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04/12/2009 | FRANCE | N°310897

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 04 décembre 2009, 310897


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 novembre 2007 et 26 février 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 25 septembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 31 janvier 2006 du tribunal administratif de Dijon rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 novembre 2004, notifiée le 25 novembre, du préfet de Saône-et-Loire ayant eu pour

effet de retirer la décision implicite de non-opposition, née le 24 n...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 novembre 2007 et 26 février 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 25 septembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 31 janvier 2006 du tribunal administratif de Dijon rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 novembre 2004, notifiée le 25 novembre, du préfet de Saône-et-Loire ayant eu pour effet de retirer la décision implicite de non-opposition, née le 24 novembre, à la plantation de peupliers sur les parcelles cadastrées A n° 169, 170, 172 et 173 situées sur le territoire de la commune de Louhans-Châteaurenaud ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler la décision du 23 novembre 2004 du préfet de Saône-et-Loire ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Emmanuel Vernier, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de Me Luc-Thaler, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Catherine de Salins, rapporteur public,

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Luc-Thaler, avocat de M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, que M. A, qui avait le projet de réaliser une plantation de 156 peupliers sur les parcelles cadastrées A n° 169, 170, 172 et 173, situées sur le territoire de la commune de Louhans-Châteaurenaud, en a fait, en application des dispositions de l'article R. 126-8 du code rural, la déclaration préalable auprès du maire de cette commune ; que ce dernier n'étant pas compétent pour s'opposer à cette déclaration l'a, en application de l'article 20 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, transmise au préfet de Saône-et-Loire par lettre reçue par ce dernier le 24 août 2004 ; que par une décision du 23 novembre 2004, notifiée à M. A le 25 novembre, le préfet a déclaré s'opposer au boisement projeté ; que M. A se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Dijon ayant rejeté sa demande dirigée contre la décision du 23 novembre 2004 ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-3, R. 611-5 et R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-3 du même code : Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-2 du même code : Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond et des visas de l'arrêt attaqué que l'avis d'audience indiquait comme date d'audience le 11 septembre 2007 ; qu'à défaut d'une ordonnance de clôture, la clôture est intervenue le 7 septembre 2007 à minuit ; que le premier mémoire en défense du ministre de l'agriculture et de la pêche a été enregistré au greffe de la cour le 10 septembre 2007 ; que si la cour était fondée, après avoir pris connaissance de ce mémoire et l'avoir visé, à ne pas le communiquer dès lors qu'elle ne prenait en compte aucun des éléments qui y étaient contenus, il ressort des termes de l'arrêt attaqué que la production de ce mémoire a eu une influence sur la solution retenue par les juges d'appel ; que dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, M. A est fondé à soutenir que la cour a méconnu les exigences du débat contradictoire et à demander l'annulation de son arrêt ;

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 20 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : Lorsqu'une demande est adressée à une autorité administrative incompétente, cette dernière la transmet à l'autorité administrative compétente et en avise l'intéressé. (...) / Le délai au terme duquel est susceptible d'intervenir une décision implicite d'acceptation ne court qu'à compter de la date de réception de la demande par l'autorité compétente (...) ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 24 de la même loi : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (... ) ; qu'il résulte de ces dispositions que les décisions qui retirent une décision créatrice de droits, lesquelles doivent être motivées en application de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, ne peuvent intervenir que si les personnes intéressées ont, au préalable, été invitées à présenter leurs observations ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article R. 126-8 du code rural, dans sa rédaction alors en vigueur : Quiconque veut procéder à des semis, à des plantations ou à des replantations d'essences forestières dans les périmètres où ces semis, plantations et replantations sont réglementés doit en faire la déclaration préalable au préfet par envoi postal ou procédé télématique ou informatique homologué permettant de certifier la date d'envoi en précisant la désignation cadastrale des parcelles concernées, la nature sommaire des travaux projetés et les essences prévues. Il en va de même dans les zones mentionnées à l'article R. 126-2 lorsque l'arrêté du préfet a soumis à déclaration préalable les semis, les plantations ou les replantations d'essences forestières. / Le préfet peut s'opposer aux semis, aux plantations ou aux replantations pour un ou plusieurs des motifs énoncés à l'article R. 126-1 ou subordonner leur exécution à certaines conditions. / S'il n'a pas reçu notification de l'opposition du préfet à l'expiration d'un délai de trois mois après réception de sa déclaration, le demandeur peut procéder aux semis, plantations ou replantations pendant cinq ans à compter de cette date ;

Considérant que la déclaration de boisement de M. A a été transmise par le maire de Châteaurenaud au préfet de Saône-et-Loire le 24 août 2004 ; que, si le préfet a pris le 23 novembre 2004, avant l'expiration du délai de trois mois au terme duquel, en vertu des dispositions précitées de l'article R. 126-8 du code rural, il peut s'opposer aux semis, aux plantations ou aux replantations pour un ou plusieurs des motifs énoncés à l'article R. 126-1 ou subordonner leur exécution à certaines conditions, une décision d'opposition à la déclaration, cette décision n'a été notifiée à M. A que le 25 novembre ; que celui-ci était bénéficiaire depuis le 24 novembre d'une décision implicite de non-opposition aux travaux décrits dans sa déclaration ; que, cette décision implicite avait créé des droits ; que, par suite, la décision expresse notifiée le 25 novembre ne peut s'analyser que comme une décision de retrait de la précédente décision implicite créatrice de droits, laquelle a été prise selon une procédure irrégulière faute pour le préfet d'avoir invité M. A à présenter des observations écrites avant son intervention ; qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision d'opposition du préfet de Saône-et-Loire en date du 23 novembre 2004, notifiée le 25 novembre ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A de la somme de 3 500 euros ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 25 septembre 2007 et le jugement du tribunal administratif de Dijon du 31 janvier 2006 sont annulés.

Article 2 : La décision du 23 novembre 2004 du préfet de Saône-et-Loire est annulée.

Article 3 : L'Etat versera à M. A une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jean A et au ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 04 déc. 2009, n° 310897
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Emmanuel Vernier
Avocat(s) : LUC-THALER

Origine de la décision
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Date de la décision : 04/12/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 310897
Numéro NOR : CETATEXT000021385704 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2009-12-04;310897 ?
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