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07/07/2010 | FRANCE | N°318139

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 07 juillet 2010, 318139


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juillet et 12 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION AJACCIENNE D'AIDE AUX HANDICAPES, dont le siège est Foyer Funtanella, route d'Alata, Fontaine des Prêtres à Ajaccio (20000), représentée par son président ; l'association demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 7 mai 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 24 mai 2006 du tribunal administratif

de Bastia ayant annulé la décision du 18 mai 2005 du ministre de l'em...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juillet et 12 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION AJACCIENNE D'AIDE AUX HANDICAPES, dont le siège est Foyer Funtanella, route d'Alata, Fontaine des Prêtres à Ajaccio (20000), représentée par son président ; l'association demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 7 mai 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 24 mai 2006 du tribunal administratif de Bastia ayant annulé la décision du 18 mai 2005 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale qui avait rejeté le recours de M. A à l'encontre de la décision du 22 novembre 2004 de l'inspecteur du travail de la Corse du Sud autorisant son licenciement, d'autre part, au rejet de la demande de première instance de M. A ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ;

3°) de mettre à la charge de M. A la somme de 4 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Bethânia Gaschet, Auditeur,

- les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de l'ASSOCIATION AJACCIENNE D'AIDE AUX HANDICAPES et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. Daniel A,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public,

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de l'ASSOCIATION AJACCIENNE D'AIDE AUX HANDICAPES et à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. Daniel A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par lettre du 30 juin 2004, l'ASSOCIATION AJACCIENNE D'AIDE AUX HANDICAPES a demandé une première fois à l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier pour faute M. A, salarié protégé et directeur de l'établissement A Funtarella dont elle assure la gestion ; que cette demande a été rejetée par une décision du 23 août 2004 ; qu'à la suite de ce refus, l'association requérante a engagé une deuxième procédure de licenciement à l'encontre de M. A et l'a convoqué, par lettre du 2 septembre 2004, à un nouvel entretien préalable prévu le 14 septembre 2004 ; que, par deux notes d'information datées du 7 septembre 2004, donc antérieures à cet entretien, adressées respectivement aux résidents de l'établissement A Funtarella et à leurs familles et au personnel de cet établissement, le président de l'association requérante a indiqué que le bureau de l'association avait décidé le licenciement du directeur ; que, par une décision du 22 novembre 2004, l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de M. A ; que cette décision a été confirmée par le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale par une décision du 18 mai 2005 ; que l'association requérante se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 7 mai 2008 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a confirmé le jugement du 24 mai 2006 du tribunal administratif de Marseille ayant annulé cette dernière décision ;

Considérant, en premier lieu, qu'en jugeant que l'édiction des notes d'information du 7 septembre 2004 avait entaché la deuxième procédure de licenciement de M. A d'irrégularité, la cour a par là-même écarté le moyen de l'association requérante tiré de ce que ces notes concernaient la première procédure de licenciement et non la deuxième ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la cour aurait entaché son arrêt d'irrégularité en ne visant pas ce moyen et en n'y répondant pas doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 122-14 du code du travail alors en vigueur, aujourd'hui repris notamment aux articles L. 1232-2 et L. 1232-3 de ce code : L'employeur qui envisage de licencier un salarié doit, avant toute décision, convoquer l'intéressé par lettre recommandée en lui indiquant l'objet de la convocation. (...) Au cours de l'entretien, l'employeur est tenu d'indiquer le ou les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié ; que la cour a jugé, par une appréciation souveraine des pièces du dossier qui lui était soumis, que les notes d'information du 7 septembre 2004 révélaient que la décision de licencier M. A était prise avant l'entretien préalable à ce licenciement ; qu'elle a pu en déduire, sans commettre d'erreur de droit, que cette circonstance privait cet entretien de toute portée utile et entachait par conséquent d'irrégularité la procédure préalable au licenciement de M. A ;

Considérant, en troisième lieu, qu'à supposer que la cour administrative d'appel ait mentionné à tort que contrairement à ce que soutient l'association appelante , il appartient à l'autorité administrative de vérifier la régularité de la procédure préalable, cette circonstance est sans incidence sur la régularité et le bien-fondé de l'arrêt attaqué ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'en jugeant que les conclusions présentées par l'association requérante tendant à ce que l'Etat soit condamné à la garantir des condamnations qui pourront être prononcées étaient irrecevables dans le cadre du recours pour excès de pouvoir dont elle était saisie, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi de l'ASSOCIATION AJACCIENNE D'AIDE AUX HANDICAPES doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à sa charge, en application de ces mêmes dispositions, la somme de 3 000 euros à verser à M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de l'ASSOCIATION AJACCIENNE D'AIDE AUX HANDICAPES est rejeté.

Article 2 : L'ASSOCIATION AJACCIENNE D'AIDE AUX HANDICAPES versera à M. A une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION AJACCIENNE D'AIDE AUX HANDICAPES, à M. Daniel A.

Copie en sera adressée pour information au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-02-01 TRAVAIL ET EMPLOI. LICENCIEMENTS. AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIÉS PROTÉGÉS. PROCÉDURE PRÉALABLE À L'AUTORISATION ADMINISTRATIVE. ENTRETIEN PRÉALABLE. - EMPLOYEUR ANNONÇANT PUBLIQUEMENT SA DÉCISION DE LICENCIER UN SALARIÉ PROTÉGÉ AVANT LA TENUE DE L'ENTRETIEN PRÉALABLE - IRRÉGULARITÉ SUBSTANTIELLE - EXISTENCE - CONSÉQUENCE - ILLÉGALITÉ DE L'AUTORISATION DE LICENCIEMENT [RJ1].

66-07-01-02-01 En vertu de l'article L. 122-14 du code du travail alors en vigueur, repris aux articles L. 1232-2 et L. 1232-3 du même code, l'employeur qui envisage de licencier un salarié doit, avant toute décision, convoquer l'intéressé à un entretien, au cours duquel il lui indique les motifs de la décision qu'il envisage et recueille les explications du salarié. Ces dispositions sont méconnues lorsque l'employeur annonce par des notes d'information adressées au personnel et aux usagers de l'établissement sa décision de licencier le salarié, avant la tenue de cet entretien. Cette irrégularité de procédure revêt un caractère substantiel et fait ainsi obstacle à ce que l'administration autorise le licenciement de ce salarié.


Références :

[RJ1]

Rappr. Cass. soc., 29 octobre 2003, Société Desiper c/ Couton, n° 01-44354 ;

sur le non-respect du délai de cinq jours ouvrables entre la convocation et l'entretien, 20 mars 2009, Société Armor, n° 312258, T. p. 977 ;

sur l'absence de mention dans la convocation de la faculté qu'a le salarié de se faire assister, Section, 19 décembre 1984, Société Mapac, n° 48460, p. 439.


Publications
Proposition de citation: CE, 07 jui. 2010, n° 318139
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: Mme Bethânia Gaschet
Rapporteur public ?: Mme Dumortier Gaëlle
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ ; SCP GATINEAU, FATTACCINI

Origine de la décision
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Date de la décision : 07/07/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 318139
Numéro NOR : CETATEXT000022749562 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-07-07;318139 ?
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