La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/09/2010 | FRANCE | N°341064

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 22 septembre 2010, 341064


Vu l'ordonnance du 21 juin 2010, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 30 juin 2010, par laquelle le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris, avant qu'il soit statué sur la demande de la SOCIETE MANIRYS tendant à la décharge des droits et pénalités qui lui ont été assignés au titre du prélèvement spécial prévu par l'article 235 ter MB du code général des impôts pour les années 1999 à 2001, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au

Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garant...

Vu l'ordonnance du 21 juin 2010, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 30 juin 2010, par laquelle le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris, avant qu'il soit statué sur la demande de la SOCIETE MANIRYS tendant à la décharge des droits et pénalités qui lui ont été assignés au titre du prélèvement spécial prévu par l'article 235 ter MB du code général des impôts pour les années 1999 à 2001, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution, de l'article 235 ter MB du code général des impôts ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 avril 2010 au greffe du tribunal administratif de Paris, présenté pour la SOCIETE MANIRYS, représentée par Me Gérald Ayache, mandataire judiciaire et dont le siège social est 1 rue de Sèze à Paris (75009), en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code général des impôts, notamment son article 235 ter MB ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Egerszegi, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Edouard Geffray, rapporteur public ;

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et qu'elle soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 235 ter L, transféré à l'article 1605 sexies du code général des impôts : Un prélèvement spécial de 33 % est perçu sur la fraction des bénéfices industriels et commerciaux imposables à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu qui résulte de la production, de la distribution ou de la représentation de films pornographiques ou d'incitation à la violence ; qu'aux termes de l'article 235 ter MB du même code : Le prélèvement spécial prévu à l'article 235 ter L s'applique également aux bénéfices industriels et commerciaux imposables à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés réalisés par les établissements mentionnés au 4° de l'article 279 bis ; que l'article 279 bis du même code prévoit : Le taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée ne s'applique pas : (...) / 4° aux prestations de services ainsi qu'aux livraisons de biens réalisées dans les établissements dont l'accès est interdit aux mineurs en raison de leur caractère licencieux ou pornographique, soit en application de l'ordonnance n° 59-28 du 5 janvier 1959 réglementant l'accès des mineurs à certains établissements, soit en vertu des pouvoirs de police que le maire et le représentant de l'Etat dans le département tiennent des articles L. 2212-2, L. 2212-3 et L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ces dispositions que sont soumis au prélèvement spécial prévu à l'article 235 ter MB du code général des impôts les établissements interdits aux mineurs en raison de leur caractère licencieux et pornographique ; que, contrairement à ce que soutient la SOCIETE MANYRIS, les établissements ainsi visés constituent, eu égard notamment au caractère spécialisé de leur activité de vente de produits à caractère pornographique et à leurs conditions d'accès et de fréquentation, une catégorie de contribuables spécifique, que le législateur a définie en se fondant sur des critères objectifs et rationnels en rapport direct avec l'objectif d'intérêt général de lutte contre la multiplication des lieux de vente et de rencontre à caractère pornographique ; que le prélèvement spécial auquel ils sont soumis n'introduit aucune rupture caractérisée devant les charges publiques à leur détriment ;

Considérant, en second lieu, que la SOCIETE MANIRYS ne peut utilement soutenir que le dispositif fiscal prévu par l'article 235 ter MB du code général des impôts introduirait une rupture d'égalité entre les établissements visés par la loi, au motif que leur assujettissement au prélèvement spécial dépendrait de décisions des autorités de police, par nature variables compte tenu des incertitudes qui caractérisent la notion de pornographie et de la diversité des circonstances locales, dès lors que les décisions des autorités de police sont prises sous le contrôle du juge et que, en vertu de la loi fiscale, le prélèvement critiqué s'applique identiquement à tous les établissements qui font l'objet de décisions de police d'interdiction aux mineurs pour activité pornographique ou licencieuse ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; que, par suite, il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par le tribunal administratif de Paris.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE MANIRYS et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au tribunal administratif de Paris.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 341064
Date de la décision : 22/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Publications
Proposition de citation : CE, 22 sep. 2010, n° 341064
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Anne Egerszegi

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:341064.20100922
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award