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09/12/2009 | FRANCE | N°280969

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 09 décembre 2009, 280969


Vu, avec les pièces qui y sont visées, la décision du 21 novembre 2007 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur le pourvoi enregistré sous le n° 280969, présenté pour la COMMUNE DE SAUSHEIM et tendant à l'annulation du jugement du 10 mars 2005 du tribunal administratif de Strasbourg en tant que celui-ci, d'une part, a annulé la décision implicite du maire de la COMMUNE DE SAUSHEIM refusant de communiquer à M. Pierre A les courriers préfectoraux afférents aux essais de dissémination d'organismes génétiquement modifiés 98.04.08, 98.04.11 et 98.04.16 et les fic

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Vu, avec les pièces qui y sont visées, la décision du 21 novembre 2007 par laquelle le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur le pourvoi enregistré sous le n° 280969, présenté pour la COMMUNE DE SAUSHEIM et tendant à l'annulation du jugement du 10 mars 2005 du tribunal administratif de Strasbourg en tant que celui-ci, d'une part, a annulé la décision implicite du maire de la COMMUNE DE SAUSHEIM refusant de communiquer à M. Pierre A les courriers préfectoraux afférents aux essais de dissémination d'organismes génétiquement modifiés 98.04.08, 98.04.11 et 98.04.16 et les fiches d'implantation relatives aux essais B/FR/98.04.02, 98.04.08, 98.04.11, 98.04.13 et 98.04.16, à l'exception des informations nominatives et, d'autre part, a enjoint au maire de procéder à la communication de ces documents, a sursis à statuer jusqu'à ce que la Cour de justice des Communautés européennes se soit prononcée sur les questions suivantes :

1° Le lieu où la dissémination des organismes génétiquement modifiés sera pratiquée , qui ne peut, aux termes de l'article 19 de la directive du Conseil 90/220/CEE du 23 avril 1990 relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement, être tenu pour confidentiel, doit-il s'entendre de la parcelle cadastrée ou d'une zone géographique plus large correspondant ou bien à la commune sur le territoire de laquelle la dissémination intervient ou bien à une zone plus étendue encore (canton, département) '

2° Dans l'hypothèse où le lieu devrait être entendu comme désignant la parcelle cadastrée, une réserve tenant à la protection de l'ordre public ou d'autres secrets protégés par la loi, peut-elle être opposée à la communication des références cadastrales du lieu de la dissémination, sur le fondement de l'article 95 du traité instituant la Communauté économique européenne devenue la Communauté européenne ou de la directive 2003/4/CE du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement ou d'un principe général du droit communautaire '

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule ;

Vu le traité instituant la Communauté économique européenne devenue la Communauté européenne, notamment son article 95 ;

Vu la directive 90/313/CEE du Conseil du 7 juin 1990 concernant la liberté d'accès à l'information en matière d'environnement ;

Vu la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 mars 2001 relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement et abrogeant la directive 90/220/CEE du Conseil ;

Vu la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement et abrogeant la directive 90/313/CEE du Conseil ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;

Vu la loi n° 92-654 du 13 juillet 1992 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Brice Bohuon, Auditeur,

- les observations de Me Le Prado, avocat de la COMMUNE DE SAUSHEIM,

- les conclusions de M. Julien Boucher, Rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Le Prado, avocat de la COMMUNE DE SAUSHEIM.

