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23/07/2010 | FRANCE | N°325724

France | France, Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 23 juillet 2010, 325724


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 mars et 2 juin 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Patrick B, demeurant ... ; M. B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 23 décembre 2008 du tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 novembre 2005 du maire de la commune de Sallanches s'opposant aux travaux déclarés ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Sallanc

hes le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 mars et 2 juin 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Patrick B, demeurant ... ; M. B demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 23 décembre 2008 du tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 novembre 2005 du maire de la commune de Sallanches s'opposant aux travaux déclarés ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Sallanches le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Brouchot, avocat de M. B,

- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Brouchot, avocat de M. B ;

Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de M. B tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 novembre 2005 par lequel le maire de Sallanches (Haute-Savoie) s'est opposé aux travaux qu'il avait déclarés, consistant en l'ouverture de cinq fenêtres et quatre velux en partie haute sur un immeuble lui appartenant ;

Considérant que le deuxième alinéa de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée, dispose que le permis de construire est exigé, sous réserve des articles L. 422-1 à L. 422-5, (...) pour les travaux exécutés sur les constructions existantes, lorsqu'ils ont pour effet d'en changer la destination, de modifier leur aspect extérieur ou leur volume ou de créer des niveaux supplémentaires ; qu'aux termes de l'article L. 422-1, dans sa rédaction alors en vigueur, sont exemptés du permis de construire (...) les constructions ou travaux dont la faible importance ne justifie pas l'exigence d'un permis de construire. / Un décret en Conseil d'Etat précise la nature et l'importance des constructions, travaux et installations exemptés. (...) ; qu'en application de cette disposition, le m) de l'article R. 422-2 exempte de permis de construire les travaux n'ayant pas pour effet de changer la destination d'une construction existante et qui n'ont pas pour effet de créer une surface de plancher nouvelle ou qui ont pour effet de créer, sur un terrain supportant déjà un bâtiment, une surface de plancher hors oeuvre brute inférieure ou égale à 20 mètres carrés ;

Considérant que, pour apprécier le respect de ces dispositions, le juge doit rechercher si les travaux d'aménagement d'une construction existante ont pour effet de changer, ne serait-ce que partiellement, la destination de cette construction au sens du code de l'urbanisme ;

Considérant qu'en se bornant à relever qu'il y avait changement de destination des locaux en se fondant uniquement sur la destination initiale de l'immeuble sans mentionner en quoi consistaient les travaux déclarés et en quoi ils avaient pour effet d'entrainer un changement de destination, les juges du fond n'ont pas mis à même le juge de cassation d'exercer son contrôle et ont ainsi entaché leur jugement d'insuffisance de motivation ; que par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, il y a lieu d'annuler le jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 422-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable : Sauf opposition dûment motivée, notifiée par l'autorité compétente en matière de permis de construire dans le délai d'un mois à compter de la réception de la déclaration, les travaux peuvent être exécutés sous réserve, le cas échéant, du respect des prescriptions notifiées dans les mêmes conditions ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la déclaration de travaux a été reçue par la commune de Sallanches le 25 octobre 2005 ; que cette dernière a notifié la décision d'opposition aux travaux par un courrier recommandé présenté le 24 novembre 2005 ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que cette décision lui aurait été notifiée après l'expiration du délai prévu par les dispositions précitées ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le niveau R+1 du bâtiment en litige aurait été réalisé sans permis de construire ; que, par suite, le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que le maire de la commune de Sallanches s'est fondé sur ce motif pour s'opposer aux travaux en litige ;

Considérant, en troisième lieu que, pour établir que la décision attaquée est légale, la commune invoque un autre motif tiré de ce que cette décision était également justifiée par la circonstance que les travaux en litige constituaient un changement de destination et nécessitaient ainsi un permis de construire, en application des dispositions précitées du code de l'urbanisme ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du bail conclu le 20 juillet 1994 entre le requérant et la société Megève Chimie et de l'attestation produite devant le tribunal, que le niveau R+1 consistait à l'origine en une dépendance des locaux commerciaux situés au rez-de-chaussée ; que si une partie du niveau R+1 a été utilisée comme bureaux depuis 1999, les travaux faisant l'objet de la déclaration consistent en l'ouverture de cinq fenêtres et quatre velux en partie haute ; qu'ils créent ainsi un éclairage naturel des locaux permettant une utilisation autonome à usage de bureaux de la totalité du niveau ; que, dès lors que ces travaux entrainent ainsi un changement de destination, fût-il partiel, ils ne rentrent pas dans le champ de la déclaration de travaux et nécessitent, en application des dispositions précitées du code de l'urbanisme, l'obtention d'un permis de construire ;

Considérant que l'invocation de ce motif ne prive le requérant d'aucune garantie ; qu'il ressort des pièces du dossier que la commune de Sallanches aurait pris la même décision si elle ne s'était fondée que sur ce dernier motif ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B n'est, dès lors, pas fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Sallanches, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais supportés par M. B et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la commune de Sallanches ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 décembre 2008 est annulé.

Article 2 : La demande de M. B devant le tribunal administratif de Grenoble est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Sallanches et de M. B tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Patrick B et à la commune de Sallanches.


Synthèse
Formation : 9ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 325724
Date de la décision : 23/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 jui. 2010, n° 325724
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Jouguelet
Rapporteur ?: M. Benoit Bohnert
Rapporteur public ?: Mme Legras Claire
Avocat(s) : BROUCHOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:325724.20100723
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