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16/04/2010 | FRANCE | N°316186

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 16 avril 2010, 316186


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 mai et 14 août 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SARL GREEN, dont le siège social est situé 4, rue Scipion à Paris (75005) ; la SARL GREEN demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 13 mars 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 17 mars 2006 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujett

ie au titre de la période du 25 novembre 1992 au 31 novembre 1996 ;

2°)...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 mai et 14 août 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SARL GREEN, dont le siège social est situé 4, rue Scipion à Paris (75005) ; la SARL GREEN demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 13 mars 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 17 mars 2006 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 25 novembre 1992 au 31 novembre 1996 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa requête d'appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jérôme Michel, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la SARL GREEN,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la SARL GREEN ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel... ; qu'aux termes de l'article 256 A du même code : Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent, de manière indépendante, à titre habituel ou occasionnel, une ou plusieurs opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, quel que soit le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard d'autres impôts ou la nature de leur intervention... ; qu'il résulte de ces dispositions, interprétées à la lumière de celles de l'article 4 paragraphe 2 de la sixième directive 77/388/CEE du conseil des communautés européennes du 17 mai 1977, que le droit à déduction, qui prend naissance lorsque la taxe devient exigible chez le fournisseur, reste acquis, dès lors que l'assujetti s'est acquitté du prix des biens ou services et détient une facture mentionnant la taxe sur la valeur ajoutée, même lorsque l'activité économique envisagée ne donne pas lieu à des opérations ouvrant droit à déduction ou lorsque l'assujetti n'a pas utilisé les biens ou services ayant donné lieu à déduction dans le cadre d'une opération taxable, comme il prévoyait de le faire, en raison de circonstances indépendantes de sa volonté et en l'absence de toute intention frauduleuse ou abusive ;

Considérant que, pour rejeter la requête de la SARL GREEN, qui a été assujettie à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période comprise entre le 25 novembre 1992 et le 31 janvier 1996, au motif qu'elle n'avait réalisé aucune opération taxable depuis sa création et que les montants de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle avait déduits correspondaient à des factures de prestations de services dont l'administration contestait le caractère nécessaire à l'exploitation, la cour administrative d'appel de Paris a jugé que la circonstance que l'administration lui avait reconnu la qualité d'assujetti en procédant aux remboursements de taxes qu'elle avait demandés ne faisait pas obstacle à ce qu'elle remette ultérieurement en cause ces déductions, dès lors que la société n'avait pas confirmé par des éléments suffisamment probants son intention de commencer à exercer des activités économiques taxables ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la société n'avait pas renoncé à utiliser les services ayant fait l'objet de la déduction pour la réalisation de telles activités pour des raisons indépendantes de sa volonté et en l'absence de toute intention frauduleuse ou abusive, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, la SARL GREEN est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative;

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts et de l'article 230 de l'annexe II à ce code alors en vigueur, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services ; que dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération ;

Considérant que, dans le dernier état de ses écritures, le ministre soutient que les factures adressées par la société JFB à la SARL GREEN ne correspondent à aucune prestation effective ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les prestations en litige ont été fournies par la société JFB, régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés et assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration, pour refuser à la SARL GREEN le droit de déduire la taxe mentionnée sur les factures de la société JFB, fait valoir que la seule production de factures relatives aux prestations de cette société ne permet pas d'établir la nature et l'objet de ses interventions et qu'il n'a pu être relevé, lors des opérations de contrôle, aucun élément susceptible d'établir un lien entre ces prestations et l'activité de la SARL GREEN ; qu'en soutenant que les prestations de la société JFB avaient pour objet, en vertu de la convention de conseil, de coordination et de représentation qu'elle avait signée avec elle, de lui apporter des opportunités d'affaires, que la société JFB pouvait apporter à d'autres opérateurs économiques en cas de refus de sa part de les utiliser, et qu'elle aurait utilisé ces prestations pour l'activité économique qu'elle projetait d'exercer, si la situation très défavorable du marché de l'immobilier n'y avait fait obstacle, la SARL GREEN n'apporte pas de justifications suffisantes de la réalité et de l'utilité des prestations facturées ; que, par suite, l'administration était fondée à refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnées sur les factures de la société JFB alors même qu'elle lui avait reconnu auparavant la qualité d'assujettie;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL GREEN n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 25 novembre 1992 au 31 novembre 1996 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 13 mars 2008 est annulé.

Article 2 : La requête de la SARL GREEN devant la cour administrative d'appel de Paris et le surplus des conclusions de son pourvoi sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SARL GREEN et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 316186
Date de la décision : 16/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 16 avr. 2010, n° 316186
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Jérôme Michel
Rapporteur public ?: M. Olléon Laurent
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:316186.20100416
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