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09/12/2009 | FRANCE | N°302059

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 09 décembre 2009, 302059


Vu le pourvoi, enregistré le 27 février 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'article 3 de l'arrêt du 28 décembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, ne faisant que partiellement droit à son recours contre le jugement du 6 novembre 2001 du tribunal administratif de Dijon, a rejeté ses conclusions tendant à ce que soit remis à la charge de la SARL FB le supplément d'impôt sur les sociétés et de la contribution additionnelle

ainsi que les pénalités correspondantes résultant de la réint...

Vu le pourvoi, enregistré le 27 février 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'article 3 de l'arrêt du 28 décembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, ne faisant que partiellement droit à son recours contre le jugement du 6 novembre 2001 du tribunal administratif de Dijon, a rejeté ses conclusions tendant à ce que soit remis à la charge de la SARL FB le supplément d'impôt sur les sociétés et de la contribution additionnelle ainsi que les pénalités correspondantes résultant de la réintégration dans son actif de l'exercice clos en 1995 d'une somme de 4 981 320 francs ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 8 octobre 2009, présentée pour la SARL FB ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Brice Bohuon, auditeur,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société FB,

- les conclusions de M. Julien Boucher, Rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société FB.

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, peintre et sculpteur, a créé le 2 janvier 1995, avec son épouse et ses deux enfants, la SARL FB qui a pour objet le négoce de ses oeuvres et la gestion de ses droits de propriété artistique ; que le capital de la société d'un montant de 1 233 000 francs a été divisé en 2 466 parts d'une valeur unitaire de 500 francs ; que le même jour a été effectuée une donation-partage consentie par les époux A au profit de chacun de leurs enfants et portant notamment sur la nue-propriété de 300 parts de la SARL FB, chacune d'elle étant alors valorisée à 2 520 francs ; que cette différence de valorisation des parts de la SARL FB trouve son origine dans le transfert à la SARL FB, à titre gratuit, d'oeuvres réalisées par M. A ; qu'à l'issue d'une vérification de la comptabilité de la SARL, l'administration fiscale a opéré un redressement du résultat de l'exercice clos en 1995 égal à la différence de valorisation des parts dans l'acte de donation et la constitution de la SARL, soit la somme de 4 981 320 francs ;

Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : (...) 2. le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) / 3. Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient (...) ; que, pour l'application de ces dispositions au cas d'acquisition d'un élément de stock à titre gratuit, l'évaluation de cet élément doit être faite à sa valeur vénale à la date de l'acquisition ;

Considérant que la cour administrative d'appel a estimé, par une appréciation souveraine des faits, que les oeuvres de l'artiste qui ne figuraient pas sur la liste des apports établie par le commissaire aux apports étaient entrées dans les stocks de la société à titre gratuit ; qu'en cas d'acquisition du stock à titre gratuit, le prix de revient ne peut s'entendre que de la valeur vénale des biens à la date de l'acquisition ; qu'en jugeant que la SARL FB devait comptabiliser les oeuvres données par M. A pour une valeur nulle, la cour administrative d'appel de Lyon a commis une erreur de droit ; qu'ainsi, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à demander l'annulation de l'article 3 de l'arrêt attaqué ;

Considérant que dans les circonstances de l'espèce il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport du commissaire aux apports que les oeuvres d'art à l'origine du litige n'avaient pas fait l'objet d'un apport de M. A à la SARL FB ; que, par suite, la société ne peut utilement en tout état de cause demander le bénéfice du report d'imposition prévu par l'article 151 octies du code général des impôts ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit précédemment, que les oeuvres acquises à titre gratuit par la SARL FB et figurant dans ses stocks devaient être évaluées à leur valeur vénale ; que la différence de valeur des parts de la SARL FB, résultant des mentions respectives de l'acte de constitution de la société et de l'acte de donation-partage, était due à la prise en compte de la valeur de ces oeuvres ; qu'ainsi, l'administration a pu à bon droit regarder la somme de 4 981 320 francs comme représentant la valeur du stock des oeuvres détenu par la société et corriger de ce montant le bilan de clôture de l'exercice clos en 1995 ;

Considérant que si la société soutient avoir déclaré ses profits en prenant en compte un stock de valeur nulle et avoir en conséquence supporté une imposition excessive, elle n'a demandé aucune compensation au titre de l'exercice clos en 1995 ici en litige ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a déchargé la SARL FB de la taxation de cette somme à l'impôt sur les sociétés et à la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la SARL FB au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

----------------

Article 1er : L'article 3 de l'arrêt du 28 décembre 2006 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé ainsi que le jugement du 6 novembre 2001 du tribunal administratif de Dijon en tant qu'il a prononcé la décharge du supplément d'impôt sur les sociétés et de la contribution additionnelle résultant du redressement relatif à la valorisation du stock.

Article 2 : Le supplément d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés au titre de 1995 résultant du redressement relatif à la valorisation du stock des oeuvres d'art ainsi que les pénalités correspondantes sont remis à la charge de la SARL FB.

Article 3 : La demande de la SARL FB présentée devant le tribunal administratif de Dijon et ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE et à la SARL FB.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 302059
Date de la décision : 09/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-03-05 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. REVENUS ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - RÈGLES PARTICULIÈRES. BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX. ÉVALUATION DE L'ACTIF. STOCKS. - ACQUISITION À TITRE GRATUIT - EVALUATION À LA VALEUR VÉNALE À LA DATE DE L'ACQUISITION [RJ1].

19-04-02-01-03-05 Pour l'application de l'article 38 du code général des impôts relatif à la définition du bénéfice net retenu pour base de l'impôt en matière de bénéfices industriels et commerciaux, en cas d'acquisition d'un élément de stock à titre gratuit, l'évaluation de cet élément doit être faite à sa valeur vénale à la date de l'acquisition.


Références :

[RJ1]

Rappr. Plénière, 19 octobre 1990, Montagne, n° 69047, T. pp. 715-732.


Publications
Proposition de citation : CE, 09 déc. 2009, n° 302059
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Yves Salesse
Rapporteur public ?: M. Boucher Julien
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:302059.20091209
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