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26/03/2010 | FRANCE | N°317886

France | France, Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 26 mars 2010, 317886


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er juillet 2008 et 1er octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Kheira A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 29 avril 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 23 mars 2006 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 mars 2005 du préfet du Rhône rejetant sa demande de regroupem

ent familial au bénéfice de sa petite-fille, Abir B C, d'autre part, ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 1er juillet 2008 et 1er octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Kheira A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 29 avril 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 23 mars 2006 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 mars 2005 du préfet du Rhône rejetant sa demande de regroupement familial au bénéfice de sa petite-fille, Abir B C, d'autre part, à l'annulation de cette décision et à ce qu'il soit enjoint au préfet du Rhône de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler ce jugement et de faire droit à sa demande présentée devant le tribunal administratif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu la convention sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Stéphanie Gargoullaud, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat Mme Kheira A,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, Rapporteur public,

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat Mme Kheira A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'enfant Abir B, née le 6 mars 2000, n'a résidé avec ses parents que les tout premiers mois de sa vie avant d'être confiée à un oncle en Algérie après le divorce de ses parents, intervenu le 4 juillet 2000, puis, à l'âge de trois ans, à sa grand-mère, résidant en France, par un jugement de kafala du tribunal de Laghouat du 10 mai 2003 ; qu'elle vit auprès de sa grand-mère depuis le 22 mai 2003 et a été scolarisée en France ; qu'eu égard au fait que l'enfant, qui n'a plus de relations avec ses parents, a été effectivement prise en charge par sa grand-mère, seule susceptible de s'en occuper, et au fait qu'elle a été scolarisée et intégrée dès son plus jeune âge en France, le préfet du Rhône a fait une inexacte application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en refusant l'autorisation de regroupement familial qui avait été sollicitée pour elle ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, Mme A est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu, pour le Conseil d'Etat, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'en refusant l'autorisation sollicitée au bénéfice d'Abir B dans le cadre de la procédure du regroupement familial, le préfet du Rhône a, dans les circonstances particulières de l'espèce et comme il a été dit ci-dessus, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 23 mars 2006, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 mars 2005 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a seulement lieu d'enjoindre à l'administration, eu égard aux conclusions formulées par la requérante, de réexaminer au regard des motifs de la présente décision, la demande de Mme A dans un délai de deux mois suivant la notification de cette décision ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme A d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 29 avril 2008 est annulé.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 23 mars 2006 est annulé.

Article 3 : La décision du préfet du Rhône en date du 22 mars 2005 est annulée.

Article 4 : Il est enjoint au préfet du Rhône de réexaminer, dans le délai de deux mois suivant la notification de la présente décision, au regard de ses motifs, la demande de regroupement familial présentée par Mme A au profit de sa petite-fille Abir B.

Article 5 : L'Etat versera à Mme A la somme de 1 500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme Kheira A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 26 mar. 2010, n° 317886
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: Mme Stéphanie Gargoullaud
Rapporteur public ?: Mme Bourgeois-Machureau Béatrice
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Formation : 2ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 26/03/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 317886
Numéro NOR : CETATEXT000022024069 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-03-26;317886 ?
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