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26/08/2010 | FRANCE | N°342683

France | France, Conseil d'État, 26 août 2010, 342683


Vu le recours, enregistré le 24 août 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par M. Mohamed B, ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 16 juillet 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté n° 2010-78 du 18 février 2010 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé sa remise aux autorités grecques responsables de

sa demande d'asile, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet d'abrog...

Vu le recours, enregistré le 24 août 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par M. Mohamed B, ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 16 juillet 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté n° 2010-78 du 18 février 2010 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé sa remise aux autorités grecques responsables de sa demande d'asile, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet d'abroger l'arrêté en cause ;

2°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire d'annuler l'arrêté n° 2010-78 du 18 février 2010, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour portant la mention en vue de démarches auprès de l'OFPRA et de lui accorder les conditions matérielles d'accueil telles que définies par l'article 2§j de la directive 2003/09/CE du 27 janvier 2003, c'est-à-dire : un logement décent, la nourriture, l'habillement, une somme journalière forfaitaire nécessaire à son entretien corporel, la Couverture maladie universelle et le suivi social et administratif effectif, dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de la présente ordonnance sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

3°) de condamner l'Etat au versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que le juge de première instance n'a pas examiné le mémoire sur la question des conditions matérielles d'accueil et que son ordonnance est insuffisamment motivée ; qu'il n'a jamais pu bénéficier des conditions minimales d'accueil fixées par la directive européenne 2003/09/CE ; que la légalité de la réadmission en Grèce fait défaut, puisque soit le juge considère qu'il s'agit d'une reprise en charge et, dans ce cas, la responsabilité de la demande d'asile incombait à la France dès le 30 juin 2010, soit le juge considère qu'il s'agit d'une prise en charge et, dans ce cas, la France ne serait devenue responsable de la demande d'asile que le 11 août 2010 ; que les conséquences de sa réadmission en Grèce seraient désastreuses compte tenu de la multiplication des atteintes au droit d'asile et à ses droits garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme endurées lors de son précédent séjour en Grèce ; que la condition d'urgence est satisfaite ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 ;

Vu la directive 2003/9/CE du 27 janvier 2003 relative à l'accueil des demandeurs d'asile ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ; qu'aux termes de l'article L.522-3 du même code : Lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux premiers alinéas de l'article L. 522-1 ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile peut être refusée si 1° L'examen de la demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat en application des dispositions du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers, ou d'engagements identiques à ceux prévus par ledit règlement avec d'autres Etats ; qu'aux termes de l'article 10 du règlement (CE) n°343/2003 du Conseil du 18 février 2003 : 1. Lorsqu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 18, paragraphe 3, notamment des données visées au chapitre III du règlement (CE) n° 2725/2000, que le demandeur d'asile a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d'un État membre dans lequel il est entré en venant d'un Etat tiers, cet État membre est responsable de l'examen de la demande d'asile. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière./ 2. Lorsqu'un État membre ne peut, ou ne peut plus, être tenu pour responsable conformément au paragraphe 1 et qu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 18, paragraphe 3, que le demandeur d'asile qui est entré irrégulièrement sur les territoires des Etats membres ou dont les circonstances de l'entrée sur ce territoire ne peuvent être établies a séjourné dans un Etat membre pendant une période continue d'au moins cinq mois avant l'introduction de sa demande, cet Etat membre est responsable de l'examen de la demande d'asile. / Si le demandeur d'asile a séjourné dans plusieurs Etats membres pendant des périodes d'au moins cinq mois, l'Etat membre du dernier séjour est responsable de l'examen de la demande ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. A, de nationalité soudanaise, est entré en France en octobre 2009 et a demandé à être admis au statut de réfugié en déposant une demande à cette fin le 10 décembre 2009 ; que le préfet de Loire-Atlantique, auprès de qui cette demande a été présentée, a, par arrêté du 15 décembre 2009, refusé de l'admettre au séjour en France au titre de demandeur d'asile, sur le fondement du 1° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et décidé de le remettre aux autorités grecques responsables de l'examen de la demande d'asile ; que, par un arrêté du 18 février 2010 dont l'annulation est demandée sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, le préfet de Maine-et-Loire a décidé de remettre M. A aux autorités grecques responsables de l'examen de la demande d'asile ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte des termes mêmes de l'article 10 du règlement (CE) n°343/2003 du Conseil du 18 février 2003 que la circonstance qu'un Etat membre ne puisse être tenu pour responsable de l'examen de la demande d'asile en application des dispositions du paragraphe 1 de cet article ne fait pas obstacle à ce que le même Etat puisse être reconnu responsable de cet examen en application du paragraphe 2 de cet article si les conditions mises à l'application de ce paragraphe sont remplies ; qu'il ressort des éléments versés au dossier du juge des référés que M. A a été identifié en Grèce le 10 septembre 2008 ; que s'il s'était écoulé plus de douze mois à compter de cette date lorsque le préfet de Maine-et-Loire, par l'arrêté contesté, a décidé de le remettre aux autorités grecques - avec pour conséquence de faire échec à l'application du paragraphe 1 de l'article 10 -, il résulte des termes mêmes de la demande de référé présentée devant le tribunal administratif de Nantes par M. A que ce dernier reconnaît avoir vécu en Grèce pendant onze mois avant son entrée en France ; que, par suite, la condition d'une durée de séjour continu d'au moins cinq mois posée par le paragraphe 2 de l'article 10 apparaît remplie et susceptible de faire regarder la Grèce comme responsable, en application du paragraphe 2 de l'article 10, de l'examen de la demande d'asile ;

Considérant, d'autre part, que des documents d'ordre général relatifs aux modalités d'application des règles relatives à l'asile par les autorités grecques ne sauraient suffire à établir que la réadmission d'un demandeur d'asile vers la Grèce serait, par elle-même, constitutive d'une atteinte grave au droit d'asile ; que par ailleurs il ne ressort pas des pièces du dossier soumis au juge des référés que l'absence de respect, par les autorités grecques, des garanties exigées par le respect du droit d'asile relatives aux conditions de traitement des demandeurs, puisse, en ce qui concerne M. A, être établie ; qu'ainsi, sa réadmission vers la Grèce ne saurait être de nature à porter une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en refusant l'admission au séjour de M. A et en décidant sa remise aux autorités grecques, le préfet de Maine-et-Loire n'a pas porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile ; qu'il est manifeste que l'appel formé par M. A contre l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, ne peut être accueilli ; qu'il y a lieu, dès lors, de rejeter la requête de M. A selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions à fin d'injonction et les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du même code ;

O R D O N N E :

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Article 1 : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Mohamed A.

Copie en sera adressée au préfet de Maine-et-Loire.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 342683
Date de la décision : 26/08/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 26 aoû. 2010, n° 342683
Inédit au recueil Lebon

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:342683.20100826
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