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26/03/2010 | FRANCE | N°324049

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 26 mars 2010, 324049


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 janvier et 9 avril 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Kele Papy A, demeurant chez ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 31 octobre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 4 mars 2008 du tribunal administratif d'Orléans rejetant sa demande d'annulation de l'arrêté du 28 novembre 2007 du préfet du Loiret portant refus de titre de séjour et obligation de

quitter le territoire français, ainsi qu'à l'annulation de cet arrêté...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 janvier et 9 avril 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Kele Papy A, demeurant chez ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 31 octobre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 4 mars 2008 du tribunal administratif d'Orléans rejetant sa demande d'annulation de l'arrêté du 28 novembre 2007 du préfet du Loiret portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, ainsi qu'à l'annulation de cet arrêté et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alain Boulanger, chargé des fonctions de Maître des requêtes,

- les observations de la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de M. A,

- les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de M. A ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour contester la légalité de l'arrêté du 28 novembre 2007 du préfet du Loiret lui refusant la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale qu'il sollicitait au titre du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et lui faisant obligation de quitter le territoire français, M. A invoquait devant la cour administrative d'appel de Nantes la méconnaissance de ces stipulations ; qu'il faisait notamment valoir qu'il vivait depuis 2005 avec Mme Pauline B, réfugiée en France et comme lui de nationalité congolaise, avec laquelle il avait un enfant, né le 19 janvier 2006, et avec qui il avait conclu le 1er août 2006 un pacte civil de solidarité, et qu'il ne pourrait reconstruire sa vie dans son pays d'origine avec sa compagne et son enfant en raison de leur statut de réfugié ; qu'il citait en outre un arrêt de la cour administrative d'appel Paris ayant annulé un arrêté de reconduite à la frontière pour méconnaissance de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; qu'ainsi, M. A est fondé à soutenir que la cour administrative d'appel de Nantes a dénaturé ses écritures en jugeant qu'il n'avait assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de cette convention ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'arrêt attaqué doit, par suite, être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Considérant que, dans les circonstances particulières de l'espèce rappelées ci-dessus, l'exécution de l'arrêté litigieux aurait pour effet de priver durablement l'enfant de M. A de la présence de son père, dont il n'est pas contesté qu'il participe à son éducation, en l'absence de possibilité de reconstitution de la cellule familiale en République démocratique du Congo en raison de la qualité de réfugiée de sa compagne ; que, par suite, M. A est fondé à soutenir que l'arrêté litigieux a été pris en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et à demander pour ce motif l'annulation du jugement du tribunal administratif d'Orléans rejetant sa demande d'annulation et celle de cet arrêté ;

Considérant qu'en application de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il appartient au préfet de délivrer à M. A une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il ait statué à nouveau sur sa demande de titre de séjour au vu de la situation de droit et de fait à la date à laquelle il se prononcera ; qu'en revanche, les conclusions de M. A tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet, sous peine d'astreinte, de lui délivrer une carte de séjour ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A de la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens tant en cassation, qu'en appel et en première instance ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 31 octobre 2008 est annulé.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 4 mars 2008 et l'arrêté du 28 novembre 2007 du préfet du Loiret portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont annulés.

Article 3 : L'Etat versera à M. A une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Kele Papy A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 26 mar. 2010, n° 324049
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Chantepy
Rapporteur ?: M. Alain Boulanger
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Date de la décision : 26/03/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 324049
Numéro NOR : CETATEXT000022024091 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-03-26;324049 ?
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