La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/04/2010 | FRANCE | N°320930

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 16 avril 2010, 320930


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 septembre et 22 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bernard A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 7 juillet 2008 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du centre hospitalier de Vire rejetant sa demande de prise en charge des frais de repas pris en dehors de sa résidence administrative et, d'autre part, à ce qu'il soit renvoyé devant ce cent

re hospitalier pour le calcul et la liquidation des indemnités corr...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 septembre et 22 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bernard A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 7 juillet 2008 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du centre hospitalier de Vire rejetant sa demande de prise en charge des frais de repas pris en dehors de sa résidence administrative et, d'autre part, à ce qu'il soit renvoyé devant ce centre hospitalier pour le calcul et la liquidation des indemnités correspondantes ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Vire la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le décret n° 84-131 du 24 février 1984 ;

Vu le décret n° 89-698 du 20 septembre 1989 ;

Vu le décret n° 90-437 du 28 mai 1990 ;

Vu le décret n° 92-566 du 25 juin 1992 ;

Vu le décret n° 2005-840 du 20 juillet 2005 ;

Vu le décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Laure Bédier, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. A,

- les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. A ;

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 685 du code de la santé publique, et aujourd'hui de celles des articles L. 6152-1 et L. 6152-6 de ce code, que les médecins, odontologistes et pharmaciens des établissements publics de santé relèvent non des règles statutaires applicables à la fonction publique hospitalière, mais d'un statut fixé par décret en Conseil d'Etat ; que selon le premier alinéa de l'article 33 du décret du 24 février 1984, introduit par le décret du 20 septembre 1989 sur le fondement de ces dispositions et codifié depuis lors par le décret du 20 juillet 2005 à l'article R. 6152-32 du même code : Les praticiens hospitaliers bénéficient du remboursement des frais engagés à l'occasion de leurs déplacements temporaires effectués pour les besoins du service (...) conformément aux dispositions applicables aux fonctionnaires de l'Etat, sous réserve des adaptations rendues nécessaires par les conditions particulières d'exercice de leurs fonctions. Ces adaptations font l'objet d'un arrêté des ministres chargés du budget et de la santé (...) ; qu'ainsi, en faisant application à M. A, praticien hospitalier, des dispositions de l'article 4 du décret du 25 juin 1992 relatif aux déplacements des fonctionnaires et agents relevant de la fonction publique hospitalière, le tribunal administratif de Caen a commis une erreur de droit ; que son jugement doit, pour ce motif, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'aux termes de l'article 4 du décret du 28 mai 1990, désormais repris, s'agissant des déplacements temporaires, à l'article 2 du décret du 3 juillet 2006, et applicable aux praticiens hospitaliers en vertu des dispositions précitées de l'article R. 6152-32 du code de la santé publique : Pour l'application du présent décret, sont considérés comme : / 1° Résidence administrative : le territoire de la commune sur lequel se situe le service où l'agent est affecté (...) / ; 2° Résidence familiale : le territoire de la commune sur lequel se situe le domicile de l'agent (...) ; qu'ainsi, nonobstant l'article L. 3221-4 du code de la santé publique, qui dispose que chaque établissement hospitalier est responsable de la lutte contre les maladies mentales dans les secteurs psychiatriques qui lui sont rattachés et met à la disposition de la population dans ces secteurs des services qui exercent leurs activités non seulement à l'intérieur de l'établissement mais aussi en dehors de celui-ci, la résidence administrative d'un praticien hospitalier, même s'il s'agit d'un praticien hospitalier en psychiatrie, ne peut, en l'absence de toute précision contraire prévue par un arrêté pris en application de l'article R. 6152-32, correspondre qu'au territoire de la commune sur lequel se situe le centre hospitalier dans lequel il exerce son activité ; qu'aux termes de l'article 5 de ce même décret, applicable en l'espèce : L'agent appelé à se déplacer pour les besoins du service hors de sa résidence administrative et hors de sa résidence familiale peut prétendre à la prise en charge de ses frais de transport (...) et au paiement d'indemnités journalières destinées à rembourser forfaitairement ses frais supplémentaires de nourriture et de logement (...) ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que M. A, affecté au centre hospitalier de Vire, se déplace hors de sa résidence administrative lorsqu'il se rend à Condé-sur-Noireau et Aunay-sur-Odon dans le cadre de ses fonctions de responsable de secteur psychiatrique ; qu'il est donc fondé à soutenir que c'est à tort que le centre hospitalier de Vire lui a refusé, par une lettre du 12 septembre 2005 qui constitue, compte tenu de ses termes, une décision susceptible de recours pour excès de pouvoir, le bénéfice du remboursement forfaitaire des repas pris dans ces deux communes, au motif que ces deux communes seraient incluses dans sa résidence administrative dès lors qu'elles font partie du même secteur psychiatrique que la commune de Vire ;

