Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 juillet et 20 octobre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la société d'exercice libéral SEL DU DOCTEUR LE BIHAN, dont le siège est 5 bis rue du Chênedollé à Vire (14500) ; la SEL DU DOCTEUR LE BIHAN demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 3 juin 2009 du Conseil national de l'ordre des médecins refusant à la SEL DU DOCTEUR LE BIHAN le recours à deux médecins collaborateurs libéraux ;
2°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 2005-882 du 2 août 2005, notamment son article 18 ;
Vu le code de la santé publique, notamment son article R. 4127-87 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christophe Eoche-Duval, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat du conseil national de l'ordre des médecins,
- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat du conseil national de l'ordre des médecins,
Considérant qu'aux termes de l'article 18 de la loi du 2 août 2005 : I. - Les membres des professions libérales soumises à statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, à l'exception des professions d'officiers publics ou ministériels, des commissaires aux comptes et des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires au redressement et à la liquidation des entreprises, peuvent exercer leur activité en qualité de collaborateur libéral. / II. - A la qualité de collaborateur libéral le membre non salarié d'une profession mentionnée au I qui, dans le cadre d'un contrat de collaboration libérale, exerce auprès d'un autre professionnel, personne physique ou personne morale, la même profession. / Le collaborateur libéral exerce son activité professionnelle en toute indépendance, sans lien de subordination. Il peut compléter sa formation et peut se constituer une clientèle personnelle. / III. - Le contrat de collaboration libérale doit être conclu dans le respect des règles régissant la profession (...) ; que, pour l'application aux professions médicales du III précité, l'article R. 4127-87 du code de la santé publique dans sa rédaction issue du décret n°2006-1585 du 13 décembre 2006 dispose : Le médecin peut s'attacher le concours d'un médecin collaborateur libéral, dans les conditions prévues par l'article 18 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises. / Chacun d'entre eux exerce son activité en toute indépendance, sans lien de subordination, et dans le respect des règles de la profession, notamment le libre choix du médecin par les patients et l'interdiction du compérage. ;
Considérant qu'il ressort des dispositions du code de déontologie des médecins, codifié aux articles R. 4127-1 et suivants du même code, qu'au titre des règles régissant la profession visées au III de l'article 18 susmentionné figurent, notamment, les principes selon lesquels le médecin ne peut aliéner son indépendance professionnelle , l'exercice de la médecine est personnel , la médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce , tout compérage entre médecins est interdit et l'interdiction à un médecin de faire gérer son cabinet par un confrère ; qu'il en résulte que la réglementation de la profession de médecin, ainsi d'ailleurs que celle des autres professions médicales, justifie légalement de limiter le nombre de collaborateurs libéraux dont le praticien peut s'entourer ; que le premier alinéa de l'article R. 4127-87 doit donc, dans ce contexte, être interprété comme signifiant qu'il n'est loisible à tout médecin que de conclure un seul contrat de collaborateur libéral avec un confrère ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la société d'exercice libéral SEL DU DOCTEUR LE BIHAN a communiqué au conseil départemental de l'ordre des médecins du Calvados, ainsi que le prévoit l'article L. 4113-12 du code de la santé publique, le projet de deux contrats de collaboration libérale qu'elle se proposait de passer avec, d'une part, un médecin à temps partiel exerçant deux semaines dans le mois, et, d'autre part, un second médecin à temps partiel exerçant trois semaines dans le mois, au cabinet du praticien, M. A ; que le conseil de l'ordre du Calvados a estimé dans son avis pris sur le fondement de l'article R. 4127-91 du code de la santé publique que un médecin ne peut recourir aux services que d'un seul collaborateur libéral aux motifs que le cumul de contrats de collaboration serait constitutif d'une gérance de cabinet et d'un exercice de la médecine comme un commerce ; que le Conseil national de l'ordre des médecins, dans son avis attaqué rendu sur recours hiérarchique, qui a le caractère de décision faisant grief, a confirmé cet avis en énonçant que cette interprétation est justifiée par le principe éthique d'exercice personnel de la médecine ; qu'ainsi qu'il a été énoncé plus haut, le Conseil national de l'ordre des médecins a pu légalement justifier comme il l'a fait sa décision ; qu'il résulte de ce qui précède que la SEL DU DOCTEUR LE BIHAN n'est pas fondée à en demander l'annulation ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit au conclusions présentées par le Conseil national de l'ordre des médecins au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la SEL DU DOCTEUR LE BIHAN et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la SEL DU DOCTEUR LE BIHAN est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du Conseil national de l'ordre des médecins tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SEL DU DOCTEUR LE BIHAN et au Conseil national de l'ordre des médecins.