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11/06/2010 | FRANCE | N°339494

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 11 juin 2010, 339494


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 14 mai 2010, présentée pour la société RECKITT BENCKISER HEALTHCARE FRANCE, dont le siège est situé 15, rue Ampère à Massy Cedex (91748), représentée par son représentant légal ; la société RECKITT BENCKISER HEALTHCARE FRANCE demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision du 9 avril 2010 du directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie fixant à 85% le taux de participation de l'assuré aux frais d'acq

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Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 14 mai 2010, présentée pour la société RECKITT BENCKISER HEALTHCARE FRANCE, dont le siège est situé 15, rue Ampère à Massy Cedex (91748), représentée par son représentant légal ; la société RECKITT BENCKISER HEALTHCARE FRANCE demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision du 9 avril 2010 du directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie fixant à 85% le taux de participation de l'assuré aux frais d'acquisition des spécialités GAVISCON, 10 ml en sachet-dose, suspension buvable, GAVISCON, flacon de 250 ml, suspension buvable et GAVISCON, comprimés à croquer ;

2°) de mettre à la charge de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie et de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que plusieurs moyens sont susceptibles de créer un doute sérieux quant à la légalité des décisions contestées ; qu'en effet, la lettre de notification de la décision attaquée est insuffisamment motivée en fait, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 163-14 du code de la sécurité sociale ; que la décision en date du 11 février 2010 par laquelle l'Union nationale des caisses d'assurance maladie a fixé le taux de participation de l'assuré à 85% pour les médicaments à service médical rendu faible est irrégulière, dès lors qu'elle n'a pas été transmise au ministre de la santé, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 322-9-4 du code de la sécurité sociale ; que l'avis en date du 13 mai 2009 par lequel la commission de la transparence a réévalué le service médical rendu par les spécialités GAVISCON comme faible est entaché d'un défaut de motivation et d'une erreur manifeste dans l'appréciation du service médical rendu ; que l'urgence est caractérisée, dès lors que l'exécution de la décision porte une atteinte grave et immédiate aux finances publiques, à la protection de la santé publique et cause un préjudice financier à la société RECKITT BENCKISER HEALTHCARE FRANCE ;

Vu la décision dont la suspension est demandée ;

Vu la copie de la requête en annulation présentée contre cette décision ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2010, présenté pour l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM), qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société RECKITT BENCKISER HEALTHCARE FRANCE sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que la réduction du taux de prise en charge par l'assurance maladie des spécialités dont le service médical rendu est faible répond à un motif d'intérêt général ; que la décision attaquée ne porte pas atteinte à la protection de la santé publique, dès lors qu'elle n'a pas pour effet un report de prescriptions vers une spécialité non adaptée ; que la société requérante n'établit pas le préjudice économique et financier qu'elle allègue ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée est inopérant, dès lors que cette décision n'est pas soumise à une obligation de motivation ; que le moyen tiré du défaut de transmission de la décision du 11 février 2010 au ministre de la santé manque en fait ; que les moyens tirés de l'illégalité externe de la décision contestée et de l'avis de la commission de transparence sont inopérants dès lors que la décision a été prise dans l'exercice d'une compétence liée ; que l'avis de la commission de transparence du 13 mai 2009 est suffisamment motivé puisque le laboratoire n'a fourni aucune nouvelle donnée et qu'elle renvoie aux recommandations de bonnes pratiques publiées par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) ; que la commission de transparence n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il ressort des recommandations de l'AFSSAPS que la spécialité GAVISCON n'est recommandée que pour le traitement de symptômes typiques et espacés ;

Vu les observations, enregistrées le 3 juin 2010, présentées par le ministre de la santé et des sports ;

Vu les observations, enregistrées le 3 juin 2010, présentées par la Haute autorité de santé ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 7 juin 2010, présenté pour la société RECKITT BENCKISER FRANCE, qui reprend les conclusions et les moyens de la requête ; elle soutient en outre que la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article R. 163-10-1 du code de la sécurité sociale, dès lors qu'elle est intervenue plus de quinze jours après la réception par l'UNCAM de l'avis de la commission de transparence ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part la société RECKITT BENCKISER HEALTHCARE FRANCE et, d'autre part, l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, le ministre de la santé et des sports et la Haute autorité de santé ;

