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24/03/2010 | FRANCE | N°300852

France | France, Conseil d'État, 10ème sous-section jugeant seule, 24 mars 2010, 300852


Vu l'ordonnance du 17 janvier 2007, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 22 janvier 2007, par laquelle le président du tribunal administratif d'Amiens a transmis au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête par laquelle la COMMUNE DE QUINCY-BASSE et autres demandent d'annuler l'arrêté du 20 juin 2006, pris conjointement par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer et le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, déclara

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Vu l'ordonnance du 17 janvier 2007, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 22 janvier 2007, par laquelle le président du tribunal administratif d'Amiens a transmis au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête par laquelle la COMMUNE DE QUINCY-BASSE et autres demandent d'annuler l'arrêté du 20 juin 2006, pris conjointement par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer et le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, déclarant d'utilité publique la création de lignes aériennes à haute tension entre les postes de Beautor et du Long Champs ;

Vu la requête, enregistrée le 16 décembre 2006 sous le n° 06032081 et le 12 mars 2007 sous le n° 0700713 au greffe du tribunal administratif d'Amiens, présentée pour la COMMUNE DE QUINCY-BASSE, représentée par son maire, l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE DE LANDRICOURT-COURSON COURVAL-QUINCY-BASSE, dont le siège est 17, rue Raoul Rousseaux à Landricourt (02380), l'ASSOCIATION AISNE ENVIRONNEMENT, dont le siège est 40, rue Pasteur à Chauny (02300), l'ASSOCIATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DE GIBIER D'EAU DE L'AISNE, dont le siège est Mairie de Saint-Simon à Saint-Simon (02640) et l'ASSOCIATION UNE FORET ET DES HOMMES , dont le siège est 5, rue Montevidéo à Saint-Gobain (02410) ; la COMMUNE DE QUINCY-BASSE et autres demandent au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêté du 20 juin 2006, pris conjointement par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer et le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, déclarant d'utilité publique la création de lignes aériennes à haute tension entre les postes de Beautor et du Long Champs, et le refus de ses auteurs de retirer l'arrêté litigieux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi n° 46-628 du 8 avril 1946, notamment son article 35 ;

Vu le décret n° 70-492 du 11 juin 1970 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yves Salesse, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Coutard, Mayer, Munier-Apaire, avocat de la société RTE-EDF transport,

- les conclusions de M. Julien Boucher, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Coutard, Mayer, Munier-Apaire, avocat de la société RTE-EDF transport.

Considérant que la COMMUNE DE QUINCY-BASSE et autres demandent l'annulation de l'arrêté du 20 juin 2006 déclarant d'utilité publique la création de lignes aériennes à haute tension entre les postes de Beautor et du Long et le refus du ministre des transports, de l'équipement et de la mer, et du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de retirer cet arrêté ;

En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté attaqué :

Sur le moyen tiré de l'incompétence des signataires de l'acte :

Considérant qu'il résulte des dispositions du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement que le directeur de la demande et des marchés énergétiques au ministère de l'industrie, dont l'acte de nomination a été publié au Journal officiel de la République française le 3 août 2005, avait de ce fait qualité pour signer l'arrêté attaqué au nom du ministre compétent ; qu'il en est de même, à la date de la décision attaquée, en ce qui concerne le directeur général de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction nommé par décret du 19 mai 2005 publié le 21 mai 2005 ; que dès lors les moyens tirés de l'incompétence des signataires de l'arrêté attaqué, doivent être écartés ;

Sur les moyens tirés de l'irrégularité de l'enquête publique :

Considérant qu'aux termes de l'article L.123-16 du code de l'urbanisme : la déclaration d'utilité publique (...) d'une opération qui n'est pas compatible avec les dispositions d'un plan local d'urbanisme ne peut intervenir que si : a) L'enquête publique concernant cette opération a porté à la fois sur l'utilité publique ou l'intérêt général de l'opération et sur la mise en compatibilité du plan qui en est la conséquence ; b) L'acte déclaratif d'utilité publique ou la déclaration du projet sont pris après que les dispositions proposées pour assurer la mise en compatibilité du plan ont fait l'objet d'un examen conjoint de l'Etat, de l'établissement public (...) de la région, du département ; que dès lors le moyen tiré de ce que les enquêtes relatives au projet de construction des ouvrages et celle portant sur la mise en compatibilité des plans locaux d'urbanisme, qui ont été menées conjointement, ont créé une confusion dans le public, doit être écarté ;

Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'interdisait au préfet de décider que l'enquête publique se déroulerait du 27 décembre 2004 au 28 janvier 2005 ; que la circonstance que l'enquête a été menée pour partie durant une période de vacances scolaires est en l'espèce sans influence sur la régularité de la procédure ;

Considérant que le préfet qui a décidé, en l'absence de transmission du registre d'enquête au commissaire enquêteur, de renouveler l'enquête publique dans la COMMUNE DE QUINCY-BASSE a pu régulièrement désigner le même commissaire enquêteur pour y procéder ; que le moyen tiré du défaut d'impartialité de celui-ci lors de la seconde enquête doit être écarté ;

