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07/04/2010 | FRANCE | N°330769

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 07 avril 2010, 330769


Vu le pourvoi, enregistré le 13 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ALIMENTATION, DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 24 juillet 2009 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nancy, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a suspendu l'exécution de la délibération du 29 janvier 2008 de la commission départementale d'aménagement foncier de la Marne ayant rejeté les réclamations formulées pa

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Vu le pourvoi, enregistré le 13 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'ALIMENTATION, DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 24 juillet 2009 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nancy, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a suspendu l'exécution de la délibération du 29 janvier 2008 de la commission départementale d'aménagement foncier de la Marne ayant rejeté les réclamations formulées par M. Michel A et l'EARL Michel A dans le cadre des opérations de remembrement de Fère-Champenoise ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de M. Michel A et de l'EARL Michel A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Xavier de Lesquen, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Brouchot, avocat de M. A et de l'EARL Michel A,

- les conclusions de Mme Catherine de Salins, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Brouchot, avocat de M. A et de l'EARL Michel A ;

Considérant que le MINISTRE DE L'ALIMENTATION, DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE demande l'annulation de l'ordonnance du 24 juillet 2009 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nancy, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a suspendu l'exécution de la délibération du 29 janvier 2008 de la commission départementale d'aménagement foncier de la Marne ayant rejeté les réclamations formulées par M. Michel A et l'EARL Michel A dans le cadre des opérations de remembrement de Fère-Champenoise ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par M. A et l'EARL Michel A :

Considérant qu'il ressort des articles 1er et 4 de la décision de la directrice des affaires juridiques du ministère de l'agriculture, de l'alimentation et de la pêche en date du 7 juillet 2008, publiée au Journal officiel de la République française le 9 juillet 2008, que Mme Tison, inspectrice en chef de la santé publique vétérinaire signataire du pourvoi, a reçu délégation pour signer au nom du ministre tous mémoires en demande ou en défense dans le cadre des litiges relevant du contentieux central du ministère de l'agriculture ; que le moyen tiré du défaut de délégation du signataire du pourvoi manque par suite en fait ;

Sur la légalité de l'ordonnance attaquée :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-10 du code rural, dans sa rédaction applicable au litige : La commission départementale d'aménagement foncier a qualité pour modifier les opérations décidées par la commission communale ou intercommunale d'aménagement foncier. Ses décisions peuvent, à l'exclusion de tout recours administratif, faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir par les intéressés ou par le préfet devant la juridiction administrative (...) ; qu'aux termes de l'article L. 123-12 du code rural, dans sa rédaction applicable au litige : Du jour du transfert de propriété résultant de la clôture des opérations de remembrement, les immeubles qui en sont l'objet ne sont plus soumis qu'à l'exercice des droits et actions nés du chef du nouveau propriétaire. / La date de clôture des opérations est celle du dépôt en mairie du plan définitif du remembrement ; ce dépôt étant constaté par un certificat délivré par le maire (...) ; qu'aux termes de l'article R. 121-29 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : Au vu du plan du ou des aménagements fonciers et du projet des travaux connexes approuvés par la commission communale ou intercommunale et si aucune réclamation n'a été introduite devant la commission départementale dans le délai prévu à l'article R. 121-6 ou, dans le cas contraire, au vu du plan approuvé par la commission départementale, le préfet prend un arrêté par lequel (...) / 3° Il ordonne le dépôt en mairie du plan ; / 4° Il constate la clôture des opérations à la date de ce dépôt (...). / Cet arrêté est affiché pendant quinze jours au moins à la mairie des communes sur le territoire desquelles l'aménagement est projeté (...) ;

Considérant que le propriétaire de parcelles incluses dans le périmètre d'une opération d'aménagement foncier peut contester les effets de l'opération sur ses biens en formant devant la juridiction administrative un recours pour excès de pouvoir à l'encontre de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier statuant sur sa réclamation et obtenir le cas échéant, même après la clôture de l'opération, la modification de ses attributions si celles-ci n'ont pas été déterminées conformément aux règles de l'aménagement foncier ; qu'il peut également assortir ce recours d'une demande de suspension en démontrant, notamment, l'atteinte grave susceptible d'être portée à son exploitation par la mise à exécution prochaine du nouveau plan parcellaire tel qu'il a été arrêté par la commission communale ou approuvé par la commission départementale après que celle-ci a statué sur les réclamations ; que, cependant, une telle demande de suspension ne peut être utilement formée devant le juge des référés postérieurement à la date à laquelle le nouveau plan parcellaire a, à la suite de l'affichage en mairie de l'arrêté préfectoral en ordonnant le dépôt, pris effet, emportant ainsi le transfert de propriété et l'entière exécution des décisions des commissions d'aménagement foncier ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que l'arrêté préfectoral ordonnant le dépôt du plan définitif de remembrement de la commune de Fère-Champenoise a été affiché à la mairie de la commune à compter du 9 janvier 2009 ; qu'à l'expiration du délai de quinze jours suivant cet affichage, les transferts de propriété prévus par le plan sont intervenus ; que, par suite, la demande de M. Michel A et de l'EARL Michel A, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Nancy le 17 mars 2009, tendant à ce que le juge des référés prononce la suspension de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier de la Marne du 29 janvier 2008 statuant sur leur réclamation, était dirigée contre une décision entièrement exécutée et n'était par suite pas recevable ; qu'il en résulte que l'ordonnance du juge des référés, qui n'a pas relevé cette irrecevabilité, est entachée d'erreur de droit et doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de statuer sur la demande de suspension présentée par M. Michel A et l'EARL Michel A ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la demande de M. Michel A et de l'EARL Michel A, qui tend à la suspension d'une décision entièrement exécutée, est dépourvue d'objet et n'est par suite pas recevable ;

