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03/03/2010 | FRANCE | N°322372

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 03 mars 2010, 322372


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 novembre 2008 et 12 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST, anciennement dénommée Spie Batignolles Ouest et venant aux droit de la société Spie Citra Ouest, dont le siège social est sis 13, rue Paulin Talabot, BP 74789, à Toulouse cedex 01 (31047), représentée par son représentant légal en exercice ; la SOCIETE SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 11 septembre 2008 par leq

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Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 novembre 2008 et 12 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST, anciennement dénommée Spie Batignolles Ouest et venant aux droit de la société Spie Citra Ouest, dont le siège social est sis 13, rue Paulin Talabot, BP 74789, à Toulouse cedex 01 (31047), représentée par son représentant légal en exercice ; la SOCIETE SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 11 septembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 13 juin 2006 du tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il l'a solidairement condamnée à réparer le préjudice résultant des désordres survenus dans le bâtiment du tribunal de grande instance de Bordeaux, pour un montant de 4 548 303,68 euros, et à supporter les frais d'expertise s'élevant à 283 423,96 euros ;

2°) de mettre la somme de 8 000 euros à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 16 février 2010, présentée pour la SOCIETE SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir, Auditeur,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIETE SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST, de Me Carbonnier, avocat de la société RFR et de Me Odent, avocat de la société Socotec et de la société SMABTP,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIETE SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST, à Me Carbonnier, avocat de la société RFR et à Me Odent, avocat de la société Socotec et de la société SMABTP ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un marché notifié le 8 septembre 1995, l'Etat a confié la construction de l'îlot judiciaire de Bordeaux, comprenant le bâtiment du tribunal de grande instance de Bordeaux, à un groupement d'entreprises ayant pour mandataire la société Spie Citra Midi Atlantique, aux droits de laquelle est venue la société Spie Citra Ouest, dénommée Spie Batignolles Ouest puis SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST ; que la réception de ce bâtiment, intervenue le 17 juin 1998, a été assortie notamment d'une réserve relative à la stabilité de la façade en vitrage extérieur attaché et à la solidité des raidisseurs en verre ; que la levée de cette réserve n'est pas intervenue dans le délai prévu de trois mois après la réception ; que le maître d'ouvrage a, par un courrier du 28 mai 1999, expressément prolongé le délai de garantie ainsi que la liste des réserves associées à la réception ; qu'après avoir, à plusieurs reprises, mis la société Spie Citra Ouest en demeure de prendre les mesures conservatoires nécessaires pour assurer la stabilité de la façade et la sécurité des personnes et d'exécuter les travaux pour remédier aux désordres affectant la façade, il a confié à un autre groupement d'entreprises, par un marché du 6 juin 2002, la réparation de la façade défectueuse ; qu'il a prononcé la réception sans réserve de l'ouvrage, objet de ce nouveau marché, le 22 octobre 2003 ; que le tribunal administratif de Bordeaux a, par un jugement du 13 juin 2006, condamné solidairement les sociétés Richard Rogers et Patnership, Socotec, Spie Batignolles Ouest et Somib à verser à l'Etat la somme de 4 548 303,68 euros au titre des dommages ayant affecté la façade du bâtiment et à supporter les frais de l'expertise ; que, par un arrêt du 11 septembre 2008 contre lequel la SOCIETE SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel de la société Spie Batignolles Ouest ;

Considérant, en premier lieu, qu'en jugeant qu'aucune disposition du cahier des clauses administratives générales relatif aux marchés publics de travaux (CCAG) et du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) ne s'opposait à ce que le maître d'ouvrage lance un nouveau marché pour procéder à la réparation de la façade défectueuse, sans résilier le premier marché ni prononcer sa mise en régie, la cour a implicitement mais nécessairement répondu au moyen soulevé devant elle et tiré de ce que le nouveau marché entraînerait la résiliation tacite du marché initial en ce qui concerne le lot n°12 ; que, si elle n'a pas explicitement répondu au moyen tiré de ce que l'action de l'Etat ne pouvait être engagée sur le terrain contractuel en raison de la réception de l'ouvrage prononcée le 17 juin 1998, elle n'a pas, ce faisant, entaché son arrêt d'irrégularité, dès lors qu'en raison des réserves dont la réception avait été assortie, faisant obstacle à ce qu'elle puisse être regardée comme ayant mis fin aux relations contractuelles, ce moyen était inopérant ;

Considérant, en deuxième lieu, que la cour a souverainement apprécié l'objet du litige comme se rattachant à la réparation des malfaçons des ouvrages, laquelle relevait des stipulations de l'article 41 du CCAG ; que, par suite, en jugeant que l'Etat, en recourant à la passation d'un nouveau marché pour réparer les désordres qui affectaient la façade, n'avait pas usé des stipulations de l'article 49 du CCAG, qui régissent les relations avec l'entrepreneur lorsque ce dernier ne se conforme pas, en cours d'exécution des travaux, aux dispositions du marché ou aux ordres de service, et en en déduisant, d'une part, que la passation du nouveau marché ne valait pas résiliation du premier marché, ou mise en régie, au sens de cet article 49, d'autre part, que la circonstance qu'il n'avait pas respecté les formalités prévues à ce même article ne faisait pas obstacle à ce qu'il recherche la responsabilité des premiers constructeurs, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier et ni commis d'erreur de droit ;

Considérant, en troisième lieu, que, si la société requérante soutient que la cour a commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier en refusant de tirer les conséquences de la renonciation de l'Etat à obtenir la levée des réserves, qui résulterait d'une lettre du 19 avril 2001 du maître d'ouvrage, ces moyens ne peuvent qu'être écartés, l'existence d'une telle renonciation de l'Etat n'ayant pas été invoquée devant les juges du fond ;

Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la réception sans réserve intervenue le 22 octobre 2003 est relative au second marché ayant pour objet la réparation de la façade affectée par les désordres, qui n'a pas été conclu avec la requérante ; que, dès lors, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en refusant de regarder cette réception comme mettant fin aux relations contractuelles nées du premier marché ;

Considérant qu'il résulte tout de ce qui précède que le pourvoi de la SOCIETE SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST doit être rejeté, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement, d'une part, par les sociétés SMABTP et Socotec, d'autre part, par la société RFR, et de mettre à la charge de la SOCIETE SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST respectivement les sommes de 4 000 euros et 3 000 euros, au titre des frais exposées par elles et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la SOCIETE SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST est rejeté.

Article 2 : La SOCIETE SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST versera les sommes de 4 000 euros et 3 000 euros, respectivement aux sociétés SMABTP et Socotec, et à la société RFR, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE SPIE BATIGNOLLES SUD OUEST, à la ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertes, aux sociétés SMABTP, RFR, Socotec, et RFR.

Copie en sera dressée aux sociétés Somib, Bluntzer, Richard Rogers et Partnership, et à la SCP Silvestri Baujet es qualités de mandataire liquidateur de la société La Taillerie anciennement société Missègue.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 322372
Date de la décision : 03/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 03 mar. 2010, n° 322372
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: Mme Cécile Chaduteau-Monplaisir
Rapporteur public ?: M. Boulouis Nicolas
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET ; CARBONNIER ; ODENT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:322372.20100303
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