Vu l'ordonnance du 30 juin 2010, enregistrée le 5 juillet 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Montreuil, avant qu'il soit statué sur la demande de la SOCIETE AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE, tendant à la restitution de droits d'impôts sur les sociétés correspondant à la déduction d'une somme de 16 826 415 euros au titre de l'année 2006, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du III de l'article 34 de la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
Vu la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006, notamment son article 34 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Olivier Henrard, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Julien Boucher, Rapporteur public ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et qu'elle soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;
Considérant que l'article 34 de la loi du 30 décembre 2006 est venu modifier, notamment, les dispositions du II de l'article 217 quinquies du code général des impôts, afin de permettre, aux sociétés qui décident l'émission gratuite d'actions nouvelles réservées aux adhérents du plan d'épargne de l'entreprise, de déduire de leurs résultats fiscaux la différence entre la valeur des titres à la date de l'augmentation de capital et leur prix de souscription ; qu'en vertu du III de cet article 34, ce dispositif s'applique aux émissions d'actions autorisées par les assemblées générales extraordinaires réunies à compter du 1er janvier 2006 ;
Considérant que, pour demander que la question de la conformité à la Constitution des dispositions du III de l'article 34 de la loi du 30 décembre 2006 soit soumise au Conseil constitutionnel, la SOCIETE AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE soutient qu'en limitant ainsi le bénéfice de la mesure nouvelle, ces dispositions créent une rupture de l'égalité des contribuables devant les charges publiques et méconnaissent en conséquence l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
Considérant toutefois, d'une part, qu'il résulte des dispositions des articles L. 225-129 et L. 225-129-2 du code de commerce que si l'assemblée générale extraordinaire, seule compétente pour décider, sur le rapport des organes de direction, une augmentation de capital, peut déléguer cette compétence au conseil d'administration ou au directoire, il n'en demeure pas moins qu'une telle émission de titres suppose toujours une décision de principe de l'assemblée générale extraordinaire ; qu'ainsi, en réservant aux seules augmentations de capital autorisées par les assemblées générales extraordinaires des entreprises concernées le bénéfice de la mesure nouvelle, le législateur a fondé son appréciation sur des critères objectifs et rationnels, en rapport avec l'objet de la mesure ; que, d'autre part, il ressort des travaux préparatoires des dispositions contestées qu'en retenant la date du 1er janvier 2006, le législateur a entendu tenir compte de ce que les assemblées générales extraordinaires de nombreuses sociétés concernées avaient pris, au cours de l'année 2006, la décision d'augmenter leur capital en émettant des titres au bénéfice de leurs salariés adhérents du plan d'épargne de l'entreprise sur la base des assurances qui leur avaient été fournies par le Gouvernement, dans le cadre de la concertation engagée par celui-ci avec les acteurs économiques dès la fin de l'année 2005 ; qu'eu égard à l'objectif recherché par l'adoption de cette mesure, qui est d'inciter les sociétés à émettre de nouveaux titres destinés à leurs salariés en vue d'améliorer la participation de ceux-ci au capital, les entreprises dont la décision d'augmenter leur capital avait été arrêtée postérieurement au 1er janvier 2006 se trouvaient dans une situation objectivement différente de celle des entreprises dont l'émission de nouveaux titres avait été approuvée antérieurement, à une date où l'effet incitatif de la mesure ne pouvait jouer ; qu'ainsi, les dispositions contestées ne créent aucune rupture caractérisée de l'égalité des contribuables devant les charges publiques ; que, par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par le tribunal administratif de Montreuil.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au tribunal administratif de Montreuil.