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16/04/2010 | FRANCE | N°333416

France | France, Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 16 avril 2010, 333416


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 30 octobre 2009, présentée par Mme A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 30 juillet 2009 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du consul général de France à Rabat du 25 avril 2009 refusant un visa d'entrée et de long séjour à sa nièce Mlle B ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du

développement solidaire de délivrer à Mlle B un visa d'entrée et de long séjour f...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 30 octobre 2009, présentée par Mme A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 30 juillet 2009 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du consul général de France à Rabat du 25 avril 2009 refusant un visa d'entrée et de long séjour à sa nièce Mlle B ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de délivrer à Mlle B un visa d'entrée et de long séjour famille de Français dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jérôme Marchand-Arvier, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Lenica, rapporteur public ;

Considérant que Mme A, de nationalité française, conteste la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa du 30 juillet 2009 ayant rejeté son recours contre la décision du 25 avril 2009 des autorités consulaires françaises au Maroc refusant la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en France à Mlle B, de nationalité marocaine, née le 24 mars 2000, qui lui avait été confiée par jugement d'homologation de kafala du tribunal de première instance de Kenitra du 4 septembre 2003 ainsi que par un jugement de délégation de l'autorité parentale prononcé par le juge aux affaires familiales de la 7ème chambre du tribunal de grande instance de Créteil en date du 4 octobre 2005 ; qu'il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter ce recours, la commission s'est fondée, sans que le préfet n'ait eu à se prononcer sur une demande de regroupement familial, sur l'intérêt supérieur de l'enfant à demeurer au Maroc compte tenu de la présence dans ce pays de plusieurs membres de sa famille, dont ses parents ;

Considérant que l'intérêt d'un enfant est, en principe, de vivre auprès de la personne qui, en vertu d'une décision de justice qui produit des effets juridiques en France, est titulaire à son égard de l'autorité parentale ; qu'ainsi, dans le cas où un visa d'entrée et de long séjour en France est sollicité en vue de permettre à un enfant de rejoindre un ressortissant français ou étranger qui a reçu délégation de l'autorité parentale dans les conditions qui viennent d'être indiquées, ce visa ne peut en règle générale, eu égard notamment aux stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant, être refusé pour un motif tiré de ce que l'intérêt de l'enfant serait au contraire de demeurer auprès de ses parents ou d'autres membres de sa famille ; qu'en revanche, et sous réserve de ne pas porter une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, l'autorité chargée de la délivrance des visas peut se fonder, pour rejeter la demande dont elle est saisie, non seulement sur l'atteinte à l'ordre public qui pourrait résulter de l'accès de l'enfant au territoire national, mais aussi sur le motif tiré de ce que les conditions d'accueil de celui-ci en France seraient, compte tenu notamment des ressources et des conditions de logement du titulaire de l'autorité parentale, contraires à son intérêt ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si l'enfant B a toujours vécu auprès de ses parents au Maroc, Mme A, qui justifie de ressources et de conditions d'accueil suffisantes, dispose d'une délégation de l'autorité parentale en vertu d'un jugement du juge aux affaires familiales de la 7ème chambre du tribunal de grande instance de Créteil pour prendre toutes mesures à l'égard de cet enfant ; qu'ainsi, en l'absence de circonstances particulières, en estimant qu'il était, au contraire, dans l'intérêt supérieur de l'enfant de demeurer auprès de sa famille au Maroc, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a entaché sa décision d'une erreur de droit ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme A est fondée à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

Considérant qu'il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'identité nationale et du développement solidaire de procéder à un nouvel examen de la demande de visa dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du 30 juillet 2009 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours de Mme A contre la décision du consul général de France à Rabat du 25 avril 2009 refusant un visa d'entrée et de long séjour en France à sa nièce, Mlle B, est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de réexaminer, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, la demande de visa d'entrée et de long séjour de Mlle B.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 2 000 euros à Mme A, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Om-Khaltoum A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : 2ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 333416
Date de la décision : 16/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 16 avr. 2010, n° 333416
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: M. Jérôme Marchand-Arvier
Rapporteur public ?: M. Lenica Frédéric

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:333416.20100416
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