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02/06/2010 | FRANCE | N°339976

France | France, Conseil d'État, 02 juin 2010, 339976


Vu la requête, enregistrée le 27 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SARL AUSTIN, dont le siège est 14/16/18 rue du Commerce à Bordeaux (33000), et par Mme Dorothée A, demeurant ... ; la SARL AUSTIN et Mme A demandent au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 21 mai 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, rejeté sa demande tendant à la suspension de l'arrêté en date du 5 mai 2010 par lequel

le préfet de la Gironde a décidé la fermeture de l'établissement de nuit...

Vu la requête, enregistrée le 27 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SARL AUSTIN, dont le siège est 14/16/18 rue du Commerce à Bordeaux (33000), et par Mme Dorothée A, demeurant ... ; la SARL AUSTIN et Mme A demandent au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 21 mai 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux a, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, rejeté sa demande tendant à la suspension de l'arrêté en date du 5 mai 2010 par lequel le préfet de la Gironde a décidé la fermeture de l'établissement de nuit AUSTIN pour une durée d'un mois à compter de la notification intervenue le 11 mai 2010 ;

2°) de suspendre l'exécution de l'arrêté du préfet de la Gironde en date du 5 mai 2010 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elles soutiennent que l'urgence est caractérisée dès lors qu'en les privant de recette durant un mois, la fermeture administrative met en péril la continuité de l'exploitation, la pérennité de l'entreprise ainsi que l'emploi de ses dix salariés ; que le fait que Mme A assure la gérance d'un autre établissement est sans incidence sur les conséquences financières et sociales liées à la fermeture administrative ; qu'il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale dès lors que l'arrêté du préfet de la Gironde méconnaît la liberté d'entreprendre découlant de la liberté du commerce et de l'industrie ; qu'il est entaché d'illégalité en ce que, d'une part, le préfet pour la défense et la sécurité n'a pu légalement recevoir du préfet du département délégation lui conférant un pouvoir de sanction au regard des dispositions des articles R. 1311-17 et R. 1311-18 du code de la défense et que, d'autre part, il n'est aucunement justifié d'une quelconque délégation régulièrement donnée, publiée et exécutoire du préfet de la Gironde au préfet délégué pour la défense et la sécurité ; qu'il ne mentionne pas les nom et prénom du préfet de la Gironde en méconnaissance des dispositions de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ; que la décision attaquée est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'elle estime que l'arrêté précité est suffisamment motivé ; qu'aucun avertissement n'a été adressé à la SARL AUSTIN avant le prononcé de la mesure de fermeture en méconnaissance des dispositions de l'article L. 3332-15 alinéa 1 du code de la santé publique ; qu'en se fondant sur le rapport de police en date du 15 février 2010, rédigé plus d'un mois après le déroulement des faits et fondé sur des documents non communiqués, la décision contestée n'établit pas l'exactitude matérielle des faits ; que l'arrêté du préfet de la Gironde est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu de la disproportion entre la sanction et les faits reprochés ; que la décision attaquée est entachée d'une erreur de droit en ce que la mesure de fermeture, en intervenant six mois après les faits, n'est pas nécessaire au maintien de l'ordre public ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de la défense ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public (...) aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. ; qu'aux termes de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique : En cas d'atteinte à l'ordre public, à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publique, la fermeture peut être ordonnée par le représentant de l'Etat dans le département pour une durée n'excédant pas deux mois. ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, le juge des référés peut rejeter la requête par une ordonnance motivée, sans instruction contradictoire et sans audience publique, lorsqu'il apparaît manifeste qu'elle est mal fondée ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, d'une part, les nom et prénom du préfet pour la défense et la sécurité figurent expressément sur l'arrêté du 5 mai 2010, dont il est le signataire et que, d'autre part, l'intéressé disposait d'une délégation de signature du préfet de la Gironde en date du 31 mars 1010 préalablement publiée au recueil des actes administratifs du 8 mars au 5 avril 2010 ; que cette délégation vise explicitement les dispositions de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique sur lesquelles se fonde l'arrêté querellé ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'acte attaqué mentionne les dispositions de droit sur lesquelles il se fonde, notamment l'article L. 3332-15 du code de la santé publique, et expose, en se fondant sur le rapport dressé par les services de police du 15 février 2010, les faits à l'origine de la mesure de fermeture ne laissant ainsi aucune ambiguïté sur le fondement juridique qui le fonde tiré du trouble à l'ordre public ;

Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de ce que la mesure de fermeture aurait été prise sans avertissement préalable tel que prévu au 1er alinéa de l'article L. 3332-15, est inopérant dès lors qu'il ressort suffisamment de la motivation de l'arrêté, ainsi qu'il est dit ci-dessus, que le préfet a entendu, en mentionnant les graves troubles à l'ordre public, se fonder sur les dispositions du 2ème alinéa de ce même article ; qu'il ressort au demeurant des pièces du dossier que la requérante a été informée, par lettre du préfet délégué pour la défense et la sécurité en date du 22 mars 2010, que son établissement était susceptible de faire l'objet d'une mesure de fermeture administrative et a présenté ses observations par un courrier du 12 avril 2010 ;

Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier que pour prendre la mesure de fermeture administrative pour une durée d'un mois de l'établissement de nuit exploité par la SARL AUSTIN, le préfet de la Gironde s'est fondé sur l'implication du personnel de la SARL AUSTIN dans des violences volontaires aggravées à l'encontre d'un client ayant été surpris en train de commettre un vol dans l'établissement ; qu'ainsi qu'en atteste le rapport dressé par les services de police du 15 février 2010, le personnel de sécurité de la SARL AUSTIN a volontairement agressé l'auteur du vol, entraînant plusieurs points de sutures ainsi qu'une incapacité temporaire totale de six jours, et l'ont dépouillé de ses effets personnels avant de le mettre à la porte de l'établissement ; que les violences ont été confirmées par l'examen du médecin légiste ; que les membres du personnel en cause dans cette agression font actuellement l'objet de poursuites pénales ; qu'ainsi, pour les motifs relevés par le premier juge, l'arrêté préfectoral de fermeture d'un mois, qui n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation, n'est à l'évidence pas constitutif d'une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale seule susceptible de justifier la mise en oeuvre de la procédure de protection particulière instituée par l'article L. 521-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu, par application de la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative, de rejeter les conclusions de la requête de la SARL AUSTIN, ensemble la demande présentée au titre de l'article L. 761-1 du même code ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de la SARL AUSTIN et de Mme A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la SARL AUSTIN et à Mme A.

Copie pour information sera adressée au préfet de la Gironde.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 02 jui. 2010, n° 339976
Inédit au recueil Lebon
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Origine de la décision
Date de la décision : 02/06/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 339976
Numéro NOR : CETATEXT000022364708 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-06-02;339976 ?
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