Sur les conclusions de M. Michel A et de l'EARL Michel A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. Michel A et l'EARL Michel A demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nancy du 24 juillet 2009 est annulée.

Article 2 : La demande de suspension présentée par M. Michel A et l'EARL Michel A devant le juge des référés du tribunal administratif de Nancy est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. Michel A et de l'EARL Michel A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'ALIMENTATION, DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE, à M. Michel A et à l'EARL Michel A.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 330769
Date de la décision : 07/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

AGRICULTURE - CHASSE ET PÊCHE - REMEMBREMENT FONCIER AGRICOLE - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - RÉFÉRÉ-SUSPENSION (ART - L - 521-1 DU CJA) INTRODUIT CONTRE LA DÉCISION DE LA COMMISSION DÉPARTEMENTALE D'AMÉNAGEMENT FONCIER - RECEVABILITÉ - ABSENCE - CAS OÙ LE NOUVEAU PLAN PARCELLAIRE EST ENTRÉ EN VIGUEUR [RJ1].

03-04-05-01 Le propriétaire de parcelles incluses dans le périmètre d'une opération d'aménagement foncier peut contester les effets de l'opération sur ses biens en formant devant la juridiction administrative un recours pour excès de pouvoir à l'encontre de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier statuant sur sa réclamation et obtenir le cas échéant, même après la clôture de l'opération, la modification de ses attributions si celles-ci n'ont pas été déterminées conformément aux règles de l'aménagement foncier. Il peut également assortir ce recours d'une demande de suspension en démontrant, notamment, l'atteinte grave susceptible d'être portée à son exploitation par la mise à exécution prochaine du nouveau plan parcellaire tel qu'il a été arrêté par la commission communale ou approuvé par la commission départementale après que celle-ci a statué sur les réclamations. Cependant, une telle demande de suspension ne peut être utilement formée devant le juge des référés postérieurement à la date à laquelle le nouveau plan parcellaire a, à la suite de l'affichage en mairie de l'arrêté préfectoral en ordonnant le dépôt, pris effet, emportant ainsi le transfert de propriété et l'entière exécution des décisions des commissions d'aménagement foncier.

PROCÉDURE - PROCÉDURES INSTITUÉES PAR LA LOI DU 30 JUIN 2000 - RÉFÉRÉ SUSPENSION (ART - L - 521-1 DU CODE DE JUSTICE ADMINISTRATIVE) - RECEVABILITÉ - ABSENCE - CONTENTIEUX DU REMEMBREMENT RURAL - DEMANDE DE SUSPENSION DE LA DÉCISION DE LA COMMISSION DÉPARTEMENTALE D'AMÉNAGEMENT FONCIER - CAS OÙ LE NOUVEAU PLAN PARCELLAIRE EST ENTRÉ EN VIGUEUR [RJ1].

54-035-02-02 Le propriétaire de parcelles incluses dans le périmètre d'une opération d'aménagement foncier peut contester les effets de l'opération sur ses biens en formant devant la juridiction administrative un recours pour excès de pouvoir à l'encontre de la décision de la commission départementale d'aménagement foncier statuant sur sa réclamation et obtenir le cas échéant, même après la clôture de l'opération, la modification de ses attributions si celles-ci n'ont pas été déterminées conformément aux règles de l'aménagement foncier. Il peut également assortir ce recours d'une demande de suspension en démontrant, notamment, l'atteinte grave susceptible d'être portée à son exploitation par la mise à exécution prochaine du nouveau plan parcellaire tel qu'il a été arrêté par la commission communale ou approuvé par la commission départementale après que celle-ci a statué sur les réclamations. Cependant, une telle demande de suspension ne peut être utilement formée devant le juge des référés postérieurement à la date à laquelle le nouveau plan parcellaire a, à la suite de l'affichage en mairie de l'arrêté préfectoral en ordonnant le dépôt, pris effet, emportant ainsi le transfert de propriété et l'entière exécution des décisions des commissions d'aménagement foncier.


Références :

[RJ1]

Cf. Section, 6 avril 2007, Blondeau, n° 266913, p. 141.


Publications
Proposition de citation : CE, 07 avr. 2010, n° 330769
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Xavier de Lesquen
Avocat(s) : BROUCHOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:330769.20100407
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