Considérant que dans l'arrêt du 17 février 2009 par lequel elle s'est prononcée sur les questions dont le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, après avoir écarté le moyen tiré de ce que le jugement attaqué méconnaissait l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, l'avait saisie à titre préjudiciel, la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit que : 1°) Le lieu de la dissémination , au sens de l'article 25, paragraphe 4, premier tiret, de la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 mars 2001, relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement et abrogeant la directive 90/220/CEE du Conseil, est déterminé par toute information relative à la localisation de la dissémination soumise par le notifiant aux autorités compétentes de l'Etat membre sur le territoire duquel cette dissémination doit avoir lieu dans le cadre des procédures visées aux articles 6 à 8, 13, 17, 20 ou 23 de la même directive. / 2°) Une réserve tenant à la protection de l'ordre public ou à d'autres intérêts protégés par la loi ne saurait être opposée à la communication des informations énoncées à l'article 25, paragraphe 4, de la directive 2001/18 ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par une lettre du 21 avril 2004, M. A a demandé au maire de Sausheim de lui communiquer l'avis au public, la fiche d'implantation, le courrier préfectoral d'accompagnement concernant chaque dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés ayant eu lieu sur le territoire de la commune ainsi que la fiche d'information pour toute nouvelle dissémination ayant eu lieu en 2004 sur le territoire de la commune ; qu'en l'absence de réponse, M. A a saisi la commission d'accès aux documents administratifs qui, lors de sa séance du 24 juin 2004, a, d'une part, émis un avis favorable à la communication de l'avis au public et de la première page du courrier d'accompagnement du préfet en application de l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978, d'autre part, en application de l'article 6 de la même loi, émis un avis défavorable à la communication d'une copie de la fiche d'implantation et de la carte de localisation des disséminations au motif que cette communication porterait atteinte au secret de la vie privée et à la sécurité des exploitants concernés, et enfin, déclaré irrecevable la demande tendant à la communication des fiches relatives à toute nouvelle dissémination qui aurait lieu en 2004 ; que le maire de Sausheim a communiqué, les 24 mai et 4 août 2004, les avis au public relatifs aux cinq disséminations d'organismes génétiquement modifiés effectuées sur le territoire de la commune et les courriers d'accompagnement préfectoraux pour deux d'entre eux ; que la COMMUNE DE SAUSHEIM demande l'annulation du jugement du 10 mars 2005 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a, d'une part, annulé la décision implicite du maire de Sausheim refusant de communiquer à M. A les courriers préfectoraux afférents aux autres essais de dissémination et les fiches d'implantation relatives aux cinq essais, à l'exception des informations nominatives et, d'autre part, enjoint au maire de procéder à la communication de ces documents ;

Considérant que selon l'article 25 de la directive du Parlement européen et du Conseil du 12 mars 2001 relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement et abrogeant la directive 90/220/CEE du Conseil : Confidentialité / 1. La Commission et les autorités compétentes ne divulguent à des tiers aucune information confidentielle qui leur serait notifiée ou qui ferait l'objet d'un échange d'informations au titre de la présente directive, et ils protègent les droits de propriété intellectuelle afférents aux données reçues. / 2. Le notifiant peut indiquer quelles sont les informations contenues dans les notifications effectuées en application de la présente directive dont la divulgation pourrait nuire à sa position concurrentielle et qui devraient donc être traitées de façon confidentielle. Dans de tels cas, une justification vérifiable doit être apportée (...) / 4. En aucun cas, les informations suivantes, (...) ne peuvent rester confidentielles : / - description générale du ou des OGM, nom et adresse du notifiant, but de la dissémination, lieu de la dissémination et utilisations prévues (...) ; que l'article L. 535-3 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée, dispose : I. Le demandeur d'une autorisation de dissémination ou de mise sur le marché peut indiquer à l'administration les informations fournies à l'appui de sa demande dont la divulgation pourrait porter préjudice à ses intérêts ou qui touchent à des secrets protégés par la loi. Les informations reconnues confidentielles par l'autorité administrative ne peuvent être communiquées à des tiers. / II. Ne peuvent être considérées comme confidentielles : / 1° Les informations fournies à l'appui d'une demande d'autorisation de dissémination et portant sur : (...) / c) Le but de la dissémination et le lieu où elle sera pratiquée (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'interprétation des dispositions de la directive du 12 mars 2001 donnée par la Cour de justice des Communautés européennes, d'une part, que le lieu de la dissémination, au sens de son article 25, est déterminé par toute information relative à la localisation de la dissémination soumise par le notifiant aux autorités compétentes et, d'autre part, qu'aucune réserve tenant à la protection de l'ordre public ou à d'autres intérêts protégés par la loi ne saurait être opposée à la communication de ces informations ; qu'il suit de là que l'autorité administrative qui les détient est tenue de communiquer, sans délai et sans condition, à toute personne qui en fait la demande, l'ensemble des données en sa possession relatives à la localisation de la dissémination, telles qu'elles lui ont été transmises par le demandeur de l'autorisation de procéder à la dissémination afin de permettre l'examen des conséquences du projet pour l'environnement ; que la circonstance que la communication de la référence cadastrale des parcelles sur lesquelles sont pratiquées les disséminations pourrait avoir pour conséquence de porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens est, en toutes circonstances, sans incidence sur cette obligation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est sans erreur de droit que le tribunal administratif de Strasbourg, qui n'a ni insuffisamment motivé son jugement, ni dénaturé les pièces du dossier en estimant que certains courriers préfectoraux n'avaient pas été communiqués à M. A, a jugé que l'intégralité des documents demandés par M. A à la COMMUNE DE SAUSHEIM était communicable, sans qu'y fissent obstacle ni la circonstance que la parcelle cadastrale de localisation y figurait, ni l'allégation, d'ailleurs nouvelle en cassation, du danger pour l'ordre public qui résulterait de cette communication ; que, par suite, la COMMUNE DE SAUSHEIM n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la COMMUNE DE SAUSHEIM est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE SAUSHEIM, à M. Pierre A, au Premier ministre et au ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 280969
Date de la décision : 09/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ACCÈS AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS - ACCÈS AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS AU TITRE DE LA LOI DU 17 JUILLET 1978 - DROIT À LA COMMUNICATION - DOCUMENTS ADMINISTRATIFS COMMUNICABLES - TOUT DOCUMENT RELATIF À LA LOCALISATION DE LA DISSÉMINATION D'OGM - COMMUNICATION DE LA RÉFÉRENCE CADASTRALE DES PARCELLES SUSCEPTIBLE DE CRÉER UN RISQUE POUR LA SÉCURITÉ DES PERSONNES ET DES BIENS - CIRCONSTANCE SANS INCIDENCE.

