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29/01/2010 | FRANCE | N°324502

France | France, Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 29 janvier 2010, 324502


Vu la requête, enregistrée le 27 janvier 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Ali A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 27 novembre 2008 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du consul général de France à Alger refusant à sa nièce, Mlle Khadidja B, un visa d'entrée et de long séjour en France ;

2°) d'enjoindre au consul général de France à Alger de délivrer le visa sollicité, s

ous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat ...

Vu la requête, enregistrée le 27 janvier 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Ali A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 27 novembre 2008 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du consul général de France à Alger refusant à sa nièce, Mlle Khadidja B, un visa d'entrée et de long séjour en France ;

2°) d'enjoindre au consul général de France à Alger de délivrer le visa sollicité, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 600 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Stéphanie Gargoullaud, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Lenica, rapporteur public ;

Considérant que M. A, de nationalité française, conteste le rejet du recours qu'il a formé devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France à l'encontre de la décision implicite du consul général de France à Alger refusant la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en France à Mlle Khadidja B, de nationalité algérienne, née le 21 mai 1995, recueillie légalement par M. A en vertu d'un acte de kafala établi le 12 mai 2004, homologué par jugement du président du tribunal de Rouiba, rendu exécutoire par une ordonnance du tribunal de grande instance de Meaux du 18 octobre 2005 ; qu'il ressort des pièces du dossier que pour rejeter ce recours, la commission s'est fondée, sans que le préfet n'ait eu à se prononcer sur une demande de regroupement familial, sur le motif tiré de l'intérêt supérieur de l'enfant ;

Considérant que l'intérêt d'un enfant est, en principe, de vivre auprès de la personne qui, en vertu d'une décision de justice qui produit des effets juridiques en France, est titulaire à son égard de l'autorité parentale ; qu'ainsi, dans le cas où un visa d'entrée et de long séjour en France est sollicité en vue de permettre à un enfant de rejoindre un ressortissant français ou étranger qui a reçu délégation de l'autorité parentale dans les conditions qui viennent d'être indiquées, ce visa ne peut en règle générale, eu égard notamment aux stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant, être refusé pour un motif tiré de ce que l'intérêt de l'enfant serait au contraire de demeurer auprès de ses parents ou d'autres membres de sa famille ; qu'en revanche, et sous réserve de ne pas porter une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, l'autorité chargée de la délivrance des visas peut se fonder, pour rejeter la demande dont elle est saisie, non seulement sur l'atteinte à l'ordre public qui pourrait résulter de l'accès de l'enfant au territoire national, mais aussi sur le motif tiré de ce que les conditions d'accueil de celui-ci en France seraient, compte tenu notamment des ressources et des conditions de logement du titulaire de l'autorité parentale, contraires à son intérêt ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si l'enfant Khadidja B a toujours vécu en Algérie auprès de ses parents, M. A, qui justifie de ressources et de conditions d'accueil suffisantes, dispose d'une délégation d'autorité parentale, qui a d'ailleurs été rendue exécutoire en droit français, pour prendre toutes mesures de tutelle et de prise en charge de cette enfant ; qu'ainsi, en l'absence de circonstances particulières, en estimant que l'intérêt de l'enfant était de demeurer dans son pays d'origine auprès de ses parents, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; que, eu égard aux motifs de la présente décision, il y a lieu de faire droit aux conclusions de M. A et de prescrire au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de réexaminer, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, la demande de visa d'entrée et de long séjour de Mlle Khadidja B ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A de la somme de 600 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du 27 novembre 2008 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours de M. A contre la décision implicite du consul général de France à Alger refusant à sa nièce, Mlle Khadidja B, un visa d'entrée et de long séjour en France est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de réexaminer, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, la demande de visa d'entrée et de long séjour de Mlle Khadidja B.

Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 600 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Ali A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 29 jan. 2010, n° 324502
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: Mme Stéphanie Gargoullaud
Rapporteur public ?: M. Lenica Frédéric

Origine de la décision
Formation : 2ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 29/01/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 324502
Numéro NOR : CETATEXT000021764722 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-01-29;324502 ?
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