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16/03/2010 | FRANCE | N°312890

France | France, Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 16 mars 2010, 312890


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 février et 21 février 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Michel A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 novembre 2004 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre mer et des collectivités territoriales a refusé de lui accorder une allocation temporaire d'invalidité et à ce qu'il soit en

joint audit ministre de lui verser ladite allocation augmentée des inté...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 février et 21 février 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Michel A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 novembre 2004 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre mer et des collectivités territoriales a refusé de lui accorder une allocation temporaire d'invalidité et à ce qu'il soit enjoint audit ministre de lui verser ladite allocation augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2002 ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler la décision du 19 novembre 2004 et d'enjoindre au ministre de prendre une nouvelle décision tendant à ce qu'il bénéficie de cette allocation à compter du 14 décembre 2002, date du jour de sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme représentative de l'allocation temporaire d'invalidité à compter du jour de sa demande avec intérêts au taux légal ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale et notamment son article L. 461-1 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu le décret n° 60-1089 du 6 octobre 1960 portant règlement d'administration publique pour l'application des dispositions de l'article 23 bis de l'ordonnance n° 59-244 du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires ;

Vu le décret n° 2003-924 du 25 septembre 2003 révisant et complétant les tableaux des maladies professionnelles annexés au livre IV du code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Florian Blazy, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Blanc, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Blanc, avocat de M. A ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les parties aient été préalablement averties que le jugement attaqué, adopté à l'issue d'une audience publique du 17 décembre 2007, serait lu le jour même ; que dans ces conditions, les parties ne peuvent être regardées comme ayant été mises à même d'exercer leur droit de présenter une note en délibéré ; que ce jugement a dès lors été rendu à l'issue d'une procédure irrégulière ; que M. A est par suite fondé à en demander l'annulation ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Sur la légalité externe de la décision attaquée :

Considérant que la décision attaquée du 19 novembre 2004 a été signée par Mme Françoise Fornasari, attachée d'administration centrale, en fonction au bureau des pensions et allocations d'invalidité du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ; que l'intéressée a reçu délégation à cet effet par arrêté de ce ministre en date du 10 novembre 2004 portant délégation de signature et publié au Journal officiel du 17 novembre 2004 ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée doit être écarté ;

Sur la légalité interne :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 65 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : Le fonctionnaire qui a été atteint d'une invalidité résultant d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'au moins 10 p. 100 ou d'une maladie professionnelle peut prétendre à une allocation temporaire d'invalidité cumulable avec son traitement (...) Les conditions d'attribution ainsi que les modalités de concession, de liquidation, de paiement et de révision de l'allocation temporaire d'invalidité sont fixées par un décret en Conseil d'Etat qui détermine également les maladies d'origine professionnelle ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 6 octobre 1960 portant règlement d'administration publique pour l'application des dispositions de l'article 23 bis de l'ordonnance du 4 février 1959 relative au statut général des fonctionnaires, dans sa rédaction issue du décret du 29 août 2000 : L'allocation temporaire d'invalidité prévue à l'article 65 de la loi du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat est attribuée aux agents maintenus en activité qui justifient d'une infirmité permanente résultant : (...) ; b) Soit de l'une des maladies d'origine professionnelle énumérées dans les tableaux mentionnés à l'article L. 461-2 du code de la sécurité sociale ; c) Soit d'une maladie reconnue d'origine professionnelle dans les conditions prévues au troisième et quatrième alinéas de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ( ...) Dans les cas mentionnés au b et au c du présent article, les agents concernés ne peuvent bénéficier de l'allocation que dans la mesure où l'affection contractée serait susceptible, s'ils relevaient du régime général de sécurité sociale, de leur ouvrir droit à une rente en application du livre IV du code de la sécurité sociale et de ses textes d'application (...) ; qu'aux termes des deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale : Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. / Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime. / Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente (...) au moins égal à un pourcentage déterminé ; que l'article R. 461-8 du même code dispose : Le taux d'incapacité mentionné au quatrième alinéa de l'article L. 461-1 est fixé à 25 % ;

Considérant, d'autre part, qu'en vertu du tableau n° 42 des maladies d'origine professionnelle, figurant en annexe au livre IV du code de la sécurité sociale, relatif à l'atteinte auditive provoquée par les bruits lésionnels : (...) Le diagnostic de cette hypoacousie est établi : - par une audiométrie tonale liminaire et une audiométrie vocale qui doivent être concordantes (...) Cette audiométrie diagnostique est réalisée après une cessation d'exposition au bruit lésionnel d'au moins 3 jours et doit faire apparaître sur la meilleure oreille un déficit d'au moins 35 dB (...). Aucune aggravation de cette surdité professionnelle ne peut être prise en compte, sauf en cas de nouvelle exposition au bruit lésionnel ; que ce tableau subordonne également la reconnaissance de cette maladie professionnelle à un délai de prise en charge d'un an ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des pièces du dossier et notamment des certificats établis les 11 mars 1998 et 3 juillet 1998, respectivement par les Dr Dillenschneider et Roos, soit dans le délai d'un an après la cessation des fonctions de pilote d'hélicoptère de M. A, intervenue le 24 août 1997, que la déficience auditive dont il est atteint ne répond pas aux caractéristiques de la maladie décrites dans le tableau n° 42, à savoir l'existence d'un déficit auditif moyen minimum de 35 décibels ; que le certificat établi par le Dr Mouyal le 1er décembre 2003, soit plus de six ans après la cessation de fonctions de l'intéressé, ne peut, en application des dispositions réglementaires précitées, être pris en compte ; que ces circonstances font, par suite, obstacle à ce que la maladie de M. A puisse être reconnue d'origine professionnelle en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ;

Considérant, en deuxième lieu, que dès lors que les conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux, mentionnées à ce deuxième alinéa, sont bien remplies, l'intéressé ne peut utilement rechercher l'imputabilité au service de son infirmité sur le fondement des dispositions du troisième alinéa de ce même article ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des pièces du dossier que le taux d'incapacité permanente de l'intéressé ne s'élevait qu'à respectivement 11 et 3 % pour la surdité et pour les acouphènes ; que M. A ne peut donc davantage invoquer le bénéfice des dispositions du quatrième alinéa du même article ; qu'ainsi, ses conclusions présentées à fin d'annulation de la décision du 19 novembre 2004 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de lui accorder le bénéfice d'une allocation temporaire d'invalidité, doivent être rejetées ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que la présente décision n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. A ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente affaire, la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 17 décembre 2007 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Strasbourg et ses conclusions présentées devant le Conseil d'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Michel A, au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.


Synthèse
Formation : 9ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 312890
Date de la décision : 16/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 16 mar. 2010, n° 312890
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Jouguelet
Rapporteur ?: M. Florian Blazy
Rapporteur public ?: Mme Legras Claire
Avocat(s) : BLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:312890.20100316
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