Vu l'ordonnance du 13 avril 2010, enregistrée le 19 avril 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Bordeaux, avant qu'il soit statué sur l'appel de M. Philippe A tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2005, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions du 4 bis de l'article 158 du code général des impôts ;
Vu le mémoire, enregistré le 5 mars 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, présenté par M. A, demeurant ..., en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
Vu le code général des impôts, notamment le 4 bis de son article 158 ;
Vu la décision n° 89-268 DC du 29 décembre 1989 du Conseil constitutionnel ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, Auditeur,
- les conclusions de M. Laurent Olléon, rapporteur public ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat lui a transmis, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, un moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soulevée soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;
Considérant que M. A soutient qu'en ce qu'elles réservaient aux adhérents des centres de gestion et associations agréés le bénéfice de l'abattement de 20 % sur leurs bénéfices déclarés soumis à un régime réel d'imposition, sans prévoir leur application aux revenus d'un contribuable dont les comptes sont établis et certifiés par un expert comptable inscrit au tableau de l'ordre des experts comptables et commissaires aux comptes, les dispositions, alors en vigueur, du 4 bis de l'article 158 du code général des impôts méconnaissaient le principe d'égalité des contribuables devant les charges publiques ;
Considérant, en premier lieu, que les dispositions en cause sont applicables au présent litige, qui porte sur l'imposition des revenus de l'année 2005 ;
Considérant, en second lieu, que si, par sa décision n° 89-268 DC du 29 décembre 1989, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur la conformité à la Constitution des dispositions issues du III de l'article 100 de la loi de finances pour 1990, modifiant et complétant le 4 bis de l'article 158 du code général des impôts, en ce qu'elles prévoyaient, d'une part, que l'abattement accordé aux adhérents de centres ou d'associations de gestion agréés n'était pas appliqué lorsque la déclaration n'avait pas été souscrite par le contribuable dans les délais et qu'il s'agissait de la deuxième infraction successive concernant la même catégorie de déclaration et, d'autre part, que l'établissement de la mauvaise foi d'un adhérent entraînait la perte de l'abattement pour l'année au titre de laquelle le redressement était effectué, les dispositions du 4 bis de l'article 158 limitant le bénéfice de l'abattement sur les bénéfices déclarés aux seuls contribuables adhérents de centres ou d'associations de gestion agréés ne peuvent être regardées, au sens et pour l'application du 2° de l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, comme ayant déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;
Considérant toutefois, d'une part, qu'un moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité des contribuables devant les charges publiques ne pose pas de question nouvelle ; que, d'autre part, ainsi que le Conseil constitutionnel l'a relevé dans sa décision du 29 décembre 1989 mentionnée ci-dessus, les centres de gestion agréés ont été institués pour procurer à leurs adhérents une assistance technique en matière de tenue de la comptabilité et favoriser une meilleure connaissance des revenus non salariaux afin de remédier à l'évasion fiscale, qu'en contrepartie, l'adhésion à ces centres a été encouragée par l'octroi aux adhérents d'avantages fiscaux et notamment d'un abattement sur le bénéfice imposable, que les adhérents des centres sont ainsi soumis à un régime juridique spécifique et qu'il en va de même pour les adhérents des associations de gestion agréés ; qu'eu égard aux obligations auxquelles sont soumis ces organismes vis-à-vis de l'administration fiscale, les adhérents et les non adhérents des centres ou associations de gestion agréés se trouvaient dans une situation différente, au regard de l'objet de la loi, justifiant la différence de traitement que celle-ci avait instituée ; que, par suite, la question de la méconnaissance par ces dispositions législatives du principe d'égalité des contribuables devant les charges publiques ne présente pas un caractère sérieux ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que les dispositions du 4 bis de l'article 158 du code général des impôts portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe A, au Premier ministre et au ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et à la cour administrative d'appel de Bordeaux.