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17/03/2010 | FRANCE | N°307604

France | France, Conseil d'État, 3ème sous-section jugeant seule, 17 mars 2010, 307604


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 juillet 2007 et 13 mars 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Aïda A veuve B, demeurant ... ; Mme A veuve B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 1er juin 2007 par lequel la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence a confirmé le jugement du 9 mars 2006 par lequel le tribunal départemental des pensions des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de pension de veuve au titre des articles L. 197 et suivants du code des pensions militaires d'invalidité e

t des victimes de la guerre ;

2°) réglant l'affaire au fond, de fa...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 juillet 2007 et 13 mars 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Aïda A veuve B, demeurant ... ; Mme A veuve B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 1er juin 2007 par lequel la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence a confirmé le jugement du 9 mars 2006 par lequel le tribunal départemental des pensions des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de pension de veuve au titre des articles L. 197 et suivants du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de la SCP Waquet-Farge-Hazan, la somme de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 ;

Vu le décret n° 59-327 du 20 février 1959 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Xavier Domino, Auditeur,

- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme A veuve B,

- les conclusions de M. Edouard Geffray, Rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme A veuve B ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A, veuve de M. C, ce dernier, bénéficiaire d'une pension de victime civile de la guerre 1939-1945 concédée au taux de 65 % étant décédé le 13 mars 1990, se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 1er juin 2007 par lequel la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence, confirmant le jugement du tribunal départemental des pensions des Bouches-du-Rhône du 9 mars 2006, a rejeté sa requête tendant à l'obtention d'une pension de veuve de victime civile de la guerre ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 197 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, les bénéficiaires des pensions de victimes civiles de la guerre 1939-1945 sont : 1º Les Français ou ressortissants français qui, par suite d'un fait de guerre survenu sur le territoire français entre le 2 septembre 1939 et l'expiration d'un délai d'un an à compter du décret fixant la date légale de la cessation des hostilités, ont reçu une blessure, subi un accident ou contracté une maladie ayant entraîné une infirmité ; / 2º Les Français ou ressortissants français qui, par suite d'un fait de guerre survenu à l'étranger, dans la période susvisée, ont reçu une blessure, subi un accident ou contracté une maladie ayant entraîné une infirmité, dans le cas où ils ne seraient pas couverts par les accords de réciprocité. ; que selon l'article L. 209 de ce même code, applicable aux victimes civiles de la guerre, dans sa rédaction applicable à la date du décès de M. D : En cas de décès de la victime, ses ayants droit peuvent, dans les mêmes conditions que les ayants droit des militaires, se prévaloir des dispositions du livre Ier y compris celles prévues par le 2° de l'article L. 43 en faveur des veuves des invalides à 85 % et au-dessus ; qu'aux termes de l'article L. 43 de ce code, dans sa rédaction applicable à la même date : Ont droit à pension : ... 2° Les conjoints survivants des militaires et marins dont la mort a été causée par des maladies contractées ou aggravées par suite de fatigues, dangers ou accidents survenus par le fait ou à l'occasion du service, ainsi que les conjoints survivants de militaires et marins morts en jouissance d'une pension définitive ou temporaire correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 85 % ou en possession de droits à cette pension, 3° ... les veuves de militaires et marins morts en jouissance d'une pension définitive ou temporaire correspondant à une invalidité égale ou supérieure à 60 % ou en possession de droits à cette pension... ;

Considérant que la pension accordée, en application des dispositions combinées des articles L. 209 et L. 43 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, aux ayants droit d'une personne bénéficiaire d'une pension de victime civile de la guerre a pour objet de compenser les souffrances partagées avec cette victime et le préjudice économique lié à la disparition de celle-ci ; qu'eu égard à la lettre et à l'objet de ces textes, la détention de la nationalité française ne saurait être une condition nécessaire à l'octroi d'une telle pension ; que, dès lors, en se fondant sur la nationalité tunisienne de Mme A veuve B pour lui refuser le bénéfice d'une pension de veuve de victime civile de la guerre, la cour a commis une erreur de droit ; que par suite, cette dernière est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les ayants droit des victimes civiles de la guerre pensionnées au titre de l'article L. 197 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre peuvent, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 209 et L. 43 de ce même code, bénéficier d'une pension, quelle que soit leur nationalité ; qu'ainsi, le service des ressortissants résidant à l'étranger de Château-Chinon n'a pu, sans méconnaître les dispositions précitées, refuser l'attribution d'une pension de veuve à Mme A veuve B au seul motif que l'intéressée n'avait à la date du décès de son époux, survenu postérieurement au 20 mars 1956, date d'accession à l'indépendance de son pays, ni la qualité de Français, ni celle de ressortissant français exigée, à défaut de la nationalité française, par l'article L. 197 du code précité ;

Considérant toutefois qu'il résulte des dispositions citées ci-dessus des articles L. 209 et L. 43 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre que la réversion d'une pension de victime civile est subordonnée à la condition que l'invalidité du défunt ait été au moins égale au taux de 85 % ; que si cette condition n'est pas remplie, les veuves de victimes civiles en possession d'un droit à pension au moins égal à 60 % peuvent se voir ouvrir un droit à pension si elles apportent la preuve que le décès a eu pour cause directe et déterminante l'infirmité pensionnée ; qu'enfin les dispositions du IV de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 aux termes desquelles les prestations servies en application des textes visés au I [du même article] peuvent faire l'objet, à compter du 1er janvier 2002 et sur demande, d'une réversion... n'ont ni pour objet ni pour effet de modifier les conditions ainsi posées par les textes précités à la réversion d'une pension d'une victime civile de la guerre ; que M. D s'était vu reconnaître une pension de victime civile de guerre au taux de 65 % ; qu'il n'est pas établi ni même allégué que son décès serait la conséquence de l'infirmité dont il souffrait ; que, par suite, Mme A veuve B n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal départemental des pensions des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande dirigée contre le refus de lui attribuer une pension de veuve ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme que demande, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la SCP Waquet, Farge, Hazan défenseur de Mme A veuve B ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence du 1er juin 2007 est annulé.

Article 2 : L'appel de Mme Aïda A veuve B devant la cour régionale des pensions d'Aix-en-Provence ainsi que ses conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Aïda A veuve B et au ministre de la défense.


Synthèse
Formation : 3ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 307604
Date de la décision : 17/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 17 mar. 2010, n° 307604
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Ménéménis
Rapporteur ?: M. Xavier Domino
Rapporteur public ?: M. Geffray Edouard
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:307604.20100317
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