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12/05/2010 | FRANCE | N°326374

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 12 mai 2010, 326374


Vu la requête et le nouveau mémoire, enregistrés les 23 mars et 20 mai 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par Mme Rbiha A, représentée par son gendre, M. Abdelhamid B, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 5 février 2009 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision du 22 janvier 2009 par laquelle le consul général de France à Fès (Maroc) a refusé de lui délivrer un visa d'entrée et de court séjour en

France pour visite familiale ;

2°) d'enjoindre aux autorités compétentes de...

Vu la requête et le nouveau mémoire, enregistrés les 23 mars et 20 mai 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par Mme Rbiha A, représentée par son gendre, M. Abdelhamid B, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 5 février 2009 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours dirigé contre la décision du 22 janvier 2009 par laquelle le consul général de France à Fès (Maroc) a refusé de lui délivrer un visa d'entrée et de court séjour en France pour visite familiale ;

2°) d'enjoindre aux autorités compétentes de réexaminer sa demande et de lui délivrer le visa sollicité dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Chavanat, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, rapporteur public ;

Considérant que Mme A, ressortissante marocaine, demande l'annulation de la décision du 5 février 2009 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 22 janvier 2009 par laquelle le consul général de France à Fès (Maroc) a refusé de lui délivrer un visa d'entrée et de court séjour en France ;

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant que Mme A a fait notamment valoir que la commission de recours avait entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que sa demande présentait un risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires ; qu'ainsi, cette requête n'est pas dépourvue de tout moyen et satisfait aux exigences posées par l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le ministre doit être écartée ;

Sur les conclusions à fins d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant que, pour refuser à Mme A le visa demandé, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée, d'une part, sur la circonstance qu'elle ne disposait pas de ressources suffisantes et, d'autre part, sur l'existence d'un risque de détournement à des fins migratoires de l'objet du visa ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 5 du règlement du Parlement européen et du Conseil de l'Union européenne du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes, l'étranger qui souhaite séjourner en France pour une durée n'excédant pas trois mois doit : 1. (...) c) (...) disposer des moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans le pays (...) ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens ; que, si Mme A ne justifie d'aucun revenu personnel régulier, il ressort des pièces du dossier qu'afin de disposer des moyens nécessaires à son séjour, Mme B, sa fille, a effectué deux virements bancaires à son profit, les 18 octobre et 7 décembre 2007, d'un montant global de 775 euros; que ces opérations portent sur un montant adapté à la durée du séjour pour lequel l'intéressée a sollicité un visa ; qu'au surplus, M. et Mme B, sa fille et son gendre, qui se sont engagés à l'héberger, ont fourni les avis d'impôt sur leurs revenus de 2006 à 2008 témoignant qu'ils perçoivent des revenus suffisants à cette fin ; qu'ainsi, en rejetant la demande de Mme A au motif qu'elle ne disposait pas de ressources suffisantes au regard de la durée et de l'objet de son séjour, la commission de recours a fait une inexacte application de ces dispositions ;

Considérant, en second lieu, que, si la commission a fait valoir que, lors d'un précédent séjour, en 2005, Mme A avait bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour pour soins, il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante se serait maintenue sur le territoire français après l'expiration de cette autorisation ; que, selon les écritures mêmes du ministre, le centre de la vie privée et familiale de Mme A se trouve au Maroc, où elle réside avec son mari ; que, dès lors, la commission de recours a entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que sa demande présentait un risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A est fondée à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions à fins d'injonction :

Considérant qu'il appartient au Conseil d'Etat, lorsqu'il est saisi de conclusions tendant à ce que soit prescrite une mesure d'exécution dans un sens déterminé, de statuer sur ces conclusions en tenant compte de la situation de droit et de fait existant à la date de sa décision ; qu'il résulte de l'instruction qu'aucun changement n'est intervenu dans la situation de Mme A depuis la décision qu'elle attaque ; que par suite, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de prescrire à l'autorité compétente la délivrance à Mme A, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, d'un visa d'entrée et de court séjour en France ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du 5 février 2009 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de délivrer à Mme A un visa d'entrée et de court séjour en France dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Rbiha A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 326374
Date de la décision : 12/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 12 mai. 2010, n° 326374
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Maugüé
Rapporteur ?: M. Bruno Chavanat
Rapporteur public ?: M. Guyomar Mattias

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:326374.20100512
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