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23/07/2010 | FRANCE | N°320733

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 23 juillet 2010, 320733


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 septembre 2008 et 12 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mlle Minette Ndundu A, demeurant ... ; Mlle A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 11 décembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation d'une part, du jugement du 5 juillet 2006 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 27 janvier 2004 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refu

sé de lui délivrer un titre de séjour, d'autre part, de cet arrêté ;

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Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 septembre 2008 et 12 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mlle Minette Ndundu A, demeurant ... ; Mlle A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 11 décembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation d'une part, du jugement du 5 juillet 2006 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 27 janvier 2004 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, d'autre part, de cet arrêté ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel et d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer le titre de séjour demandé ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 3000 euros sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Chavanat, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de Mlle A,

- les conclusions de M. Cyril Roger-Lacan, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de Mlle A ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mlle A, ressortissante de la République démocratique du Congo née en France le 4 juin 1986, après avoir séjourné dans son pays d'origine entre 1990 et 2003, est rentrée en France en juin 2003 pour y rejoindre sa mère qui y réside ; qu'elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour, qui lui a été refusée par un arrêté du préfet du Val-de-Marne du 27 janvier 2004 ; que, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Paris a confirmé le jugement du tribunal administratif de Melun qui avait rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Considérant que, pour rejeter l'appel de Mlle A, la cour a relevé que celle-ci est partie dans son pays d'origine à l'âge de quatre ans avec son père ; qu'elle est revenue vivre sur le territoire national auprès de sa mère en juin 2003 à la suite du décès de sa tante maternelle (...) qui l'avait recueillie après la disparition de son père ; qu'en déduisant de ces faits, qui par eux-mêmes ne peuvent exclure la persistance des liens attachant l'enfant mineure à sa mère, que dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la brève durée du séjour de l'intéressée à la date de la décision attaquée, le préfet du Val de Marne n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise , la cour administrative d'appel a fait une inexacte application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, Mlle A est fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle A est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Melun a refusé d'annuler l'arrêté du 27 janvier 2004 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de délivrer un titre de séjour ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, cette annulation implique nécessairement la délivrance à Mlle A du titre de séjour qu'elle sollicite ; que, dès lors, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre à l'autorité compétente de délivrer ce titre de séjour à l'intéressée dans un délai d'un mois suivant la notification de la présente décision ; qu'il n'y a en revanche pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Considérant enfin qu'il y a lieu, sous réserve que la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de Mlle A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cette société de la somme de 3000 euros en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 11 décembre 2007 de la cour administrative d'appel de Paris, le jugement du 5 juillet 2006 et l'arrêté préfectoral du 27 janvier 2004 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint à l'autorité compétente de faire délivrer à Mlle A le titre de séjour sollicité, dans un délai d'un mois suivant la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de Mlle A, une somme de 3000 euros en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de Mlle A est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée Mlle Minette Ndundu A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 23 jui. 2010, n° 320733
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Bruno Chavanat
Rapporteur public ?: M. Roger-Lacan Cyril
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Date de la décision : 23/07/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 320733
Numéro NOR : CETATEXT000022512970 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-07-23;320733 ?
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