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07/07/2010 | FRANCE | N°328388

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 07 juillet 2010, 328388


Vu le pourvoi, enregistré le 28 mai 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 26 mars 2009 par lequel le tribunal administratif de Rouen a déchargé M. Michel-Edouard Doucet de l'obligation de payer la somme de 1 113,73 euros correspondant, à hauteur de 1 081,73 euros, à des indus sur des sommes versées sur la période du 10 au 30 novembre 1998 et, à hauteur de 32 euros, aux frais de l'établissement du

titre exécutoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu ...

Vu le pourvoi, enregistré le 28 mai 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 26 mars 2009 par lequel le tribunal administratif de Rouen a déchargé M. Michel-Edouard Doucet de l'obligation de payer la somme de 1 113,73 euros correspondant, à hauteur de 1 081,73 euros, à des indus sur des sommes versées sur la période du 10 au 30 novembre 1998 et, à hauteur de 32 euros, aux frais de l'établissement du titre exécutoire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code du travail ;

Vu la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Francine Mariani-Ducray, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

Considérant que les écritures de M. A, qui ont été présentées sans le ministère d'un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, bien que l'intéressé ait été informé de l'obligation de recourir à ce ministère, doivent être écartées des débats ;

Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a déchargé M. A, qui avait cessé d'exercer des fonctions d'enseignement dans des établissements d'enseignement privé, puis avait été demandeur d'emploi, de l'obligation de payer, en application d'un commandement de payer notifié le 18 décembre 2004, une somme de 1 113,73 euros, égale à un trop-perçu de 1 081,73 euros d'allocation d'assurance-chômage qui lui avait été versée dans la période du 10 au 30 novembre 1998, alors qu'il avait retrouvé une fonction de maître auxiliaire, et aux frais d'établissement d'un titre de perception ;

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles L. 351-1, L. 351-3 et L. 351-12 du code du travail, alors en vigueur, M. A, en qualité d'agent non fonctionnaire de l'Etat devenu demandeur d'emploi, a bénéficié du versement par l'Etat de l'allocation d'assurance attribuée aux travailleurs involontairement privés d'emploi, aptes au travail et recherchant un emploi ;

Considérant que, pour demander l'annulation du jugement du tribunal administratif, le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT soutient que la répétition de l'indu sur des allocations pour perte d'emploi versées mensuellement, recherchée à l'encontre de M. A, était soumise à la prescription trentenaire prévue par les dispositions de l'article 2262 du code civil alors applicables, aux termes desquelles toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans (...) , et non à la prescription abrégée de cinq ans sur laquelle s'est fondé le tribunal administratif, prévue par les dispositions de l'article 2277 de ce code, alors en vigueur, aux termes desquelles se prescrivent par cinq ans les actions en paiement : des salaires (...), et généralement de tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts ; que l'action en répétition des sommes indûment versées au titre de l'allocation d'assurance chômage n'est pas au nombre des actions en répétition soumises à la prescription abrégée prévue par ces dispositions ; qu'ainsi le ministre est fondé à soutenir que le tribunal administratif, en annulant le commandement de payer litigieux sur le fondement de la prescription quinquennale abrégée, a entaché son jugement d'erreur de droit ; que le jugement attaqué doit donc être annulé ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 351-6-2 du code du travail issu de l'article 4 de la loi du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel : L'action en répétition de l'allocation d'assurance indûment versée se prescrit, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, par trois ans (...) ; que, d'une part, ces dispositions sont applicables à l'action en répétition de l'allocation prévue au bénéfice des agents non fonctionnaires de l'Etat involontairement privés d'emploi ; que, d'autre part, lorsque la loi réduit la durée d'une prescription, la prescription réduite commence à courir, sauf disposition contraire, du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que sa durée totale puisse excéder le délai prévu par la loi antérieure ;

Considérant qu'à la date du commandement de payer litigieux notifié le 18 décembre 2004 par le trésorier-payeur général de la Seine-Maritime, plus de trois ans s'étaient écoulés depuis l'entrée en vigueur de la loi du 17 juillet 2001 ; que la créance de l'Etat à l'encontre de M. A était donc prescrite ; que le commandement de payer litigieux étant dès lors privé de fondement, il y a lieu de faire droit à la demande de M. Doucet tendant à être déchargé de l'obligation de payer la somme de 1 113,73 euros qui lui était réclamée ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du 26 mars 2009 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : M. A est déchargé de l'obligation de payer la somme de 1 113,73 euros faisant l'objet du commandement de payer notifié le 18 décembre 2004 par le trésorier-payeur général de la Seine-Maritime.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT et à M. Michel-Edouard A.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COMPTABILITÉ PUBLIQUE ET BUDGET - CRÉANCES DES COLLECTIVITÉS PUBLIQUES - RECOUVREMENT - ACTION EN RÉCUPÉRATION DES ALLOCATIONS CHÔMAGE VERSÉES AUX AGENTS NON FONCTIONNAIRES DE L'ETAT (ART - L - 351-1 - L - 351-3 ET L - 351-12 DU CODE DU TRAVAIL ALORS EN VIGUEUR) - PRESCRIPTION TRIENNALE SAUF EN CAS DE FRAUDE OU DE FAUSSE DÉCLARATION (L - 351-6-2 DU MÊME CODE).

18-03-02 L'action en répétition de l'allocation prévue par les dispositions des articles L. 351-1, L. 351-3 et L. 351-12 du code du travail alors en vigueur (devenus respectivement les articles L. 5421-1, L. 5422-1 et L. 5424-1 de ce code) au bénéfice des agents non fonctionnaires de l'Etat involontairement privés d'emploi est soumise à la prescription triennale prévue à l'article L. 351-6-2 du code du travail alors en vigueur, devenu l'article L. 5422-5 du même code, sauf fraude ou fausse déclaration. Erreur de droit du tribunal administratif à avoir appliqué la prescription de cinq ans prévue à l'article 2277 du code civil.

TRAVAIL ET EMPLOI - POLITIQUES DE L'EMPLOI - INDEMNISATION DES TRAVAILLEURS PRIVÉS D'EMPLOI - ACTION EN RÉCUPÉRATION DES ALLOCATIONS CHÔMAGE VERSÉES AUX AGENTS NON FONCTIONNAIRES DE L'ETAT (ART - L - 351-1 - L - 351-3 ET L - 351-12 DU CODE DU TRAVAIL ALORS EN VIGUEUR) - PRESCRIPTION TRIENNALE (L - 351-6-2 DU MÊME CODE).

66-10-02 L'action en répétition de l'allocation prévue au bénéfice des agents non fonctionnaires de l'Etat involontairement privés d'emploi est soumise à la prescription triennale prévue à l'article L. 351-6-2 du code du travail alors en vigueur, devenu l'article L. 5422-4 du même code. Erreur de droit du tribunal administratif à avoir appliqué la prescription de cinq ans prévue à l'article 2277 du code civil.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 07 jui. 2010, n° 328388
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Francine Mariani-Ducray
Rapporteur public ?: Mme Dumortier Gaëlle

Origine de la décision
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Date de la décision : 07/07/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 328388
Numéro NOR : CETATEXT000022487041 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-07-07;328388 ?
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