La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/11/2009 | FRANCE | N°324880

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 20 novembre 2009, 324880


Vu la requête, enregistrée le 9 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Philippe A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'apprécier, en exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Douai du 19 décembre 2008, la légalité du 8° de l'article 2-2 du décret n° 99-247 du 29 mars 1999 relatif à l'allocation de cessation anticipée d'activité prévue à l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, dans sa rédaction issue du décret n° 2000-638 du 7 juillet 2000 et de le déclarer illégal ;>
2°) de mettre à la charge de la caisse régionale d'assurance maladie de Nord-Picar...

Vu la requête, enregistrée le 9 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Philippe A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'apprécier, en exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Douai du 19 décembre 2008, la légalité du 8° de l'article 2-2 du décret n° 99-247 du 29 mars 1999 relatif à l'allocation de cessation anticipée d'activité prévue à l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, dans sa rédaction issue du décret n° 2000-638 du 7 juillet 2000 et de le déclarer illégal ;

2°) de mettre à la charge de la caisse régionale d'assurance maladie de Nord-Picardie la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, notamment son article 41 ;

Vu le décret n° 99-247 du 29 mars 1999, notamment le 8° de son article 2-2, dans sa rédaction issue du décret n° 2000-638 du 7 juillet 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Christine Grenier, chargée des fonctions de Maître des requêtes,

- les conclusions de M. Luc Derepas, rapporteur public ;

Considérant que, par un arrêt du 19 décembre 2008, la cour d'appel de Douai, saisie d'un litige relatif au montant de l'allocation de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de l'amiante versée à M. A, a sursis à statuer jusqu'à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur l'exception d'illégalité soulevée par M. A à l'encontre du 8° de l'article 2-2 du décret du 29 mars 1999, dans sa rédaction issue du décret du 7 juillet 2000 ;

Considérant que l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 instaure une allocation de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs victimes de l'amiante ; qu'en vertu du II de cet article, le montant de l'allocation est défini par rapport à la moyenne actualisée des salaires mensuels bruts des douze derniers mois d'activité salariée du bénéficiaire, dont sont exclues, dans des conditions prévues par décret, certaines périodes d'activité donnant lieu à une rémunération réduite ; que l'article 2 du décret du 29 mars 1999, pris pour l'application de ces dispositions, précise que le salaire de référence servant de base à la détermination de cette allocation est fixé par référence aux rémunérations définies à l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, qui comprennent en particulier les indemnités de congés payés ;

Considérant que le décret du 7 juillet 2000 a ajouté au décret du 29 mars 1999 un article 2-2 définissant les périodes d'activité donnant lieu à rémunération réduite qui sont exclues du calcul du salaire de référence ; que le 8° de cet article énonce que ne sont pas prises en compte les périodes donnant lieu à indemnité de congé payé d'un montant inférieur au salaire habituel ou lorsque l'indemnité est versée par une caisse professionnelle ; qu'il résulte de ce texte que les indemnités de congés payés versées par les caisses professionnelles sont exclues de manière générale du calcul du salaire de référence pour l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, que leur montant soit ou non inférieur au salaire habituel des intéressés ;

Considérant que le II de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 permet, ainsi qu'il a été dit, d'exclure les périodes d'activité donnant lieu à une rémunération réduite du montant de l'allocation en cause ; que si les périodes donnant lieu au versement d'une indemnité de congé payé pouvaient, par suite, légalement être exclues de cette assiette lorsqu'elles sont d'un montant inférieur au salaire habituel, le principe d'égalité fait en revanche obstacle, eu égard à l'objet même de l'allocation de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de l'amiante, à ce que le salaire de référence pour le calcul de cette allocation soit déterminé de manière différente selon que ces indemnités de congés payés sont versées directement par l'employeur ou par une caisse professionnelle ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. A est fondé à soutenir que la différence de traitement introduite par le 8° de l'article 2-2 du décret du 29 mars 1999 est entachée d'illégalité ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la caisse régionale d'assurance maladie de Nord-Picardie le versement d'une somme de 1 500 euros à M. A en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il est déclaré que le 8° de l'article 2-2 du décret du 29 mars 1999 est entaché d'illégalité, en tant qu'il comporte les mots ou lorsque l'indemnité est versée par une caisse professionnelle .

Article 2 : La caisse régionale d'assurance maladie de Nord-Picardie versera une somme de 1 500 euros à M. A au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe A, à la caisse régionale d'assurance maladie de Nord-Picardie, au Premier ministre, au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville et à la ministre de la santé et des sports.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 324880
Date de la décision : 20/11/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Appréciation de la légalité

Analyses

61-03 SANTÉ PUBLIQUE. LUTTE CONTRE LES FLÉAUX SOCIAUX. - VERSEMENT D'UNE ALLOCATION DE CESSATION ANTICIPÉE D'ACTIVITÉ AUX TRAVAILLEURS VICTIMES DE L'AMIANTE (ART. 41, II DE LA LFSS POUR 1999) - EXCLUSION, POUR LE CALCUL DU SALAIRE DE RÉFÉRENCE, DES PÉRIODES DONNANT LIEU AU VERSEMENT D'UNE INDEMNITÉ DE CONGÉ D'UN MONTANT INFÉRIEUR AU SALAIRE HABITUEL - PRISE EN COMPTE DIFFÉRENTE DE CES PÉRIODES SELON QUE LES INDEMNITÉS DE CONGÉ PAYÉ SONT VERSÉES PAR L'EMPLOYEUR OU PAR UNE CAISSE PROFESSIONNELLE (ART. 2-2, 8° DU DÉCRET DU 29 MARS 1999 DANS SA RÉDACTION ISSUE DU DÉCRET DU 7 JUILLET 2000) - MÉCONNAISSANCE DU PRINCIPE D'ÉGALITÉ.

61-03 Le II de l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 permet d'exclure les périodes d'activité donnant lieu à une rémunération réduite du calcul du montant de l'allocation de cessation anticipée d'activité versée aux travailleurs victimes de l'amiante. Si les périodes donnant lieu au versement d'une indemnité de congé payé pouvaient, par suite, légalement être exclues de l'assiette de cette allocation lorsqu'elles sont d'un montant inférieur au salaire habituel, le principe d'égalité fait en revanche obstacle, eu égard à l'objet même de l'allocation, à ce que le salaire de référence soit déterminé de manière différente selon que ces indemnités de congés payés sont versées directement par l'employeur ou par une caisse professionnelle. Ainsi, la différence de traitement introduite par le 8° de l'article 2-2 du décret n° 99-247 du 29 mars 1999, dans sa rédaction issue du décret n° 2000-638 du 7 juillet 2000, est entachée d'illégalité.


Publications
Proposition de citation : CE, 20 nov. 2009, n° 324880
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: Mme Christine Grenier
Rapporteur public ?: M. Derepas Luc

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:324880.20091120
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award