26-06-01-02-02 L'autorité administrative qui détient des informations relatives à la localisation de la dissémination d'organismes génétiquement modifiés (OGM) est tenue de communiquer, sans délai et sans condition, à toute personne qui en fait la demande, l'ensemble des données en sa possession relatives à la localisation de la dissémination des OGM, telles qu'elles lui ont été transmises par le demandeur de l'autorisation de procéder à la dissémination lors de l'examen des conséquences du projet pour l'environnement. La circonstance que la communication de la référence cadastrale des parcelles sur lesquelles sont pratiquées les disséminations pourrait avoir pour conséquence de porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens est, en toutes circonstances, sans incidence sur cette obligation.

NATURE ET ENVIRONNEMENT - AUTRES MESURES PROTECTRICES DE L'ENVIRONNEMENT - DISSÉMINATION D'OGM - LOCALISATION - DROIT À COMMUNICATION AUX TIERS - SANS RESTRICTION - DES DOCUMENTS RELATIFS À CETTE DISSÉMINATION - COMMUNICATION DE LA RÉFÉRENCE CADASTRALE DES PARCELLES SUSCEPTIBLE DE CRÉER UN RISQUE POUR LA SÉCURITÉ DES PERSONNES ET DES BIENS - CIRCONSTANCE SANS INCIDENCE.

44-05 L'autorité administrative qui détient des informations relatives à la localisation de la dissémination d'organismes génétiquement modifiés (OGM) est tenue de communiquer, sans délai et sans condition, à toute personne qui en fait la demande, l'ensemble des données en sa possession relatives à la localisation de la dissémination des OGM, telles qu'elles lui ont été transmises par le demandeur de l'autorisation de procéder à la dissémination lors de l'examen des conséquences du projet pour l'environnement. La circonstance que la communication de la référence cadastrale des parcelles sur lesquelles sont pratiquées les disséminations pourrait avoir pour conséquence de porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens est, en toutes circonstances, sans incidence sur cette obligation.


Publications
Proposition de citation : CE, 09 déc. 2009, n° 280969
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Brice Bohuon
Rapporteur public ?: M. Boucher Julien
Avocat(s) : LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:280969.20091209
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