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29/09/2010 | FRANCE | N°343371

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 29 septembre 2010, 343371


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 et 23 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Abolfazl A, élisant domicile ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 2 septembre 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant, à enjoindre, sous astreinte, au préfet de police de réexaminer sa demande d'admission au séjour au titre d

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Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 et 23 septembre 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Abolfazl A, élisant domicile ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 2 septembre 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant, à enjoindre, sous astreinte, au préfet de police de réexaminer sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile et de lui proposer une solution d'hébergement, de nourriture et d'habillement ;

2°) de prononcer ces injonctions, assorties d'un délai de huit jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, et d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que l'urgence est caractérisée, dès lors qu'il est sans ressource ni hébergement ; qu'il est porté une atteinte grave au droit d'asile, qui ne peut s'exercer que si les conditions matérielles d'accueil sont remplies ; qu'il est privé du droit de former un recours suspensif, et donc effectif, devant la Cour nationale du droit d'asile, ce qui méconnaît les stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lesquels sont applicables, contrairement à ce qu'a jugé l'ordonnance attaquée ; que la décision de refus d'admission au séjour au titre de l'asile est manifestement illégale ; que le préfet de police a illégalement refusé de réexaminer sa situation au regard du jugement du 9 octobre 2009 du tribunal administratif de Paris annulant l'arrêté de reconduite à la frontière du 6 octobre 2009, en tant qu'il fixe l'Afghanistan comme pays de destination, méconnaissant ainsi l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2010, présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que M. A ne saurait se prévaloir d'une situation d'urgence particulière au regard du délai qui s'est écoulé entre la notification de la décision préfectorale portant refus d'admission au séjour du 3 novembre 2009 et la saisine du juge des référés le 30 août 2010 ; que le préfet de police était fondé à refuser à M. A son admission au séjour au titre de l'asile, dès lors que sa demande avait un caractère dilatoire et abusif ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile en raison du caractère confus et peu personnalisé de ses déclarations écrites et orales ; qu'au surplus, les décisions préfectorales litigieuses ne méconnaissent pas son droit à un recours effectif au regard des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que les décisions administratives peuvent être contestées par la voie du recours pour excès de pouvoir et faire l'objet d'une demande de suspension ordonnée par le juge des référés statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative ou de toute mesure ordonnée sur le fondement de l'article L. 521-2 du même code ; que le moyen tiré de ce que M. A n'aurait pas bénéficié de conditions d'accueil décentes doit être rejeté, dès lors qu'il a été orienté vers la plate-forme d'accueil France Terre d'Asile à Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. Abolfazl A et, d'autre part, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Vu le procès-verbal de l'audience du 24 septembre 2010 à 11 heures, au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Delvolvé, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation, avocat de M. A, qui soutient en outre que la décision préfectorale refusant d'abroger celle du 3 novembre 2009 est irrégulière, faute de motivation ;

- M. A ;

- la représentante de M. A ;

- les représentants du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a prolongé l'instruction, après avoir informé les parties, en application des dispositions de l'article R. 522-9 du code de justice administrative, que son ordonnance était susceptible d'être fondée sur le moyen, relevé d'office, tiré de la tardiveté de l'exception d'illégalité de la décision refusant au requérant l'admission au séjour ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 24 septembre 2010, présenté par M. A, qui précise que sa demande au titre de l'article L. 521-2 du code de justice administrative repose sur l'illégalité manifeste de la décision implicite du 27 mars 2010 par laquelle le préfet a refusé, en dépit d'éléments nouveaux, d'abroger la décision du 3 novembre 2009 et de l'admettre au séjour ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 27 septembre 2010, présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ; il soutient que la décision implicite de rejet de la demande d'abrogation de l'arrêté du 3 novembre 2009 n'est pas illégale faute de motivation, dès lors que M. A n'en a pas demandé, en temps utile, communication des motifs ; que l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas applicable au contentieux en cause ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ; que l'usage par le juge des référés des pouvoirs qu'il tient de ces dispositions est subordonné à la condition qu'une urgence particulière rende nécessaire l'intervention dans les quarante-huit heures d'une mesure destinée à la sauvegarde d'une liberté fondamentale ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A, ressortissant afghan, est entré en France le 5 octobre 2009 ; que, dès le 6 octobre, le préfet de police a ordonné sa reconduite à la frontière ; que le tribunal administratif de Paris a confirmé, par un jugement du 9 octobre suivant, la légalité de cette mesure, mais annulé la décision fixant l'Afghanistan comme pays de renvoi ; que l'intéressé a alors présenté une demande d'admission au séjour au titre de l'asile, que le préfet de police a rejetée le 3 novembre 2009 ; qu'à la suite du rejet de sa demande d'asile par le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA), le 14 décembre 2009, M. A a déposé une demande d'aide juridictionnelle auprès de la Cour nationale du droit d'asile et, après avoir obtenu une décision favorable le 16 mars 2010, il a saisi cette juridiction, le 24 avril suivant, d'un recours contre la décision de l'OFPRA ; qu'entre temps le requérant, qui n'avait pas contesté la décision du 3 novembre 2009 dans le délai de recours contentieux, a demandé au préfet de police, le 25 janvier 2010, d'abroger cette décision et de l'admettre au séjour au titre de l'asile ; qu'enfin il a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Paris, le 30 août 2010, d'une demande tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet, sur le fondement des dispositions citées plus haut de l'article L. 521-2, de réexaminer sa demande d'admission au séjour et de lui proposer une solution d'hébergement, de nourriture et d'habillement ; que, par l'ordonnance dont M. A fait appel, le juge des référés a rejeté cette demande ;

Considérant qu'il était loisible à M. A, dès la notification, le 3 novembre 2009, de la décision du même jour refusant de l'admettre au séjour au titre de l'asile, et au plus tard le 4 janvier 2010, de contester cette décision devant le tribunal administratif, en assortissant son recours, le cas échéant, d'une demande de suspension ; que, s'il soutient qu'il est sans ressource ni hébergement depuis son arrivée en France, il résulte de ce qui vient d'être dit que, dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard, d'une part, au délai qui s'est écoulé, sans que la situation de l'intéressé ait été modifiée, entre le 3 novembre 2009 et le 30 août 2010, date à laquelle il a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris de faire usage, dans les quarante-huit heures, des pouvoirs qu'il tient des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative et, d'autre part, de la circonstance que le jugement du tribunal administratif de Paris du 9 octobre 2009 fait obstacle à ce qu'il soit reconduit en Afghanistan, la condition d'urgence particulière exigée par cet article de peut être regardée comme remplie ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par l'ordonnance contestée, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

O R D O N N E :

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Article 1 : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Abolfazl A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 29 sep. 2010, n° 343371
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Jacques Arrighi de Casanova
Avocat(s) : SCP DELVOLVE, DELVOLVE

Origine de la décision
Formation : Juge des référés
Date de la décision : 29/09/2010
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 343371
Numéro NOR : CETATEXT000022900749 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2010-09-29;343371 ?
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