Vu le pourvoi, enregistré le 21 octobre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. Kamel A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 9 octobre 2009 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, statuant sur le fondement des articles L. 521-2 et L. 522-3 du code de justice administrative, a rejeté ses conclusions tendant à la suspension de la décision d'éloignement du territoire français prise par le préfet de la Haute Garonne le 7 octobre 2009, de la décision du 8 octobre 2009 le plaçant en rétention administrative et de celle fixant le pays de renvoi ;
2°) statuant en référé, d'enjoindre à l'Etat de suspendre l'exécution de l'éloignement du requérant en Algérie et de lui permettre son retour ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code pénal ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Francis Girault, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Bouthors, avocat de M. Kamel A,
- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Bouthors, avocat de M. Kamel A ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. A, ressortissant algérien, a été condamné à deux mois d'emprisonnement avec sursis et à une interdiction du territoire français pour une durée de dix ans par un arrêt du 10 avril 2009 de la cour d'appel de Versailles ; que le préfet de la Haute-Garonne, par décisions du 8 octobre 2009, a fixé le pays de destination en application de cette interdiction du territoire et l'a placé en rétention administrative ; que, saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, par ordonnance en date du 9 octobre 2009 prise en application de l'article L. 522-3 du même code, a rejeté la demande de M. A tendant à la suspension de ces décisions ; que M. A se pourvoit contre cette ordonnance ;
Sur le pourvoi en tant qu'il est dirigé contre l'ordonnance en tant qu'elle se prononce sur la mesure de rétention administrative :
Considérant qu'en application des articles L. 551-1 et L. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le placement en rétention d'un étranger peut être ordonné, par l'autorité administrative, lorsque cet étranger, faisant l'objet d'une mesure d'éloignement, ne peut quitter immédiatement le territoire français ; que le maintien en centre de rétention affecte la liberté individuelle de la personne qui en fait l'objet ; que, pour cette raison, au terme d'un délai de quarante-huit heures en centre de rétention, l'article L. 552-1 du même code prévoit que le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance est saisi aux fins de prolongation de la rétention et, en vertu de l'article L. 552-3, l'ordonnance de prolongation de la rétention court à compter de l'expiration d'un délai de quarante-huit heures ; qu'il résulte de ces dispositions que la décision de l'autorité administrative ordonnant le placement en rétention ne peut produire effet que pendant quarante-huit heures et, qu'au terme de ce délai, seule une décision de l'autorité judiciaire peut maintenir un étranger en rétention ; que, par suite, les pouvoirs du juge administratif cessent dès l'expiration du délai de quarante-huit heures de rétention à l'issue duquel seul le juge judiciaire est compétent et les conclusions à fin de suspension dirigées contre la mesure de placement en rétention perdent leur objet ; que les conclusions par lesquelles M. A se pourvoit contre l'ordonnance contestée en tant qu'elle a rejeté sa demande de suspension de la mesure de rétention sont sans objet et donc irrecevables ;
Sur le pourvoi en tant qu'il est dirigé contre l'ordonnance en tant qu'elle se prononce sur la mesure fixant le pays de renvoi :
Considérant qu'aux termes de l'article 569 du code de procédure pénale : Pendant les délais du recours en cassation et, s'il y a eu recours, jusqu'au prononcé de l'arrêt de la Cour de cassation, il est sursis à l'exécution de l'arrêt de la cour d'appel (...) ;
Considérant qu'en se fondant sur la mise à exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles condamnant M. A, à titre principal, à une peine de deux mois d'emprisonnement avec sursis et à titre complémentaire à une interdiction du territoire français pour une durée de 10 ans, pour écarter l'atteinte grave à une liberté fondamentale, tout en relevant que cette décision avait fait l'objet d'un pourvoi en cassation, alors que ce pourvoi prive de son caractère exécutoire l'arrêt, y compris en ce qu'il prononce une peine complémentaire, le juge des référés du tribunal administratif a commis une erreur de droit ; que, par suite, les conclusions de M. A contre cette mesure n'ayant pas perdu leur objet quand bien même il aurait été reconduit dans son pays, l'ordonnance en date du 9 octobre 2009 doit être annulée en tant qu'elle se prononce sur la décision du préfet de la Haute-Garonne fixant le pays de renvoi de M. A ;
Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler dans cette mesure l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par M. A ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la Cour de cassation a rejeté le 8 juillet 2009 le pourvoi de M. A contre l'arrêt du 10 avril 2009 de la cour d'appel de Versailles prononçant à son encontre une interdiction du territoire français pour une durée de dix ans ; que cet arrêt était ainsi exécutoire lorsque le préfet de la Haute-Garonne a pris la décision contestée le 8 octobre 2009 ; que dans ces conditions, la mise en oeuvre de cette interdiction ne constitue pas en soi une atteinte manifestement illégale à une liberté fondamentale, telle que le droit au respect d'une vie familiale normale ou la liberté d'aller et venir invoqués par le requérant, en l'absence de circonstances particulières susceptibles d'affecter gravement une liberté fondamentale de M. A, une fois celui-ci retourné dans son pays d'origine ; qu'il ne peut soutenir qu'il aurait été privé de l'exercice d'un droit au recours ni se prévaloir, en tout état de cause, d'une méconnaissance du principe de confiance légitime ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander la suspension de l'exécution de la décision du préfet de la Haute-Garonne en date du 8 octobre 2009 fixant l'Algérie comme pays de renvoi ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes demandées par M. A ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 9 octobre 2009 du juge des référés du tribunal administratif de Toulouse est annulée en tant qu'elle rejette la demande de M. A tendant à la suspension de la décision du 8 octobre 2009 fixant le pays de renvoi.
Article 2 : Le surplus des conclusions du pourvoi et la demande de M. A présentée au tribunal administratif de Toulouse tendant à la suspension de la décision du 8 octobre 2009 fixant le pays de renvoi sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Monsieur Kamel A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.