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17/03/2010 | FRANCE | N°328219

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 17 mars 2010, 328219


Vu la requête, enregistrée le 25 mai 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la CONFEDERATION INTERSYNDICALE DE DEFENSE ET D'UNION NATIONALE D'ACTION DES TRAVAILLEURS INDEPENDANTS (CIDUNATI), dont le siège est 15, place Carnot à Rosny Sous Bois (93110), représentée par son président ; la confédération demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir les articles 4 et 6 du décret n° 2008-1275 du 5 décembre 2008 relatif à l'élection aux chambres de métiers d'Alsace et de la Moselle ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Co

nstitution, notamment son préambule et son article 55 ;

Vu la convention europ...

Vu la requête, enregistrée le 25 mai 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la CONFEDERATION INTERSYNDICALE DE DEFENSE ET D'UNION NATIONALE D'ACTION DES TRAVAILLEURS INDEPENDANTS (CIDUNATI), dont le siège est 15, place Carnot à Rosny Sous Bois (93110), représentée par son président ; la confédération demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir les articles 4 et 6 du décret n° 2008-1275 du 5 décembre 2008 relatif à l'élection aux chambres de métiers d'Alsace et de la Moselle ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son préambule et son article 55 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu la convention internationale du travail n° 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical ;

Vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

Vu la loi du 1er juin 1924 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Cytermann, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

Sur l'article 4 du décret attaqué :

Considérant que, si l'article 103 b du code professionnel local maintenu en vigueur par la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, dans sa rédaction issue de l'article 4 du décret attaqué, prévoit que sont éligibles aux chambres des métiers de ces départements les chefs d'entreprise individuelle qui sont proposés par leurs corporations , il dispose en outre que Lorsque, dans la circonscription concernée, un ou plusieurs métiers relevant de l'artisanat ne sont pas organisés en corporation, le préfet du département du siège de la chambre de métiers assimile à une corporation au sens du présent article d'autres organisations professionnelles constituées en vue de défendre les intérêts d'un même métier ou de métiers d'une même branche d'activité et justifiant l'immatriculation des trois quarts de leurs membres au moins au registre des entreprises ;

Considérant, en premier lieu, qu'en remplaçant les dispositions antérieures reposant sur la désignation par les corporations des membres des chambres des métiers, par un nouveau régime fondé sur l'élection par l'ensemble des artisans de candidats présentés par leurs corporations, le décret attaqué n'a pas, eu égard à la mission légale de représentation des artisans d'un même métier confiée à celles-ci, et à leurs règles de fonctionnement fondées sur l'élection de leurs instances dirigeantes, méconnu les principes d'égalité devant le suffrage et de liberté de vote ; que, pour les professions non organisées en corporations, compte tenu de l'objectif de représentativité des candidats poursuivi par le décret, celui-ci a pu légalement prévoir que la présentation des candidatures relèverait d'organisations professionnelles constituées en vue de défendre les intérêts d'un même métier ou de métiers d'une même branche d'activité et justifiant de l'immatriculation d'au moins les trois quarts de leurs membres au registre des entreprises ;

Considérant, en deuxième lieu, que les stipulations de l'article 25 du pacte international relatif aux droits civils et politiques, relatives à la liberté d'expression et au droit de tout citoyen de prendre part à la direction des affaires publiques ainsi que de voter et d'être élu, ainsi que celles de l'article 3 du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, selon lequel les Etats s'engagent à organiser des élections libres, ne s'appliquent pas à des élections à caractère administratif telles que les élections aux chambres de métiers ; que les moyens tirés de ce que les dispositions de l'article 4 du décret attaqué seraient contraires à ces conventions sont donc inopérants ;

Considérant, en troisième lieu, que la déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 ne fait pas partie des textes diplomatiques ratifiés par la France dans les conditions fixées à l'article 55 de la Constitution ; qu'ainsi, la confédération requérante ne saurait utilement invoquer cette déclaration pour contester la légalité du décret attaqué ;

Considérant, en quatrième lieu, que les dispositions de l'article 4 du décret attaqué n'ont ni pour objet ni pour effet d'imposer à des artisans d'adhérer à une corporation ; que, pour les professions non organisées en corporations, les artisans concernés sont libres de former des organisations professionnelles remplissant les conditions définies au même article ; que par suite, le moyen tiré de ce que ces dispositions seraient contraires aux stipulations de l'article 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives à la liberté d'association n'est pas fondé ;

Considérant, en cinquième lieu, que la convention internationale du travail n° 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical a pour objet la défense de la liberté syndicale des salariés, qui n'est pas en cause dans le décret attaqué ; que le moyen tiré de ce que cette convention aurait été méconnue est inopérant ;

Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Sur l'article 6 du décret attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article 103 c 2 du code professionnel local, dans sa rédaction issue de l'article 6 du décret attaqué : I. - A l'occasion du renouvellement des chambres de métiers d'Alsace et de la Moselle, le préfet du département du siège de la chambre de métiers arrête la répartition des sièges au sein de chacune des chambres en se fondant, pour chacune d'elles, sur le nombre d'entreprises immatriculées au registre des entreprises au plus tard le 1er juillet précédant le renouvellement. / Sur cette base, la répartition des sièges respecte les critères cumulatifs suivants : / 1° Chaque chambre comporte un nombre de sièges proportionnel au nombre des entreprises immatriculées au registre des entreprises relevant des trois branches de l'artisanat, à savoir l'alimentation, le bâtiment et les autres métiers et services. La répartition s'effectue selon la règle du plus fort reste ; / 2° Chaque chambre comporte un nombre de sièges proportionnel au nombre des entreprises immatriculées au registre des entreprises par arrondissement. La répartition s'effectue selon la règle du plus fort reste. Il est cependant attribué à chaque arrondissement au moins un siège de membre titulaire et un siège de membre suppléant. / Pour l'application du précédent alinéa : / 1° Les arrondissements de Metz, Metz-Campagne, Boulay-Moselle et de Château-Salins sont considérés comme un seul arrondissement ; / 2° Strasbourg-Ville et Strasbourg-Campagne sont considérés comme deux arrondissements distincts ; / 3° Chaque chambre comporte au moins deux tiers de sièges occupés par des membres ayant qualité pour former des apprentis. ;

Considérant qu'aucun texte ni aucun principe n'interdisait au décret de prévoir, afin de tenir compte des spécificités locales, de répartir les sièges au sein des chambres de métiers d'Alsace et de Moselle en tenant compte de trois branches d'activité et non de quatre comme il est prévu pour les chambres de métiers des autres départements ; qu'une telle répartition en trois branches d'activité n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, enfin, que la confédération requérante n'apporte, à l'appui de son allégation selon laquelle le découpage du département de la Moselle serait entaché d'erreur manifeste, aucun élément permettant d'en apprécier le bien fondé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que CONFEDERATION INTERSYNDICALE DE DEFENSE ET D'UNION NATIONALE D'ACTION DES TRAVAILLEURS INDEPENDANTS (CIDUNATI) n'est pas fondée à demander l'annulation du décret attaqué ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la CONFEDERATION INTERSYNDICALE DE DEFENSE ET D'UNION NATIONALE D'ACTION DES TRAVAILLEURS INDEPENDANTS est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la CONFEDERATION INTERSYNDICALE DE DEFENSE ET D'UNION NATIONALE D'ACTION DES TRAVAILLEURS INDEPENDANTS, au Premier ministre et au ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 328219
Date de la décision : 17/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 17 mar. 2010, n° 328219
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Laurent Cytermann
Rapporteur public ?: M. Dacosta Bertrand

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:328219.20100317
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