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19/02/2010 | FRANCE | N°336581

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 19 février 2010, 336581


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 12 février 2010, présentée pour M. Badrakh A, domicilié au ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 27 janvier 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de la décision du préfet de la Loire-Atlantique refusant de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et à ce qu'il soit enj

oint au préfet, sous astreinte, de lui délivrer cette autorisation et d'in...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 12 février 2010, présentée pour M. Badrakh A, domicilié au ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 27 janvier 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de la décision du préfet de la Loire-Atlantique refusant de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et à ce qu'il soit enjoint au préfet, sous astreinte, de lui délivrer cette autorisation et d'instruire sa demande d'asile en procédure ordinaire ;

2°) d'ordonner les mesures sollicitées en première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que l'ordonnance attaquée est entachée d'une insuffisance de motivation puisqu'elle ne se prononce par sur la condition d'urgence ; que le juge n'a pas statué sur les mesures d'injonction demandées ; que l'ordonnance attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de droit en ce que la seconde demande d'admission au séjour n'avait pas pour but de faire obstacle à la mesure d'éloignement, dès lors qu'il est démontré qu'il n'avait pas connaissance de l'arrêté de reconduite à la frontière du 27 novembre 2009 lorsqu'il a entamé les démarches ; que le retard dans le dépôt de sa première demande d'asile ne peut lui être imputé, dès lors qu'il est dû à des problèmes de traduction ; que l'absence de contestation de la décision du directeur général de l'OFPRA rejetant sa demande d'asile pour cause de tardiveté ne peut lui être reproché, dès lors qu'aucun texte ne lui impose de le faire ; qu'enfin, le préfet ne peut rejeter une nouvelle demande d'admission au séjour provoquée par un refus d'enregistrement de la demande d'asile à l'OFPRA ; qu'ainsi, il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à son droit d'asile ; qu'en outre, l'urgence est attestée, s'agissant du refus d'admettre provisoirement au séjour un demandeur d'asile ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 février 2010, présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que l'administration ne saurait avoir l'obligation de procéder à un nouvel examen d'une demande d'asile dans le cas où l'intéressé, mis à même de présenter sa demande, n'a pas exercé ce droit dans les délais requis ; qu'ainsi, le préfet était fondé à rejeter la nouvelle demande d'admission provisoire au séjour et à demander à l'OFPRA de statuer en procédure prioritaire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. A et, d'autre part, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 19 février 2009 à 14 heures 30 au cours de laquelle a été entendu Me Barthélemy, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. A, le ministre n'étant pas représenté ;

Considérant, d'une part, que l'article L. 521-2 du code de justice administrative permet au juge des référés, saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, d'ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une autorité administrative aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile se voit remettre un document provisoire de séjour lui permettant de déposer une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. L'office ne peut être saisi qu'après la remise de ce document au demandeur ; que, selon le premier alinéa de l'article R. 723-1 du même code : A compter de la remise de l'autorisation provisoire de séjour prévue à l'article L. 742-1, l'étranger demandeur d'asile dispose d'un délai de vingt et un jours pour présenter sa demande d'asile complète à l'office ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

Considérant que, lorsqu'il rejette une demande présentée en application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative en l'absence d'atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, le juge des référés n'est pas tenu de se prononcer sur la condition d'urgence à laquelle est en outre subordonné le prononcé d'une mesure en application de ce texte ; que ce juge ne commet pas davantage d'irrégularité lorsque, rejetant pour un tel motif une requête présentée sur ce fondement, il ne se prononce par expressément sur le rejet de chacune des conclusions à fin d'injonction qui lui étaient soumises ; que, par suite, les moyens tirés de ce que l'ordonnance attaquée a été irrégulièrement rendue doivent être écartés ;

Au fond :

Considérant que, si le droit de solliciter le statut de réfugié implique que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de cette qualité de réfugié soit en principe autorisé à demeurer sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande, il appartient à l'intéressé de formuler celle-ci dans les conditions prévues par la législation et la réglementation en vigueur ; qu'au nombre de ces conditions figure l'exigence de saisir l'Office français de protection des réfugiés et apatrides d'un dossier complet dans un délai de vingt et un jours à compter de la délivrance de l'autorisation provisoire de séjour ; que ce délai, de caractère impératif, a été fixé dans le souci d'assurer un examen rapide des demandes d'asile ; qu'il en résulte qu'à la suite du rejet d'une telle demande, présentée après l'expiration de ce délai, l'intéressé n'est pas en droit de se voir délivrer une nouvelle autorisation provisoire de séjour et qu'un refus peut lui être opposé indépendamment des cas énumérés à l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, s'il a en toute hypothèse la possibilité de délivrer une nouvelle autorisation provisoire de séjour à un demandeur d'asile, le préfet ne porte pas une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile en refusant, quand bien même la demande n'a pas le caractère d'une demande dilatoire ou abusive, de délivrer une nouvelle autorisation provisoire de séjour au demandeur d'asile dont l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté la demande au motif qu'elle avait été présentée au-delà du délai de vingt et un jours ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Badrakh A, ressortissant chinois - ou mongol selon ses dires - , qui déclare être entré sur le territoire au cours du troisième trimestre 2009, a présenté une demande d'asile auprès de la préfecture de la Loire-Atlantique ; qu'une autorisation provisoire de séjour lui a été délivrée le 29 septembre 2009 par le préfet de ce département, afin qu'il puisse présenter une telle demande ; qu'il n'a toutefois déposé son dossier à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que le 3 novembre 2009, soit après l'expiration du délai de vingt et un jours dont il disposait ; que sa demande a été rejetée pour ce motif le 4 novembre suivant ;

Considérant que, quelles que soient la nature et l'origine des motifs qui n'ont pas permis à M. A d'accomplir les démarches qui lui incombaient dans les délais impartis, et alors même qu'en présentant une nouvelle demande d'admission au séjour, il n'aurait pas eu l'intention de se soustraire à la mesure d'éloignement prise à son encontre, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en rejetant cette nouvelle demande le 19 janvier 2010, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ; que sa requête, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit, par suite, être rejetée.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. Badrakh A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Badrakh A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 336581
Date de la décision : 19/02/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 19 fév. 2010, n° 336581
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Jacques Arrighi de Casanova
Avocat(s) : SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:336581.20100219
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