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25/10/2010 | FRANCE | N°312717

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 25 octobre 2010, 312717


Vu le pourvoi, enregistré le 30 janvier 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler les articles 1er et 2 de l'arrêt du 6 décembre 2007 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en tant que, par cet arrêt, la cour a réduit d'un montant de 17 249 euros la cotisation de taxe professionnelle à laquelle la SARL Marsan a été assujettie au titre de l'année 2003 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enreg

istrée le 15 octobre 2010, présentée par le ministre du budget, des comptes...

Vu le pourvoi, enregistré le 30 janvier 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler les articles 1er et 2 de l'arrêt du 6 décembre 2007 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en tant que, par cet arrêt, la cour a réduit d'un montant de 17 249 euros la cotisation de taxe professionnelle à laquelle la SARL Marsan a été assujettie au titre de l'année 2003 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 15 octobre 2010, présentée par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Matthieu Schlesinger, Auditeur,

- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SARL Boulangerie Labouchède, qui exploitait un fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie à Bordeaux, a absorbé le 1er janvier 1999 la SA Marsan qui exploitait un fonds ayant le même objet à Mérignac (Gironde) ; qu'elle a transféré son activité dans cette dernière commune et changé sa raison sociale en SARL Marsan ; que la société a adressé le 31 janvier 2000 à l'administration fiscale une demande en vue de bénéficier de l'exonération temporaire de taxe professionnelle prévue par l'article 1465 du code général des impôts à raison de l'extension de son établissement industriel de Mérignac ; que les cotisations de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie dans les rôles de la commune de Mérignac, respectivement au titre des années 1999 et 2000, au titre de l'année 2001 et au titre des années 2002 et 2003 ont été établies sans qu'il soit fait droit à cette demande ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 6 décembre 2007 de la cour administrative d'appel de Bordeaux, statuant sur renvoi après cassation, en tant qu'il a accordé à la société la décharge, à concurrence d'une somme de 17 249 euros, de la cotisation de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2003 ;

Considérant que lorsqu'une imposition est, telle la taxe professionnelle, assise sur la base d'éléments qui doivent être déclarés par le redevable, l'administration ne peut établir, à la charge de celui-ci, des droits excédant le montant de ceux qui résulteraient des éléments qu'il a déclarés qu'après l'avoir, conformément au principe général des droits de la défense, mis à même de présenter ses observations ; qu'il en va de même lorsque le contribuable a fait connaître, dans le délai de déclaration, son intention de se placer sous un régime d'exonération et que l'administration estime qu'il n'y a pas droit ; que, toutefois, l'administration n'est pas tenue de mettre le contribuable à même de présenter ses observations lorsque, pour calculer les bases au titre d'une année d'imposition, elle fait application d'un mode de calcul qu'elle a appliqué au titre de cotisations afférentes à des années antérieures et qu'elle a déjà porté à la connaissance du contribuable, notamment dans ses décisions de rejet des réclamations présentées contre ces cotisations ;

Considérant que, pour accorder à la SARL Marsan la réduction de la cotisation de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2003, la cour a jugé que l'administration ne pouvait utilement invoquer, pour justifier du respect du principe général des droits de la défense, l'envoi à la société, préalablement à l'établissement de cette imposition, des décisions de rejet de ses réclamations relatives aux impositions en litige au titre des années précédentes ; qu'il résulte de ce qui vient d'être dit qu'elle a ainsi commis une erreur de droit ; que, par suite, le ministre est fondé, pour ce motif, à demander l'annulation de l'arrêt attaqué, en tant qu'il a réduit d'un montant de 17 249 euros la cotisation de taxe professionnelle à laquelle la société a été assujettie au titre de l'année 2003 ;

Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : Lorsque l'affaire fait l'objet d'un second pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire ; qu'il y a lieu, par suite, de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, d'une part, que les décisions du 14 août 2001 rejetant les réclamations de la société relatives aux cotisations de taxe professionnelle dues au titre des années 1999 et 2000 n'étaient pas fondées sur le refus de l'administration de faire bénéficier la société de l'exonération temporaire au motif qu'elle ne remplissait pas les conditions fixées par les dispositions de l'article 1465 du code général des impôts ; que l'administration n'a produit, avant la clôture de l'instruction, aucune pièce établissant que la réclamation concernant l'année 2001 aurait fait l'objet d'une décision explicite comportant un tel motif ; que, d'autre part, la circonstance que la société a eu connaissance des mémoires en défense produits par l'administration devant le tribunal administratif de Bordeaux dans le cadre de diverses instances contentieuses relatives aux seules cotisations de taxe professionnelle des années 2000, 2001 et 2002 ne saurait dispenser l'administration de mettre la société à même de présenter ses observations avant la mise en recouvrement de la taxe due au titre de l'année 2003 ; que, par suite, la SARL Marsan est fondée à soutenir que cette cotisation a été établie en méconnaissance du principe général des droits de la défense et à demander, pour ce motif, une réduction de cette taxe correspondant au montant de l'exonération prévue par les dispositions de l'article 1465 du code général des impôts, ainsi que la réformation du jugement qu'elle attaque, en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à cette réduction ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé en tant qu'il a accordé à la SARL Marsan la réduction de la cotisation de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de 2003 dans les rôles de la commune de Mérignac.

