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06/10/2010 | FRANCE | N°332334

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 06 octobre 2010, 332334


Vu la requête, enregistrée le 29 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Papy Matutu A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 21 janvier 2009 par laquelle l'ambassadeur de France en République Démocratique du Congo a refusé de délivrer à son fils allégué, Fortunato Braga B, un visa d'entrée et de long séjour en Fra

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Vu la requête, enregistrée le 29 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Papy Matutu A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 21 janvier 2009 par laquelle l'ambassadeur de France en République Démocratique du Congo a refusé de délivrer à son fils allégué, Fortunato Braga B, un visa d'entrée et de long séjour en France en qualité de membre de famille d'un réfugié statutaire, ensemble la décision de l'ambassadeur de France en République Démocratique du Congo ;

2°) d'enjoindre au ministre des affaires étrangères et européennes ou au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de délivrer le visa sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pierre Chaubon, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Cyril Roger-Lacan, rapporteur public ;

Considérant que M. A, ressortissant angolais entré en France en 2001, a obtenu le statut de réfugié en octobre 2003 ; qu'il a sollicité en décembre de la même année l'autorisation de faire venir en France auprès de lui son épouse et ses trois enfants Landu Braga née en 1994, Fortunato Braga né en 1998 et Nazare Braga née en 2002 ; qu'à la suite de l'abandon des enfants par leur mère, la demande de visas a été instruite par les services de l'ambassade de France en République Démocratique du Congo, et le visa sollicité a été délivré en janvier 2009 à deux des enfants ; que M. A demande l'annulation de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les refus de visas en France a rejeté sa demande tendant au réexamen du refus de visa opposé à l'enfant Fortunato Braga ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint et à l'enfant d'un réfugié statutaire les visas qu'ils sollicitent ; qu'elles ne peuvent opposer un refus à une telle demande que pour un motif d'ordre public, et notamment, en cas de fraude ;

Considérant que la demande de visa présentée pour l'enfant Fortunato Braga a été rejetée par les services de l'ambassade de France au motif que le test osseux pratiqué à leur initiative révélait un âge réel de l'enfant supérieur à celui mentionné dans les documents d'état civil remis à l'occasion de la demande de visa et que par suite l'identité de l'enfant et son lien de filiation avec M. A n'étaient pas établis ; qu'il ressort toutefois des pièces versées au dossier que le requérant a déclaré l'enfant Fortunato avec les autres membres de sa famille dès ses premières démarches auprès de l'OFPRA en vue de l'obtention du statut de réfugié ; que les trois enfants ont été recueillis ensemble après l'abandon de leur mère, que la même demande de visas a été présentée conjointement pour eux trois, et qu'ils n'avaient pas été séparés avant la venue en France de deux d'entre eux auxquels un visa a été délivré en janvier 2009 ; que le caractère authentique de l'acte de naissance établi par l'officier d'état civil compétent de Luanda pour l'enfant Fortunato n'a pas été remis en cause ; que par suite la seule circonstance que l'examen osseux pratiqué au centre médical de Kinshasa en décembre 2008 ait fait apparaître un écart entre l'âge de l'enfant, évalué suivant cette méthode, et celui résultant de l'acte de naissance, ne permet pas de conclure à l'existence en l'espèce d'une fraude et à l'absence du lien de filiation allégué entre l'enfant présenté à l'ambassade et M. A ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en rejetant la demande de visa qui lui était présentée pour l'enfant Fortunato Braga B, la commission de recours contre les refus de visas a commis une erreur d'appréciation ; que le requérant est fondé pour ce motif à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de délivrer un visa à M. Fortunato Braga B dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ; qu'il n'y a pas lieu toutefois d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros demandée par M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision implicite de rejet de la demande de visa présentée pour l'enfant Fortunato Braga B est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de délivrer un visa d'entrée et de long séjour à l'enfant Fortunato Braga B dans un délai de deux mois à compter de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à M. A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Papy Matutu A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 332334
Date de la décision : 06/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 06 oct. 2010, n° 332334
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Maugüé
Rapporteur ?: M. Pierre Chaubon
Rapporteur public ?: M. Roger-Lacan Cyril

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:332334.20101006
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