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21/06/2010 | FRANCE | N°335035

France | France, Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 21 juin 2010, 335035


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés le 28 décembre 2009 et le 5 mars 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. M'barek A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 7 septembre 2009 du consul général de France à Casablanca refusant un visa d'entrée et de long séjour en France à son neveu, M. Mohamed A, en qualité de membre de famille

d'un ressortissant français ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'immigrati...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés le 28 décembre 2009 et le 5 mars 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. M'barek A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 7 septembre 2009 du consul général de France à Casablanca refusant un visa d'entrée et de long séjour en France à son neveu, M. Mohamed A, en qualité de membre de famille d'un ressortissant français ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de délivrer le visa sollicité dans un délai d'un mois en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de visa en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yves Doutriaux, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant que M. A, de nationalité française, conteste le rejet implicite du recours qu'il a formé devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France à l'encontre de la décision du consul général de France à Casablanca refusant la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en France à son neveu Mohammed A, de nationalité marocaine, né le 15 février 2004, recueilli légalement par M. et Mme A en vertu d'un acte de kafala établi le 15 avril 2009, homologué par jugement du juge résident de Dar Old Zidouh du tribunal de première instance de Fquih Ben Salah en date du 6 mai 2009 ;

Considérant que l'intérêt d'un enfant est, en principe, de vivre auprès de la personne qui, en vertu d'une décision de justice qui produit des effets juridiques en France, est titulaire à son égard de l'autorité parentale ; qu'ainsi, dans le cas où un visa d'entrée et de long séjour en France est sollicité en vue de permettre à un enfant de rejoindre un ressortissant français ou étranger qui a reçu délégation de l'autorité parentale dans les conditions qui viennent d'être indiquées, ce visa ne peut en règle générale, eu égard notamment aux stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant, être refusé pour un motif tiré de ce que l'intérêt de l'enfant serait au contraire de demeurer auprès de ses parents ou d'autres membres de sa famille ; qu'en revanche, et sous réserve de ne pas porter une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, l'autorité chargée de la délivrance des visas peut se fonder, pour rejeter la demande dont elle est saisie, non seulement sur l'atteinte à l'ordre public qui pourrait résulter de l'accès de l'enfant au territoire national, mais aussi sur le motif tiré de ce que les conditions d'accueil de celui-ci en France seraient, compte tenu notamment des ressources et des conditions de logement du titulaire de l'autorité parentale, contraires à son intérêt ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si l'enfant Mohammed A a toujours vécu au Maroc, le requérant, qui justifie de ressources et de conditions d'accueil suffisantes, dispose, en vertu d'un acte de kafala homologué par jugement, d'une délégation d'autorité parentale, exécutoire de plein droit en France, pour prendre toutes mesures de tutelle et de prise en charge de cet enfant ; qu'ainsi, en l'absence de circonstances particulières, en estimant que l'intérêt de l'enfant était de demeurer dans son pays d'origine auprès de ses parents, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A est fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que, eu égard aux motifs de la présente décision, il y a lieu de faire droit aux conclusions de M. A et de prescrire au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de réexaminer, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, un visa d'entrée et de long séjour au jeune Mohammed A ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours de M. A contre la décision implicite du consul général de France à Casablanca refusant à son neveu, M. Mohammed A, un visa d'entrée et de long séjour en France est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de faire délivrer, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, un visa d'entrée et de long séjour en France à Mohammed A.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. M'Barek A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 21 jui. 2010, n° 335035
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: M. Yves Doutriaux
Rapporteur public ?: Mme Bourgeois-Machureau Béatrice

Origine de la décision
Formation : 2ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 21/06/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 335035
Numéro NOR : CETATEXT000022413148 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-06-21;335035 ?
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