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29/01/2010 | FRANCE | N°323427

France | France, Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 29 janvier 2010, 323427


Vu le pourvoi, enregistré le 19 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 28 novembre 2008 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a, à la demande M. et Mme Alain A, ordonné la suspension de l'exécution de la décision du 14 octobre 2008 du président du conseil général des Hauts-de-Seine leur retirant l'agrément en vue de l'ad

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Vu le pourvoi, enregistré le 19 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, représenté par le président du conseil général ; le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 28 novembre 2008 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a, à la demande M. et Mme Alain A, ordonné la suspension de l'exécution de la décision du 14 octobre 2008 du président du conseil général des Hauts-de-Seine leur retirant l'agrément en vue de l'adoption et fixant un délai de trente mois pour le dépôt d'une nouvelle demande d'agrément ;

2°) statuant en référé, de faire droit aux conclusions de son mémoire en défense présenté devant le juge des référés du tribunal administratif de Versailles, y compris la demande d'allocation d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme A le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Constance Rivière, Auditeur,

- les observations de la SCP Coutard, Mayer, Munier-Apaire, avocat du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE et de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. Alain A,

- les conclusions de M. Frédéric Lenica, rapporteur public,

- la parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Coutard, Mayer, Munier-Apaire, avocat du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE et à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. Alain A ;

Sur la fin de non-recevoir soulevée par M. et Mme A :

Considérant qu'eu égard aux caractéristiques de la procédure de référé, le président du conseil général a qualité pour former, au nom du département, un pourvoi contre une ordonnance de référé sans avoir à justifier d'une autorisation du conseil général ;

Sur le pourvoi du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 225-4 du code de l'action sociale et des familles : Avant de délivrer l'agrément, le président du conseil général doit s'assurer que les conditions d'accueil offertes par le demandeur sur les plans familial, éducatif et psychologique correspondent aux besoins et à l'intérêt de l'enfant adopté (...) ; qu'aux termes de l'article R. 225-7 du code de l'action sociale et des familles : Toute personne titulaire de l'agrément doit confirmer au président du conseil général de son département de résidence, chaque année et pendant la durée de validité de l'agrément, qu'elle maintient son projet d'adoption, en précisant si elle souhaite accueillir un pupille de l'Etat en vue d'adoption. / Lors de la confirmation prévue au premier alinéa, l'intéressé transmet au président du conseil général une déclaration sur l'honneur indiquant si sa situation matrimoniale ou la composition de sa famille se sont modifiées et précisant le cas échéant quelles ont été les modifications. / (...) En cas de modifications des conditions d'accueil constatées lors de la délivrance de l'agrément, notamment de la situation matrimoniale, ou en l'absence de déclaration sur l'honneur, le président du conseil général peut faire procéder à des investigations complémentaires sur les conditions d'accueil et, le cas échéant, retirer l'agrément. Lorsqu'il envisage de retirer l'agrément ou de le modifier, il saisit pour avis la commission prévue à l'article R. 225-9 ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 225-3 du même code : Au moment de la confirmation de sa demande, l'intéressé doit communiquer au président du conseil général : ... 3° Un certificat médical datant de moins de trois mois, établi par un médecin figurant sur une liste établie par le président du conseil général attestant que son état de santé, ainsi que celui des personnes résidant à son foyer, ne présente pas de contre-indication à l'accueil d'enfants en vue d'adoption ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que lors de la confirmation annuelle du projet d'adoption, les postulants sont tenus d'indiquer tous les éléments relatifs à leur situation familiale au jour de leur déclaration, notamment toute décision d'adoption, même non définitive, prononcée en leur faveur à l'étranger, ainsi que tout événement tel qu'une maladie grave susceptible d'affecter leur capacité d'accueil ;

Considérant que, pour faire droit à la demande de M. et Mme A tendant à ce que soit suspendue la décision du président du conseil général des Hauts-de-Seine du 14 octobre 2008 leur retirant l'agrément qu'il leur avait délivré en vue d'une adoption et fixant un délai de trente mois avant le dépôt d'une nouvelle demande d'adoption, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a estimé que l'urgence justifiait cette suspension et qu'était propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée le moyen tiré de ce que le président du conseil général aurait fait une inexacte application des dispositions de l'article R. 225-7 du code de l'action sociale et des familles en ne prenant pas en compte les circonstances ayant conduit à l'annulation de l'adoption par M. et Mme A de deux enfants russes, décidée par jugement du 8 août 2008 du tribunal de la région de Sverlovsk, ni la circonstance, invoquée par eux dans un courrier du 10 septembre 2008 adressé au président du conseil général, que M. A s'était totalement remis de l'accident cardio-vasculaire dont il avait été victime le 8 juillet 2008 ;

Considérant, toutefois, qu'en se fondant sur ces motifs pour estimer qu'il existait un doute sérieux sur la légalité de la décision de retrait, alors que le président du conseil général a retiré l'agrément au motif que M. et Mme A avaient fait, lors de la confirmation annuelle de leur projet d'adoption, le 12 juillet 2008, une fausse déclaration sur l'honneur en omettant de mentionner, alors qu'ils y étaient tenus en vertu de l'article R. 225-7 du code de l'action sociale et des familles, que le tribunal de la région de Sverdlovsk avait prononcé, le 11 juin 2008, l'adoption par eux de deux enfants russes, fait qu'ils n'avaient d'ailleurs pas signalé à l'Agence française pour l'adoption, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son ordonnance doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée ;

Considérant que, pour demander la suspension du retrait litigieux, M. et Mme A soutiennent que l'omission qui leur est reprochée est sans incidence sur la validité de l'agrément dont ils étaient titulaires et ne constitue pas une fausse déclaration, que la décision de retrait est, en réalité, fondée sur le fait que l'adoption des deux enfants russes n'a finalement pas eu lieu alors que cet échec ne leur est pas imputable, que la circonstance qu'ils aient réorienté immédiatement leur projet d'adoption vers des enfants lettons n'est pas, dans ces conditions, de nature à démontrer leur incapacité à adopter, que le président du conseil général n'a pas tenu compte de l'annulation, le 8 août 2008, du jugement d'adoption du 11 juin 2008 ni de ce que l'état de santé de M. A, dont il avait été tenu compte dans le jugement d'annulation, s'était amélioré, alors que les autorités départementales en avaient été informées, et que le retrait litigieux est entaché de détournement de pouvoir ; qu'en l'état de l'instruction, aucun de ces moyens n'est de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision de retrait ; que, par suite, les conclusions présentées par M. et Mme A devant le juge des référés du tribunal administratif de Versailles tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 14 octobre 2008 du président du conseil général des Hauts-de-Seine leur retirant l'agrément en vue de l'adoption et fixant un délai de trente mois pour le dépôt d'une nouvelle demande d'agrément doivent être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme réclamée par M. et Mme A, au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens, soit mise à la charge du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme A les sommes demandées par le DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE au même titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Versailles en date du 28 novembre 2008 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme A devant le juge des référés du tribunal administratif de Versailles est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi du DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. et Mme A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au DEPARTEMENT DES HAUTS-DE-SEINE et à M. et Mme Alain A.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 29 jan. 2010, n° 323427
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: Mme Constance Rivière
Rapporteur public ?: M. Lenica Frédéric
Avocat(s) : SCP COUTARD, MAYER, MUNIER-APAIRE ; SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Formation : 2ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 29/01/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 323427
Numéro NOR : CETATEXT000021785194 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-01-29;323427 ?
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