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07/12/2009 | FRANCE | N°301563

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 07 décembre 2009, 301563


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 février 2007 et 14 mai 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE AUTOGRILL COTE FRANCE, dont le siège social est 18 avenue Charles Reattu à Marseille (13000) ; la SOCIETE AUTOGRILL COTE FRANCE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 12 décembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, faisant droit à la requête de Mme Bernadette A, a annulé le jugement du 14 mars 2002 du tribunal administratif de Dijon rejetant la demande de cette derni

ère tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'emploi et...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 février 2007 et 14 mai 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE AUTOGRILL COTE FRANCE, dont le siège social est 18 avenue Charles Reattu à Marseille (13000) ; la SOCIETE AUTOGRILL COTE FRANCE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 12 décembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, faisant droit à la requête de Mme Bernadette A, a annulé le jugement du 14 mars 2002 du tribunal administratif de Dijon rejetant la demande de cette dernière tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'emploi et de la solidarité du 20 avril 2001 autorisant la société Autogrill Côté France à la licencier, ainsi que cette décision du 20 avril 2001 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête d'appel de Mme A ;

3°) de mettre à la charge de Mme A la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Barbat, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la SOCIETE AUTOGRILL COTE FRANCE et de la SCP Didier, Pinet, avocat Mme A,

- les conclusions de M. Yves Struillou, rapporteur public,

- la parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la SOCIETE AUTOGRILL COTE FRANCE et à la SCP Didier, Pinet, avocat Mme A ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant que le refus opposé par un salarié protégé à un changement de ses conditions de travail décidé par son employeur en vertu, soit des obligations souscrites dans le contrat de travail, soit de son pouvoir de direction, constitue, en principe, une faute ; qu'en cas d'un tel refus, l'employeur, s'il ne peut directement imposer au salarié ledit changement, doit, sauf à y renoncer, saisir l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de licenciement à raison de la faute qui résulterait de ce refus ; qu'après s'être assuré que la mesure envisagée ne constitue pas une modification du contrat de travail de l'intéressé, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'apprécier si le refus du salarié constitue une faute d'une gravité suffisante pour justifier l'autorisation sollicitée, compte tenu de la nature du changement envisagé, de ses modalités de mise en oeuvre et de ses effets, tant au regard de la situation personnelle du salarié, que des conditions d'exercice de son mandat ; qu'en tout état de cause, le changement des conditions de travail ne peut avoir pour objet de porter atteinte à l'exercice de ses fonctions représentatives ;

Considérant, qu'en affirmant que le refus par un salarié protégé d'un changement dans ses conditions de travail n'était, par lui-même, constitutif d'aucune faute, la cour administrative d'appel de Lyon a méconnu le principe énoncé ci-dessus et a, ce faisant, entaché sa décision d'une erreur de droit ; que, par suite, la SOCIETE AUTOGRILL COTE FRANCE est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SOCIETE AUTOGRILL COTE FRANCE qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande Mme A au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme A la somme que demande la SOCIETE AUTOGRILL COTE FRANCE au même titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 12 décembre 2006 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Lyon.

Article 3 : Les conclusions de Mme A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la SOCIETE AUTOGRILL COTE FRANCE est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE AUTOGRILL COTE FRANCE, à Mme Bernadette A et au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.


Synthèse
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 301563
Date de la décision : 07/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-02-01 TRAVAIL ET EMPLOI. LICENCIEMENTS. AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIÉS PROTÉGÉS. CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION. LICENCIEMENT POUR FAUTE. EXISTENCE D'UNE FAUTE D'UNE GRAVITÉ SUFFISANTE. - REFUS D'UN CHANGEMENT DES CONDITIONS DE TRAVAIL SANS MODIFICATION DU CONTRAT DE TRAVAIL - FAIT CONSTITUANT EN PRINCIPE UNE FAUTE [RJ1] DE NATURE À JUSTIFIER UN LICENCIEMENT SI ELLE EST D'UNE GRAVITÉ SUFFISANTE - CRITÈRES D'APPRÉCIATION.

66-07-01-04-02-01 Le refus opposé par un salarié protégé à un changement de ses conditions de travail décidé par son employeur en vertu, soit des obligations souscrites dans le contrat de travail, soit de son pouvoir de direction, constitue, en principe, une faute. L'employeur, s'il ne peut directement imposer au salarié le changement, doit, sauf à y renoncer, saisir l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de licenciement. Dans ce cas, l'autorité administrative doit, après s'être assurée que la mesure envisagée ne constitue pas une modification du contrat de travail de l'intéressé, apprécier si le refus du salarié constitue une faute d'une gravité suffisante pour justifier l'autorisation sollicitée, compte tenu de la nature du changement envisagé, de ses modalités de mise en oeuvre et de ses effets, tant au regard de la situation personnelle du salarié, que des conditions d'exercice de son mandat.


Références :

[RJ1]

Rappr. 10 mars 1997, Vincent, n° 170114, p. 76.

Cf. 14 novembre 2008, Mme Viel, n° 306226, T. pp. 891-954-955 ;

Cass. Soc., 14 novembre 2000, n° 99-43.270, Bull civ. n° 373.


Publications
Proposition de citation : CE, 07 déc. 2009, n° 301563
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vigouroux
Rapporteur ?: M. Philippe Barbat
Rapporteur public ?: M. Struillou Yves
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI ; SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:301563.20091207
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