Vu le procès-verbal de l'audience du 8 juin 2010 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Monod, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la société RECKITT BENCKISER HEALTHCARE France;

- les représentants de la société RECKITT BENCKISER HEALTHCARE FRANCE ;

- Me Baraduc, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie ;

- les représentants de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie ;

- les représentants du ministre de la santé et des sports;

- les représentants de la Haute autorité de santé ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a décidé de prolonger l'instruction jusqu'au 10 juin 2010 à 18 heures ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 9 juin 2010, présenté pour la société RECKITT BENCKISER HEALTHCARE FRANCE, qui reprend les conclusions et les moyens de la requête et produit de nouvelles pièces ;

Vu les observations, enregistrées le 10 juin 2010, présentées par le ministre de la santé et des sports ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 10 juin 2010, présenté pour l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, qui fait valoir que les pièces produites par la requérante n'établissent pas l'existence d'une situation d'urgence ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la possibilité pour le juge des référés d'ordonner la suspension de l'exécution d'une décision administrative est subordonnée notamment à la condition qu'il y ait urgence ; qu'il lui appartient d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à porter à sa situation ou à un intérêt public une atteinte suffisamment grave et immédiate pour caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ;

Considérant qu'en application du 14° de l'article R. 322-1 du code de la sécurité sociale, le taux de participation de l'assuré aux frais d'acquisition des médicaments dont le service médical rendu a été classé comme faible est fixé entre 80 et 90 % du tarif servant de base au calcul des prestations en nature de l'assurance maladie ; que, par une décision du 11 février 2010, le conseil de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (UNCAM) a fixé ce taux à 85% ; que, par la décision contestée du 9 avril 2010, le directeur général de l'UNCAM a appliqué ce taux aux spécialités GAVISCON, 10 ml en sachet-dose, suspension buvable, GAVISCON, flacon de 250 ml, suspension buvable et GAVISCON, comprimés à croquer, spécialités de la classe pharmaceutique des alginates et prescrites dans le traitement des symptômes du reflux gastro-oesophagien, qui sont exploitées par la société RECKITT BENCKISER HEALTHCARE FRANCE ;

Considérant que, pour établir l'existence d'une situation d'urgence, la société requérante fait valoir, d'une part, qu'une somme plus importante restant à la charge de l'assuré, un report de prescriptions sera constaté vers des médicaments appartenant à la famille des inhibiteurs de la pompe à protons, qui ne sont pas adaptés à la pathologie et dont le taux de remboursement par l'assurance maladie est de 65%, portant ainsi atteinte aux intérêts de la santé publique et des finances publiques, d'autre part, que le report de prescriptions et l'absence de remboursement de la part incombant à l'assuré par les mutuelles occasionneront une baisse des ventes des spécialités en cause, qui représentaient jusque là environ un tiers de son chiffre d'affaires et se caractérisaient par une rentabilité importante ;

Considérant, toutefois, que l'instruction n'a pas permis d'établir que l'exécution de la décision aurait, de façon suffisamment immédiate, des effets significatifs en termes de baisse des ventes ou de report de prescriptions vers des médicaments appartenant à la famille des inhibiteurs de la pompe à protons, ces derniers ne traitant pas des symptômes identiques ; qu'ainsi, alors même que la rentabilité du GAVISCON est élevée et que les ventes de ce médicament représentent une part importante du chiffre d'affaires de la société requérante, il ne ressort pas des éléments versés au dossier que l'exécution de la décision contestée aurait pour effet de compromettre son résultat financier ; qu'en outre, pour la même raison, l'atteinte aux intérêts de la santé publique n'est pas caractérisée non plus que, en tout état de cause, à ceux des finances publiques ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la condition d'urgence ne peut être regardée comme remplie ; qu'il y a lieu, en conséquence, de rejeter l'ensemble des conclusions de la requête, y compris celles présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E :

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Article 1 : La requête de la société RECKITT BENCKISER HEALTHCARE FRANCE est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société RECKITT BENCKISER HEALTHCARE FRANCE, à l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, au ministre de la santé et des sports et à la Haute autorité de santé.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 339494
Date de la décision : 11/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 jui. 2010, n° 339494
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Jacques Arrighi de Casanova
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN ; SCP BARADUC, DUHAMEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:339494.20100611
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