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26/05/2010 | FRANCE | N°315425

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 26 mai 2010, 315425


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 avril et 18 juillet 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Ange A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 19 février 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 24 mai 2006 du tribunal administratif de Versailles rejetant sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 94 281,85 euros en réparation des préjudices résultant des dÃ

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Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 avril et 18 juillet 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Ange A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 19 février 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 24 mai 2006 du tribunal administratif de Versailles rejetant sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 94 281,85 euros en réparation des préjudices résultant des décisions du ministre de l'intérieur des 20 août et 13 novembre 2002 rejetant sa demande de maintien en activité ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu la loi de finances rectificative pour 2001 n° 2001-1276 du 28 décembre 2001 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Emmanuel Vernier, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de Me Hemery, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Catherine de Salins, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Hemery, avocat de M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, commissaire de police principal, ayant atteint le 6 juillet 2002 la limite d'âge de 57 ans prévue par son statut, a été admis à la retraite à compter du 7 juillet 2002 par un arrêté du 6 juin 2002 ; que, par courrier du 12 juillet 2002, il a demandé à bénéficier, par application de l'article 88 de la loi de finances rectificative pour 2001, d'un maintien en activité au-delà de la limite d'âge ; que le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire a rejeté cette demande par une décision du 20 août 2002 confirmée sur recours gracieux le 13 novembre suivant ; que M. A, qui affirmait avoir été dissuadé de présenter en temps utile une demande de maintien en activité par une circulaire du ministre de l'intérieur retenant une interprétation erronée des dispositions de l'article 88 de la loi de finances rectificative pour 2001, a présenté un recours pour excès de pouvoir contre la décision du 20 août 2002 et un recours indemnitaire ; qu'il se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 19 février 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a confirmé le jugement du 24 mai 2006 du tribunal administratif de Versailles rejetant l'ensemble de ses conclusions ;

Sur l'arrêt en tant qu'il statue sur les conclusions du recours pour excès de pouvoir dirigé contre le refus du ministre de l'intérieur de maintenir M. A en activité au-delà de la limite d'âge :

Considérant qu'aux termes de l'article 68 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : Les fonctionnaires ne peuvent être maintenus en fonction au-delà de la limite d'âge de leur emploi sous réserve des exceptions prévues par les textes en vigueur ; qu'aux termes de l'article 88 de la loi de finances rectificative pour 2001 : (...) II. - (...) les fonctionnaires des corps actifs de la police nationale mentionnés à l'article 19 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité, et dont la période de services effectifs accomplis est inférieure au nombre maximal d'annuités liquidables dans la pension civile mentionné à l'article L. 14 du code des pensions civiles et militaires de retraite, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge des corps auxquels ils appartiennent, peuvent, sur leur demande et sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en position d'activité. (...). ; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que les fonctionnaires des corps actifs de la police nationale susceptibles de bénéficier d'un maintien en activité doivent présenter une demande en ce sens avant d'avoir atteint la limite d'âge prévue par leur statut ;

Considérant qu'après avoir constaté que M. A avait été mis à la retraite à compter du 6 juillet 2002, date à laquelle il avait atteint la limite d'âge de son grade, la cour administrative d'appel a jugé que le ministre de l'intérieur était tenu de rejeter la demande de maintien en activité présentée le 12 juillet suivant ; que le requérant soutient que, ce faisant, la cour a méconnu les dispositions de l'article L. 55 du code des pensions civiles et militaires de retraites qui prévoient qu'en cas d'erreur de droit, les pensions peuvent être révisées dans le délai d'un an à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé ; que, toutefois, ces dispositions ont pour seul objet de déterminer les cas dans lesquels l'autorité administrative peut réviser une décision relative à la concession d'une pension et ne concernent pas les décisions par lesquelles l'autorité compétente fait passer un agent de la position statutaire d'activité à la position de retraite ou se prononce sur une demande de maintien en activité au-delà de la limite d'âge ; que la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que le ministre était tenu de rejeter la demande présentée tardivement par M. A et en écartant le moyen tiré d'une rupture d'égalité résultant, selon l'intéressé, du fait que certains agents avaient connaissance de l'erreur entachant la circulaire ministérielle relative aux conditions du maintien en activité ;

Considérant, qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque en tant qu'il rejette ses conclusions d'excès de pouvoir ;

Sur l'arrêt en tant qu'il statue sur les conclusions indemnitaires de M. A, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi :

Considérant qu'au soutien de ses conclusions indemnitaires, M. A a invoqué la faute commise par l'administration pour avoir indiqué, dans un télégramme diffusé le 15 janvier 2002 et dans une circulaire du 22 avril 2002, que pour appliquer les dispositions du II de l'article 88 de la loi de finances rectificative pour 2001 ouvrant le maintien en activité aux seuls fonctionnaires dont la période de services effectifs est inférieure au nombre maximal d'annuités liquidables dans la pension civile, il y avait lieu d'assimiler les bonifications d'ancienneté à des services effectifs ;

Considérant que, pour rejeter la demande dont elle était saisie, la cour administrative d'appel, après avoir rappelé que la loi prévoit le maintien en activité sous réserve de l'intérêt du service, a énoncé que M. A n'établissait pas que l'intérêt du service justifiait son maintien en activité et en a déduit qu'il n'avait pas perdu une chance sérieuse de bénéficier d'une telle mesure ; qu'en jugeant ainsi, alors que l'administration n'avait à aucun moment invoqué devant les juges du fond des motifs tirés de l'intérêt du service qui auraient pu justifier le rejet d'une demande présentée en temps utile par l'intéressé, la cour a dénaturé les faits de l'espèce ; que M. A est dès lors fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice résultant pour lui de la perte d'une chance de bénéficier d'un maintien en activité ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme que M. A demande au titre des frais qu'il a exposés pour se pourvoir en cassation ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 19 février 2008 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé en tant qu'il rejette les conclusions tendant à l'indemnisation de la perte de chance de M. A de bénéficier d'un maintien en activité.

Article 2 : L'affaire est, dans cette mesure, renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. A est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée M. Ange A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 315425
Date de la décision : 26/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 26 mai. 2010, n° 315425
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vigouroux
Rapporteur ?: M. Emmanuel Vernier
Avocat(s) : HEMERY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:315425.20100526
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