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04/12/2009 | FRANCE | N°332882

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 04 décembre 2009, 332882


Vu la requête, enregistrée le 20 octobre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Madeleine A, demeurant ..., agissant au nom de sa fille mineure, Mlle Hodieux Audrey Jeanne B ; Mme A demande au juge des référés du Conseil d'Etat d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision en date du 7 mai 2009 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du consul général de France

du 29 janvier 2008 refusant l'octroi d'un visa de long séjour à ...

Vu la requête, enregistrée le 20 octobre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Madeleine A, demeurant ..., agissant au nom de sa fille mineure, Mlle Hodieux Audrey Jeanne B ; Mme A demande au juge des référés du Conseil d'Etat d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision en date du 7 mai 2009 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du consul général de France du 29 janvier 2008 refusant l'octroi d'un visa de long séjour à Mlle B ;

elle soutient que l'urgence est caractérisée dès lors que la décision litigieuse prolonge de manière excessive l'éloignement entre Mme A et sa fille, alors que cela fait plus de six ans que la requérante entreprend des démarches pour que sa fille la rejoigne en France ; qu'il existe un doute sérieux quant à la décision contestée ; qu'en effet, elle n'est pas motivée ; que la commission de recours contre les décisions de refus de visa a commis une erreur de droit en fondant son refus de visa sur le fait que Mme A ait attendu durant une longue période avant de solliciter la venue de sa fille ; que la décision contestée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'en effet, les erreurs commises sur l'acte d'état-civil de Mlle B ont été rectifiées par le parquet du procureur de la République d'Abidjan et d'autres documents officiels établissent le lien de filiation ; que Mme A apporte de nombreuses preuves relatives à sa contribution à l'éducation et à l'entretien de sa fille ; qu'elle a commencé ses démarches pour faire venir sa fille dès 2003 ; que la décision contestée porte atteinte au droit de Mlle B et de Mme A de mener une vie privée et familiale normale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la décision dont la suspension est demandée ;

Vu la copie de la requête à fin d'annulation présentée à l'encontre de cette décision ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 novembre 2009, présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire qui conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'à titre principal, la requête est irrecevable dès lors que la requête en annulation a été présentée deux mois après la notification de la décision litigieuse ; qu'à titre subsidiaire, il n'existe aucun doute quant à la légalité de la décision contestée ; qu'en effet, celle-ci est suffisamment motivée ; qu'en raison des incohérences des actes d'état-civil de Mlle B, un doute sérieux pèse sur la réalité du lien de filiation entre elle et la requérante ; que, par conséquent, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; qu'enfin, la condition d'urgence n'est pas remplie puisque Mme A avait la possibilité de demander la venue de sa fille dès 1995 et que la demande de visa de long séjour a été déposée en 2007 ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 30 novembre 2009, présenté par Mme A qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; elle soutient, en outre, que la date de notification de la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est le 18 mai 2009, date à laquelle Mme A a récupéré ladite lettre lui notifiant ladite décision ; que, par conséquent, la requête est recevable ; qu'il ne saurait être reproché à Mme A d'avoir tardé à entamer les démarches nécessaires à la rectification des erreurs matérielles figurant sur l'acte d'état-civil de Mlle B dès lors qu'elle n'a eu connaissance de ces erreurs qu'au moment où elle a effectué les premières démarches de demande de visa ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, Mme A et, d'autre part, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 1er décembre 2009 à 9 heures 30 au cours de laquelle ont été entendus :

- Mme A ;

- le représentant du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Considérant que l'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celle-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que l'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A, ressortissante française, née le 30 mai 1965, déclare être la mère de Mlle Hodiaux Audrey B, de nationalité ivoirienne, née le 26 février 1993 ; qu'elle demande la suspension de l'exécution de la décision par laquelle la délivrance d'un visa de long séjour, en qualité d'enfant de ressortissant français, a été refusée à Mlle B ;

Considérant que pour refuser de délivrer à Mlle B un visa d'entrée en France en qualité d'enfant de ressortissant français, l'administration se fonde sur des indices précis et concordants qui l'ont conduit à suspecter l'authenticité des documents d'état civil produits à l'appui de la demande de visa ; qu'elle relève ainsi que l'acte de naissance de l'intéressée comporte de nombreuses incohérences, quant à la date de naissance du père et quant à la date et au lieu de naissance de la mère de Mlle B ; qu'en l'état de l'instruction, Mme A ne fournit pas d'élément suffisamment sérieux pour dissiper le doute ainsi créé sur la réalité des liens de parenté qui l'uniraient à Mlle B ; qu'en outre, Mlle B, aujourd'hui âgée de 16 ans, a toujours vécu en Côte d'Ivoire depuis sa naissance ; qu'elle n'a introduit qu'en 2007 une demande de visa pour rejoindre Mme A, entrée en France en 1995 ; que dans ces conditions, et compte-tenu de la permanence des attaches familiales de Mlle B dans son pays d'origine, le refus de visa contesté n'a pas porté aux droits des personnes concernées une atteinte telle que la condition d'urgence exigée par les dispositions précitées de l'article L. 521-1 du code de justice administrative ; que dès lors la requête de Mme A ne peut qu'être rejetée ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de Mme Madeleine A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme Madeleine A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 332882
Date de la décision : 04/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 04 déc. 2009, n° 332882
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Aguila
Rapporteur ?: M. Yann JR Aguila

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:332882.20091204
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