Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 février et 26 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Francis A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 4 décembre 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté sa requête dirigée contre le jugement du 1er février 2007 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 527 054, 46 euros, ainsi que les intérêts au taux légal, en réparation du préjudice subi du fait des dégradations d'origine minière dont sa maison d'habitation a fait l'objet ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel et de lui accorder la capitalisation des intérêts ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code minier ;
Vu le décret n° 2000-465 du 29 mai 2000 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Marie-Françoise Lemaître, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Cyril Roger-Lacan, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. A ;
Considérant que l'article 75-2 du code minier frappe de nullité d'ordre public toute clause figurant dans un contrat de mutation immobilière conclu avec une collectivité locale ou avec une personne physique non professionnelle après l'entrée en vigueur de la loi du 15 juillet 1994, et exonérant l'exploitant de la responsabilité des dommages liés à son activité minière ; que ce même article dispose que, lorsqu'une telle clause a été insérée dans un contrat de ce type, l'Etat assure dans les meilleurs délais l'indemnisation des dommages matériels directs et substantiels qui n'auraient pas été couverts par une autre contribution et qui ont pour cause déterminante un sinistre minier ; qu'un sinistre minier se définit, selon le dernier alinéa du II du même article, comme un affaissement ou un accident miniers soudains, ne trouvant pas son origine dans des causes naturelles et provoquant la ruine d'un ou plusieurs immeubles bâtis ou y occasionnant des dommages dont la réparation équivaut à une reconstruction totale ou partielle. Cet affaissement ou cet accident est constaté par le représentant de l'Etat, qui prononce à cet effet l'état de sinistre minier. ; qu'en vertu de l'article 1er du décret du 29 mai 2000, pris pour l'application de ces dispositions, cet état est constaté par un arrêté du préfet, qui délimite le périmètre de la zone concernée par le sinistre minier ; qu'il résulte enfin de ce même article que la mise en oeuvre du régime d'indemnisation prévu par l'article 75-2 du code minier est subordonnée à l'intervention de l'arrêté préfectoral constatant le sinistre minier ;
Considérant qu'il ressort du dossier soumis aux juges du fond que M. A a acquis en 1989, à Betting-Les-Saint-Avold, un immeuble d'habitation ayant été la propriété des Houillères du Bassin de Lorraine, et qui a subi de profondes dégradations, lesquelles ont été considérées, à la suite d'une expertise, comme étant d'origine minière ; qu'il a demandé le 20 juillet 2004 au préfet de la Moselle de lui verser, au titre des dispositions du code minier ci-dessus rappelées, la somme de 527 054,46 euros ; que, pour rejeter l'appel de l'intéressé contre le jugement du tribunal administratif de Strasbourg qui avait refusé de condamner l'Etat à lui verser cette somme, la cour administrative d'appel de Nancy, après avoir relevé que, postérieurement au jugement attaqué, un arrêté du préfet de la Moselle avait reconnu l'état de sinistre minier de la maison de M. A et qu'une indemnisation d'un montant de 260 602 euros lui avait été proposée, en a déduit qu'il appartenait au requérant de saisir le tribunal administratif d'une contestation de ce montant ; qu'en se prononçant ainsi, alors qu'il lui appartenait d'assurer elle-même le règlement complet de l'affaire, compte tenu de l'évolution des données du litige, après avoir, le cas échéant, ordonné les mesures d'instruction qui lui paraissaient nécessaires, la cour administrative d'appel a méconnu les obligations qui lui incombaient au titre de l'effet dévolutif de l'appel ; que par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, M. A est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 4 décembre 2008 de la cour administrative d'appel de Nancy est annulé.
Article 2 L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nancy.
Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Francis A et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.