Vu la requête, enregistrée le 18 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentée pour M. Charles-Eric A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'État :
1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le trésorier-payeur général d'Ille-et-Vilaine a rejeté son opposition à l'exécution du titre de perception émis à son encontre le 4 février 2008 pour le remboursement des frais de sa scolarité à l'École spéciale militaire de Saint-Cyr à la suite de la résiliation de son contrat à compter du 1er août 2007, ainsi que ce titre de perception ;
2°) de le décharger de l'obligation de verser la somme de 18 252,03 euros mise à sa charge par le titre perception émis le 4 février 2008 ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 2 300 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 juin 2010, présentée par le ministre de la défense ;
Vu le code de la défense ;
Vu la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le décret n°62-1587 du 29 décembre 1962 ;
Vu le décret n°75-1206 du 22 décembre 1975 ;
Vu le décret n°78-721 du 28 juin 1978 ;
Vu le décret n°92-1369 du 29 décembre 1992 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Nicolas Polge, Maître des Requêtes,
- les observations de Me Balat, avocat de M. Charles-Eric A,
- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Balat, avocat de M. Charles-Eric A ;
Considérant que M. A, élève officier de l'école spéciale militaire de Saint-Cyr de 2003 à 2006, a été nommé officier au grade de lieutenant par un décret du Président de la République du 23 octobre 2006, à compter du 1er août 2006 ; que la démission qu'il a présentée a été acceptée, à compter du 1er août 2007, par un décret du Président de la République du 30 juillet 2007 ; qu'il conteste le titre de perception émis à son encontre le 4 février 2008 pour le remboursement de ses frais de scolarité, ainsi que la décision implicite de rejet de la réclamation préalable d'opposition à l'exécution de ce titre de perception qu'il a présentée au trésorier-payeur général d'Ille-et-Vilaine ;
Considérant en premier lieu que si M. A soutient que le titre de perception émis à son encontre ne comporte pas les mentions requises par le second alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, aux termes duquel : Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci , la seule absence de l'indication du prénom du signataire de ce titre est en soi sans incidence sur sa légalité ; qu'en effet, la mention, figurant sur ce titre de perception, du commissaire colonel Hervé, ordonnateur secondaire suppléant , permettent d'identifier le signataire conformément aux exigences posées par l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;
Considérant en deuxième lieu qu'aux termes du premier alinéa de l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 : Tout ordre de recettes doit comporter les bases de liquidation ; qu'il résulte de l'instruction que le titre de perception émis à l'encontre de M. A le 4 février 2008 et signifié par le trésorier payeur général d'Ille et Vilaine par lettre du 5 juin 2008 comportait des mentions suffisantes en ce qui concerne le montant, l'objet et la période de la créance ; qu'ainsi M. A n'est pas fondé à soutenir que, faute de mention des bases de liquidation, la réalité de la créance de l'État ne serait pas établie ;
Considérant en troisième lieu qu'aux termes de l'article 10-1 du décret du 28 juin 1978 fixant certaines dispositions applicables aux élèves des écoles militaires de formation d'officiers de carrière alors en vigueur : Les frais supportés par l'État pour assurer la formation des élèves sont remboursés dans les cas et conditions ci-après. ; qu'aux termes de l'article 10-2 de ce décret : Sont tenus à remboursement : / a) Les élèves qui ne terminent pas leur scolarité ; / b) Les officiers de carrière qui ne satisfont pas à l'engagement prévu à l'article 2 ci-dessus. / Toutefois, sur décision du ministre de la défense, le remboursement n'est pas dû si l'interruption de la scolarité ou l'inexécution totale ou partielle de l'engagement de servir ne sont pas imputables aux intéressés. (...) ; qu'aux termes de l'article 2 du même décret : Lors de leur entrée à l'école, les élèves présentent également une demande en vue d'être admis à l'état d'officier de carrière et doivent s'engager à servir durant une période au moins égale à six années à compter de leur nomination au premier grade d'officier. (...)
Considérant d'une part que si M. A soutient qu'il a terminé sa scolarité à l'école spéciale militaire de Saint-Cyr et ne relève donc pas du a) de l'article 10-2 du décret du 28 juin 1978, il résulte de l'instruction, notamment des mentions portées sur le titre de perception, que la demande de remboursement des frais de scolarité est fondée sur la résiliation anticipée du contrat d'engagement de servir souscrit par M. A ; qu'ainsi la circonstance qu'il ait terminé sa scolarité est sans incidence sur la légalité de la décision ;
Considérant d'autre part que si M. A soutient qu'il n'a pas signé d'engagement de servir et ne relève donc pas du b) de l'article 10-2 du décret du 28 juin 1978, il résulte de l'instruction qu'il a, le 5 septembre 2003, signé un engagement de servir en qualité d'officier de carrière durant une période au moins égale à six années, conformément à l'article 2 du décret du 28 juin 1978 ; qu'ainsi le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique a légalement pu se fonder sur l'inexécution de son contrat d'engagement de servir par M. A pour émettre à son encontre un titre de perception tendant au remboursement des frais de scolarité supportés par l'État pour sa formation, à la suite de sa démission à compter du 1er août 2007 de l'état d'officier de carrière auquel il avait été admis le 1er août 2006 ;
Considérant enfin que si M. A soutient que l'inexécution de son engagement de servir ne lui est pas imputable, du fait de l'accident dont il a été victime au cours de sa scolarité, il n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il n'aurait pas été en mesure de remplir les fonctions auxquelles il a été affecté à la sortie de l'école ; qu'ainsi il n'est pas fondé à demander, en tout état de cause, le bénéfice des dispositions du troisième alinéa de l'article 10-2 du décret du 28 juin 1978 afin d'être dispensé du remboursement des frais de scolarité;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander, d'une part, l'annulation de la décision implicite par laquelle le trésorier-payeur général d'Ille-et-Vilaine a rejeté son opposition à l'exécution du titre de perception émis à son encontre le 4 février 2008 pour le remboursement des frais de sa scolarité à l'École spéciale militaire de Saint-Cyr à la suite de la résiliation de son contrat à compter du 1er août 2007, ainsi que ce titre de perception, ni, d'autre part, à être déchargé du remboursement de cette somme ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Charles-Eric A, au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, au ministre de la défense et au trésorier-payeur général d'Ille-et-Vilaine.