2009, présenté par la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) représentée par son directeur, qui conclut au rejet de la requête et demande que soit mis à la charge de la société ENFENCONFIANCE le paiement de la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que la requête déposée par la société ENFENCONFIANCE est irrecevable dès lors que la convention a un caractère exclusivement contractuel et que les tiers à un contrat administratif sont uniquement recevables à demander l'annulation de clauses réglementaires, et que la société requérante ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, puisque la création du site litigieux ne résulte pas de la convention elle-même ; que l'urgence n'est pas caractérisée dès lors que le préjudice causé à la société ENFENCONFIANCE n'est qu'hypothétique et insuffisamment direct ; qu'il n'existe pas de moyens propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision de signature de la convention ; qu'ainsi les signataires de la convention avaient compétence pour la signer ; que le principe de spécialité n'a pas été méconnu; que la convention n'a méconnu ni la compétence des présidents de conseil général, ni celle des maires ; que la convention contestée entre bien dans les prévisions de l'article L. 227-1 du code de la sécurité sociale; que la création et le développement du site mon-enfant.fr ne s'inscrivent pas dans une logique concurrentielle, mais dans une perspective d'adaptabilité du service public ; que le droit de la concurrence ne saurait s'appliquer à l'espèce ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2009, présenté par le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, qui conclut au rejet de la requête et demande que soit mis à la charge de la société ENFENCONFIANCE le paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que la requête de la société ENFENCONFIANCE est irrecevable dès lors que la convention a un caractère contractuel et que les tiers à un contrat administratif peuvent uniquement demander l'annulation de clauses réglementaires ; que l'urgence n'est pas caractérisée dès lors que la convention prévoit seulement la généralisation du site mon-enfant.fr , créé en 2008 ; qu'au surplus, la convention ne prévoit la généralisation effective du site que mi-2010, et que ce site ne propose pas les mêmes services que ceux de la requérante ; que par voie de conséquence, la mise en oeuvre de la convention n'a pas de conséquences immédiates sur l'activité de la société et son équilibre financier ; que, par ailleurs, la généralisation du site mon-enfant.fr par la convention d'objectifs et de gestion ne correspond pas à une activité commerciale sur un marché concurrentiel ; que, par suite, la signature de cette convention ne porte pas atteinte à la préservation d'une situation de concurrence sur le marché ; que les signataires de la convention avaient compétence pour la signer ; que la CNAF est compétente, en vertu du principe de spécialité, pour mettre en place la diffusion d'informations relatives aux places d'accueil des jeunes enfants par le biais du site mon-enfant.fr en tant que cela constitue une mission complémentaire et connexe à sa mission d'information des familles ; que la signature de la convention d'objectifs et de gestion n'a pas méconnu la compétence des départements et des communes ; que la convention entre dans les prévisions de l'article L. 227-1 du code de la sécurité sociale ; qu'enfin, la CNAF n'étant pas une entreprise au sens des articles 85 et 86 du traité instituant la communauté européenne et son activité ne pouvant être considérée comme commerciale, elle ne peut se voir opposer le droit communautaire de la concurrence ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la communauté européenne ;

Vu la directive 2006/123 du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la société ENFENCONFIANCE et, d'autre part, la caisse nationale des allocations familiales et le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville ;

Vu le procès-verbal de l'audience du 13 octobre 2009 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- la représentante de la société ENFENCONFIANCE ;

- la gérante de la société ENFENCONFIANCE ;

- Me Foussard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la caisse nationale des allocations familiales ;

- les représentants de la caisse nationale des allocations familiales ;

- les représentants de la direction de la sécurité sociale ;

Vu la mesure supplémentaire d'instruction en date du 22 octobre 2009 ;

Vu les pièces du dossier desquelles il résulte que les parties ont été informées de ce que l'ordonnance à intervenir était susceptible d'être fondée sur le moyen, relevé d'office, tiré de ce que la décision des ministres concernés de signer la convention, matérialisée par la seule signature apposée sur cette convention, étant entièrement exécutée à la date à laquelle le juge des référés a été saisi de conclusions tendant à ce qu'il prononce la suspension de ses effets, les conclusions à fins de suspension de l'exécution de cette décision sont dépourvues d'objet ;

Vu les observations en réponse à l'information susvisée, enregistrées le 26 octobre 2009, présentées par la société ENFENCONFIANCE, qui soutient que la décision de signer la convention n'a pas encore produit tous ses effets et que la jurisprudence applicable au cadre contractuel n'est pas transposable à la passation d'une convention d'objectifs et de gestion ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Considérant que la société ENFENCONFIANCE, dont l'activité consiste à mettre en oeuvre, pour le compte de certains départements qui ont conclu à cette fin un marché avec elle, un service informatique recensant, à destination des familles, les disponibilités de places d'accueil auprès des assistants maternels du département, ainsi que la liste des autres structures d'accueil de la petite enfance, demande la suspension de l'exécution de la décision de signer la convention d'objectifs et de gestion portant sur la période 2009-2012 entre l'Etat et la caisse nationale des allocations familiales (CNAF) en date du 9 avril 2009, ainsi que la suspension de l'exécution des clauses à caractère réglementaire de cette convention, notamment de ses articles 1, 2, 3, 4 et 24 et de ses annexes 1, 2, 3, 5 et 6, en tant que cette décision et ces clauses mettent en place le site Internet mon-enfant.fr ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier et des observations faites en séance publique que le site Internet mon-enfant.fr , qui recueille au niveau national l'ensemble des informations sur les structures d'accueil et de prise en charge de tous les enfants de 0 à 18 ans, ainsi que sur les aides financières de toute nature auxquelles peuvent prétendre les familles, a été mis en place par la CNAF à partir de la fin de l'année 2007 et généralisé au cours de l'année 2008 ; que les stipulations de la convention d'objectifs et de gestion conclue entre l'Etat et la CNAF pour la période 2009-2012 relatives à ce site Internet se bornent à prévoir la poursuite de son utilisation, dans le cadre de l'objectif de meilleure information des familles assigné à la CNAF ; qu'aucune de ces stipulations ne présentant de caractère réglementaire, la société ENFENCONFIANCE, tiers à la convention, ne serait pas recevable à en demander l'annulation pour excès de pouvoir ; que dès lors ses conclusions à fin de suspension de ces stipulations ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant, d'autre part, que la décision des ministres concernés de signer la convention, matérialisée par la seule signature apposée sur cette convention en date du 9 avril 2009, était entièrement exécutée à la date à laquelle le juge des référés a été saisi de conclusions tendant à ce qu'il prononce la suspension de ses effets ; que les conclusions à fins de suspension de l'exécution de cette décision sont par suite dépourvues d'objet et sont irrecevables ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société ENFENCONFIANCE au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette société les sommes que demandent la CNAF et le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville au titre des mêmes dispositions ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de la société ENFENCONFIANCE est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la caisse nationale des allocations familiales et le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville au titre de l'article L. 761-1 du code justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société ENFENCONFIANCE, à la caisse nationale des allocations familiales et au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 29 oct. 2009, n° 331135
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Chantepy
Rapporteur ?: M. Christophe Chantepy
Avocat(s) : FOUSSARD

Origine de la décision
Formation : Juge des référés
Date de la décision : 29/10/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 331135
Numéro NOR : CETATEXT000021242856 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2009-10-29;331135 ?
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