Considérant que l'exécution de la présente décision implique que la demande de M. A soit réexaminée ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au centre hospitalier de Vire de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge du centre hospitalier de Vire le versement de la somme de 3 000 euros à M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Caen du 7 juillet 2008 et la décision du centre hospitalier de Vire du 12 septembre 2005 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au centre hospitalier de Vire de procéder au réexamen de la demande de M. A dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : Le centre hospitalier de Vire versera la somme de 3 000 euros à M. A en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Bernard A et au centre hospitalier de Vire.

Copie en sera adressée pour information à la ministre de la santé et des sports.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-11-01-01 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS. DISPOSITIONS PROPRES AUX PERSONNELS HOSPITALIERS. PERSONNEL MÉDICAL. RÈGLES COMMUNES. - REMBOURSEMENT DES FRAIS DE DÉPLACEMENTS TEMPORAIRES - 1) RENVOI AUX RÈGLES APPLICABLES À LA FONCTION PUBLIQUE DE L'ETAT (ANCIEN ART. 33 DU DÉCRET DU 24 FÉVRIER 1984, ACTUEL ART. R. 6152-32 DU CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE) - CONSÉQUENCE - APPLICATION DU DÉCRET DU 28 MAI 1990 (ACTUELLEMENT, DÉCRET DU 3 JUILLET 2006) - 2) RÉSIDENCE ADMINISTRATIVE - NOTION - TERRITOIRE DE LA COMMUNE DE SITUATION DU SERVICE OÙ EST AFFECTÉ L'AGENT (ART. 4 DU DÉCRET DU 28 MAI 1990, ART. 2 DU DÉCRET DU 3 JUILLET 2006) - CAS D'UN PRATICIEN RESPONSABLE D'UN SECTEUR PSYCHIATRIQUE - DÉFINITION DES LIMITES DE CE SECTEUR SANS INCIDENCE [RJ1].

36-11-01-01 Litige soulevé par un praticien hospitalier à propos des conditions de remboursement par l'administration de ses frais de déplacement.... ...1) Il résulte des dispositions de l'article L. 685 du code de la santé publique, et aujourd'hui de celles des articles L. 6152-1 et L. 6152-6 de ce code, que les médecins, odontologistes et pharmaciens des établissements publics de santé relèvent non des règles statutaires applicables à la fonction publique hospitalière, mais d'un statut fixé par décret en Conseil d'Etat. Selon le premier alinéa de l'article 33 du décret n° 84 131 du 24 février 1984, introduit par le décret n° 89-698 du 20 septembre 1989 sur le fondement de ces dispositions et codifié depuis lors par le décret n° 2005-840 du 20 juillet 2005 à l'article R. 6152-32 du même code, les praticiens hospitaliers bénéficient du remboursement des frais engagés à l'occasion de leurs déplacements temporaires effectués pour les besoins du service conformément aux dispositions applicables aux fonctionnaires de l'Etat, sous réserve des adaptations rendues nécessaires par les conditions particulières d'exercice de leurs fonctions, qui doivent faire l'objet d'un arrêté des ministres chargés du budget et de la santé.... ...Les dispositions de l'article 4 du décret n° 92-566 du 25 juin 1992 relatif aux déplacements des fonctionnaires et agents relevant de la fonction publique hospitalière ne trouvaient donc pas à s'appliquer à la situation de ce praticien hospitalier, qui était régie par celles de l'article 4 du décret n° 90-437 du 28 mai 1990, désormais repris, s'agissant des déplacements temporaires, à l'article 2 du décret n° 2006-781 du 3 juillet 2006.... ...2) Les dispositions de l'article 4 du décret du 28 mai 1990 définissent la résidence administrative de l'agent comme le territoire de la commune sur lequel se situe le service où celui-ci est affecté. Par suite, le praticien en cause, lorsqu'il se déplace dans d'autres communes que celle où se situe son établissement d'affectation, se déplace hors de sa résidence administrative, nonobstant la circonstance que ces communes relèveraient du même secteur psychiatrique, dont il a la responsabilité.


Références :

[RJ1]

Rappr. 13 février 2002, Mme Pradines et autres, n° 217230, p. 39.


Publications
Proposition de citation: CE, 16 avr. 2010, n° 320930
Mentionné aux tables du recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Laure Bédier
Rapporteur public ?: Mlle Courrèges Anne
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Date de la décision : 16/04/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 320930
Numéro NOR : CETATEXT000022155483 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-04-16;320930 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award