Article 2 : La SARL Marsan est déchargée de la cotisation de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de 2003 à concurrence d'une somme de 17 249 euros.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 1er juillet 2004 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT et à la SARL Marsan.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 312717
Date de la décision : 25/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - REDRESSEMENT - GÉNÉRALITÉS - 1) APPLICATION PRÉALABLEMENT À L'ÉTABLISSEMENT D'UNE COTISATION D'IMPÔT PROCÉDANT DU REFUS DE FAIRE DROIT À UNE DEMANDE D'EXONÉRATION PRÉSENTÉE PAR LE CONTRIBUABLE AVANT EXPIRATION DU DÉLAI DE DÉCLARATION - EXISTENCE [RJ1] - 2) APPLICATION LORSQUE L'ADMINISTRATION SE BORNE À ÉTABLIR L'IMPÔT SUR DES BASES DONT ELLE A DÉJÀ PORTÉ LE MODE DE CALCUL À LA CONNAISSANCE DU CONTRIBUABLE AU TITRE D'ANNÉES ANTÉRIEURES - NOTAMMENT DANS UNE DÉCISION DE REJET D'UNE RÉCLAMATION - ABSENCE [RJ2].

19-01-03-02-01-01 Lorsqu'une imposition est, telle la taxe professionnelle, assise sur la base d'éléments qui doivent être déclarés par le redevable, l'administration ne peut établir, à la charge de celui-ci, des droits excédant le montant de ceux qui résulteraient des éléments qu'il a déclarés qu'après l'avoir, conformément au principe général des droits de la défense, mis à même de présenter ses observations. 1) Il en va de même lorsque le contribuable a fait connaître, dans le délai de déclaration, son intention de se placer sous un régime d'exonération et que l'administration estime qu'il n'y a pas droit. 2) Toutefois, l'administration n'est pas tenue de mettre le contribuable à même de présenter ses observations lorsque, pour calculer les bases au titre d'une année d'imposition, elle fait application d'un mode de calcul qu'elle a appliqué au titre de cotisations afférentes à des années antérieures et qu'elle a déjà porté à la connaissance du contribuable, notamment dans ses décisions de rejet des réclamations présentées contre ces cotisations.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE - APPLICATION DU PRINCIPE GÉNÉRAL DES DROITS DE LA DÉFENSE - 1) PRÉALABLEMENT À L'ÉTABLISSEMENT D'UNE COTISATION PROCÉDANT DU REFUS DE FAIRE DROIT À UNE DEMANDE D'EXONÉRATION PRÉSENTÉE PAR LE CONTRIBUABLE AVANT EXPIRATION DU DÉLAI DE DÉCLARATION - EXISTENCE [RJ1] - 2) LORSQUE L'ADMINISTRATION SE BORNE À ÉTABLIR L'IMPÔT SUR DES BASES DONT ELLE A DÉJÀ PORTÉ LE MODE DE CALCUL À LA CONNAISSANCE DU CONTRIBUABLE AU TITRE D'ANNÉES ANTÉRIEURES - NOTAMMENT DANS UNE DÉCISION DE REJET D'UNE RÉCLAMATION - ABSENCE [RJ2].

19-03-04 Lorsqu'une imposition est, telle la taxe professionnelle, assise sur la base d'éléments qui doivent être déclarés par le redevable, l'administration ne peut établir, à la charge de celui-ci, des droits excédant le montant de ceux qui résulteraient des éléments qu'il a déclarés qu'après l'avoir, conformément au principe général des droits de la défense, mis à même de présenter ses observations. 1) Il en va de même lorsque le contribuable a fait connaître, dans le délai de déclaration, son intention de se placer sous un régime d'exonération et que l'administration estime qu'il n'y a pas droit. 2) Toutefois, l'administration n'est pas tenue de mettre le contribuable à même de présenter ses observations lorsque, pour calculer les bases au titre d'une année d'imposition, elle fait application d'un mode de calcul qu'elle a appliqué au titre de cotisations afférentes à des années antérieures et qu'elle a déjà porté à la connaissance du contribuable, notamment dans ses décisions de rejet des réclamations présentées contre ces cotisations.


Références :

[RJ1]

Cf. 23 mars 2005, Min. c/ SA Umicore Oxyde France, n° 255951, inédite au Recueil.

Cf. sol. contr. 25 novembre 2009, Mme Caillon, n° 301031, T. p. 707.,,

[RJ2]

Rappr. 26 décembre 2008, SA Miniabilles France, n° 295943, T. pp. 672-694.


Publications
Proposition de citation : CE, 25 oct. 2010, n° 312717
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Matthieu Schlesinger
Rapporteur public ?: Mme Legras Claire

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:312717.20101025
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