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23/04/2010 | FRANCE | N°321464

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 23 avril 2010, 321464


Vu la requête, enregistrée le 9 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Fatiha A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision implicite par laquelle le consul général de France à Alger a implicitement refusé de lui délivrer, ainsi qu'à son conjoint Abdelkrim B, un visa d'entrée et de court séjour en France ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l

a convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fon...

Vu la requête, enregistrée le 9 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Fatiha A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision implicite par laquelle le consul général de France à Alger a implicitement refusé de lui délivrer, ainsi qu'à son conjoint Abdelkrim B, un visa d'entrée et de court séjour en France ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco- algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Michel Thénault, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Cyril Roger-Lacan, rapporteur public ;

Considérant que le 5 février 2009, postérieurement à l'introduction de la requête de Mme A, est intervenue une décision expresse de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France rejetant son recours ; que ses conclusions à fin d'annulation doivent par suite être regardées comme dirigées contre cette dernière décision ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire :

Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre, la requête contient l'exposé de faits et moyens, ainsi que l'énoncé de conclusions, et satisfait par suite aux exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; qu'il suit de là que la fin de non-recevoir opposée par la ministre ne peut qu'être écartée ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant que pour refuser à Mme A et son conjoint un visa de court séjour en France pour rendre visite à leur fille et à leurs petits-enfants, la commission de recours s'est fondée sur l'insuffisance de leurs ressources ;

Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la convention d'application de l'accord de Schengen : 1. Il est institué un visa uniforme valable pour le territoire de l'ensemble des Parties contractantes. Ce visa (...) peut être délivré pour un séjour de trois mois au maximum (...) ; qu'aux termes de l'article 5 du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 : 1. Pour un séjour n'excédant pas trois mois sur une période de six mois, les conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers sont les suivantes : (...) c) justifier l'objet et les conditions du séjour envisagé, et disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays d'origine ou le transit vers un pays tiers dans lequel leur admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens (...) ; qu'aux termes de l'article L. 211-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Tout étranger qui déclare vouloir séjourner en France pour une durée n'excédant pas trois mois dans le cadre d'une visite familiale ou privée doit présenter un justificatif d'hébergement. Ce justificatif prend la forme d'une attestation d'accueil signée par la personne qui se propose d'assurer le logement de l'étranger, ou son représentant légal, et validée par l'autorité administrative. Cette attestation d'accueil constitue le document prévu par la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 pour justifier les conditions de séjour dans le cas d'une visite familiale ou privée ; que selon l'article L. 211-4 du même code, l'attestation d'accueil est accompagnée de l'engagement de l'hébergeant de prendre en charge, pendant toute la durée de validité du visa ou pendant une durée de trois mois à compter de l'entrée de l'étranger sur le territoire des Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, et au cas où l'étranger accueilli n'y pourvoirait pas, les frais de séjour en France de celui-ci, limités au montant des ressources exigées de la part de l'étranger pour son entrée sur le territoire en l'absence d'une attestation d'accueil ; qu'aux termes de l'article R. 211-14 du même code : Le signataire de l'attestation d'accueil doit, pour en obtenir la validation par le maire, se présenter personnellement en mairie, muni d'un des documents mentionnés aux articles R. 211-12 et R. 211-13, d'un document attestant de sa qualité de propriétaire, de locataire ou d'occupant du logement dans lequel il se propose d'héberger le visiteur ainsi que de tout document permettant d'apprécier ses ressources et sa capacité d'héberger l'étranger accueilli dans un logement décent au sens des dispositions réglementaires en vigueur et dans des conditions normales d'occupation ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'obtention d'un visa de court séjour est subordonnée à la condition que le demandeur justifie à la fois de sa capacité à retourner dans son pays d'origine et de moyens de subsistance suffisants pendant son séjour ; qu'il appartient au demandeur de visa dont les ressources personnelles ne lui assurent pas ces moyens d'apporter la preuve de ce que les ressources de la personne qui l'héberge et qui s'est engagée à prendre en charge ses frais de séjour au cas où il n'y pourvoirait pas sont suffisantes pour ce faire ; que cette preuve peut résulter de la production d'une attestation d'accueil validée par l'autorité compétente et comportant l'engagement de l'hébergeant de prendre en charge les frais de séjour du demandeur, sauf pour l'administration à produire des éléments de nature à démontrer que l'hébergeant se trouverait dans l'incapacité d'assumer effectivement l'engagement qu'il a ainsi souscrit ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de leurs demandes de visa de court séjour, M. et Mme A ont produit une attestation de filiation à la caisse nationale de retraite, plusieurs quittances de retrait de devises important, ainsi qu'une attestation d'accueil de Mme Rym C; que si les ressources propres de la requérante et de son époux ne lui permettaient pas de justifier de moyens de subsistance suffisants pour leur séjour en France, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire n'allègue pas que l'hébergeant serait dans l'incapacité de pourvoir effectivement à leurs frais de séjour ; que, dans ces circonstances, en estimant que Mme A et son conjoint ne pouvaient être regardés comme disposant des ressources suffisantes pour financer un séjour de trois mois en France, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a fait une inexacte application des dispositions précitées ; que compte tenu du caractère erroné de ce motif et du caractère imprécis des éléments figurant au dossier relatifs au risque de détournement des visas à des fins migratoires, il ne résulte pas de l'instruction que la commission aurait pris la même décision en se fondant seulement sur ce dernier motif ; que, par suite, Mme A est fondée à demander l'annulation de cette décision ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du 5 mars 2009 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est annulée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Fatiha A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 321464
Date de la décision : 23/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 avr. 2010, n° 321464
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Maugüé
Rapporteur ?: M. Michel Thenault
Rapporteur public ?: M. Roger-Lacan Cyril

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:321464.20100423
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