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08/11/2010 | FRANCE | N°330463

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 08 novembre 2010, 330463


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 août et 4 novembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Fatima A, épouse MAKHLOUFI, demeurant au ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 4 juin 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, après avoir annulé le jugement du 25 novembre 2008 du tribunal administratif de Paris, a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de police du 30 juin 2008 refusant de lui délivrer un titre de séjour, assorti d'une obligation de q

uitter le territoire français dans le délai d'un mois ;

2°) réglant l'...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 août et 4 novembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Fatima A, épouse MAKHLOUFI, demeurant au ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 4 juin 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, après avoir annulé le jugement du 25 novembre 2008 du tribunal administratif de Paris, a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de police du 30 juin 2008 refusant de lui délivrer un titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande présentée devant le tribunal administratif de Paris ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François Vareille, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de Mme A,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de Mme A ;

Considérant que Mme A, ressortissante algérienne, se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 juin 2009 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Paris du 25 novembre 2008, a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de police du 30 juin 2008 refusant de lui délivrer un titre de séjour, assorti d'une obligation de quitter le territoire dans le délai d'un mois ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. /2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui et qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 dans sa rédaction alors en vigueur : (....) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5. au ressortissant algérien (...) dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (....) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si, à la date de l'arrêté attaqué, Mme A ne résidait que depuis quatre ans environ en France où elle n'était entrée qu'à l'âge de 53 ans pour y rejoindre celui qui était alors son époux, sa seule attache familiale en Algérie était à la date de cet arrêté une fille avec laquelle elle n'avait plus de contact depuis longtemps alors que résidaient en France à cette même date ses deux autres enfants, l'un étant de nationalité française et l'autre titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, ainsi que ses deux petits enfants ; que la cour administrative d'appel, en estimant que, malgré ces circonstances, l'arrêté attaqué ne portait pas atteinte au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale a fait une inexacte qualification juridique des faits au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatives au respect de la vie privée et familiale ; qu'il en résulte que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son arrêt doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l'arrêté du préfet de police du 30 juin 2008 a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de celles du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatives au respect de la vie privée et familiale ; que le préfet de police n'est dès lors pas fondé à soutenir que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif s'est fondé sur ce motif pour en prononcer l'annulation ;

Considérant qu'il a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme A de la somme de 3 000 euros ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 4 juin 2009 est annulé.

Article 2 : La requête présentée par le préfet de police devant la cour administrative d'appel de Paris est rejetée.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Fatima A épouse MEKHLOUBI et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 330463
Date de la décision : 08/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 nov. 2010, n° 330463
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hubac
Rapporteur ?: M. François Vareille
Rapporteur public ?: M. Thiellay Jean-Philippe
Avocat(s) : SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:330463.20101108
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