Considérant qu'il était loisible au commissaire enquêteur de limiter la participation à la réunion de travail organisée à Saint-Gobain le 25 janvier 2005 à un représentant de chacune des associations membres du collectif de lutte contre le projet ; que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'enquête en ce que le rapport d'enquête ne mentionne pas que certains membres du collectif se sont vus interdire l'accès à cette réunion dans des conditions irrégulières doit, dès lors, être écarté ;

Considérant que le commissaire enquêteur a émis un avis favorable au projet ; que la circonstance que, dans ses conclusions, il recommande à RTE-EDF transport de procéder à l'enfouissement de la ligne aérienne dans la traversée des communes de Landricourt et de Quincy-Basse n'a pas affecté le sens de son avis ;

Sur les moyens tirés des insuffisances de l'étude d'impact :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-3 du code de l'environnement : l'étude d'impact présente successivement 1° une analyse de l'état initial du site et de son environnement ; 2° une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement ; 3° les raisons pour lesquelles le projet présenté a été retenu ; 4° les mesures pour supprimer et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement ; 5° une analyse des méthodes utilisées pour évaluer les effets du projet sur l'environnement ; qu'il résulte de cette disposition que les raisons qui nécessitent le renforcement du réseau électrique existant dans le Soissonnais n'ont pas à figurer dans l'étude d'impact ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que RTE-EDF transport a justifié la méthode retenue pour déterminer dans l'étude d'impact les sous-aires d'étude ;

Considérant que s'il est allégué que les montages photographiques permettant de visualiser l'insertion des ouvrages dans le paysage ne sont pas en nombre suffisant, cette circonstance n'est pas de nature à entacher la procédure d'irrégularité dès lors qu'elle n'empêche pas d'apprécier les effets directs et indirects du projet sur le paysage ;

Sur le moyen tiré de la motivation de l'acte attaqué :

Considérant que les dispositions de l'article L. 11-1-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique selon lesquelles L'acte déclarant l'utilité publique est accompagné d'un document qui expose les motifs et considérations justifiant le caractère d'utilité publique de l'opération ne sont pas applicables aux déclarations d'utilité publique prises sur les fondements de l'article 35 de la loi du 8 avril 1946 et du décret du 11 juin 1970 ; que le moyen tiré de la violation de l'article L. 11-1-1 précité est, dès lors, inopérant ;

En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté attaqué :

Sur le moyen tiré du défaut d'utilité publique du projet :

Considérant qu'un projet relatif à la construction d'ouvrages électriques ne peut légalement être déclaré d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte à d'autres intérêts publics qu'il comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'il présente ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la consommation d'électricité de la région du Soissonnais a augmenté depuis plusieurs années et devrait continuer à croître d'environ 1,8 % dans les prochaines années ; que la construction d'un nouveau poste de transformation de 225 000/63 0000 volts au Long Champ, l'implantation d'une ligne aérienne de 225 000 volts entre Beautor et le Long Champ et d'une ligne aérienne de 63 000 volts entre le Long Champ et Soissons doivent permettre en cas d'incident de maintenir l'alimentation de la région de Soisson ; qu'en effet, le poste de Vesles, qui doit en principe intervenir en secours, n'a plus la capacité d'alimenter simultanément la région de Champagne et le Soissonnais ; que les atteintes à l'environnement demeureront limitées eu égard aux mesures compensatoires et réductrices d'impact sur l'environnement et au fait que les deux lignes aériennes à haute tension empruntent des tronçons de lignes déjà existantes ; qu'ainsi le moyen tiré du défaut d'utilité publique doit être écarté ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code justice administrative :

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE QUINCY-BASSE et autres ne sont pas fondées à demander l'annulation de l'arrêté attaqué ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune et des associations requérantes la somme de 3 000 euros que demande RTE-EDF transport au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

-------------

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE QUINCY-BASSE, de l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE DE LANDRICOURT-COURSON COURVAL-QUINCY-BASSE, de l'ASSOCIATION AISNE ENVIRONNEMENT, de l'ASSOCIATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DE GIBIER D'EAU DE L'AISNE et de l'ASSOCIATION UNE FORET ET DES HOMMES est rejetée.

Article 2 : La COMMUNE DE QUINCY-BASSE, l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE DE LANDRICOURT-COURSON COURVAL-QUINCY-BASSE, l'ASSOCIATION AISNE ENVIRONNEMENT, l'ASSOCIATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DE GIBIER D'EAU DE L'AISNE et l'ASSOCIATION UNE FORET ET DES HOMMES verseront à RTE-EDF transport la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE QUINCY-BASSE, à l'ASSOCIATION DE DEFENSE DU SITE DE LANDRICOURT-COURSON COURVAL-QUINCY-BASSE, à l'ASSOCIATION AISNE ENVIRONNEMENT, à l'ASSOCIATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DE GIBIER D'EAU DE L'AISNE, à l'ASSOCIATION UNE FORET ET DES HOMMES , au ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi et à RTE- EDF transport.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 24 mar. 2010, n° 300852
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Tuot
Rapporteur ?: M. Yves Salesse
Rapporteur public ?: M. Boucher Julien
Avocat(s) : SCP COUTARD, MAYER, MUNIER-APAIRE

Origine de la décision
Formation : 10ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 24/03/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 300852
Numéro NOR : CETATEXT000022024054 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-03-24;300852 ?
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