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17/11/2010 | FRANCE | N°334628

France | France, Conseil d'État, 4ème sous-section jugeant seule, 17 novembre 2010, 334628


Vu la requête, enregistrée le 15 décembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE CROZONDIS, dont le siège est Penandreff à Crozondis (29160) ; la SOCIETE CROZONDIS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 22 octobre 2009 par laquelle la commission nationale d'aménagement commercial a refusé de lui accorder l'autorisation préalable requise en vue de la création d'un supermarché à l'enseigne E. Leclerc d'une surface de vente de 1 480 m² à Telgruc-sur-Mer (Finistère) ;

2°) d'enjoindre à la commission nation

ale d'aménagement commercial de statuer à nouveau sur sa demande dans les trois ...

Vu la requête, enregistrée le 15 décembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE CROZONDIS, dont le siège est Penandreff à Crozondis (29160) ; la SOCIETE CROZONDIS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 22 octobre 2009 par laquelle la commission nationale d'aménagement commercial a refusé de lui accorder l'autorisation préalable requise en vue de la création d'un supermarché à l'enseigne E. Leclerc d'une surface de vente de 1 480 m² à Telgruc-sur-Mer (Finistère) ;

2°) d'enjoindre à la commission nationale d'aménagement commercial de statuer à nouveau sur sa demande dans les trois mois suivant la notification de la décision du Conseil d'Etat ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce, modifié notamment par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;

Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Talabardon, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Gaëlle Dumortier, rapporteur public ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la commission nationale d'aménagement commercial ;

Sur la motivation de la décision de la commission nationale d'aménagement commercial :

Considérant que si, eu égard à la nature, à la composition et à l'attribution de la commission nationale d'aménagement commercial, les décisions qu'elle prend doivent être motivées, cette obligation n'implique pas que la commission soit tenue de prendre explicitement parti sur le respect par le projet qui lui est soumis de chacun des objectifs et critères d'appréciation fixés par les dispositions législatives applicables ; qu'en motivant sa décision en se référant notamment à la diminution de la population dans la zone de chalandise, à l'impact négatif du projet sur la gestion équilibrée de l'espace, au risque d'atteinte à l'animation du centre bourg de Telgruc-sur-Mer, à l'important surcroît de circulation qui en résulterait et à l'absence d'avantages suffisants au regard des autres critères posés par la loi, la commission nationale a, en l'espèce, satisfait à cette obligation ; que le moyen tiré d'une motivation insuffisante doit donc être écarté ;

Sur l'appréciation portée par la commission nationale sur le projet :

Considérant, d'une part, qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 : Les pouvoirs publics veillent à ce que l'essor du commerce et de l'artisanat permette l'expansion de toutes les formes d'entreprises, indépendantes, groupées ou intégrées, en évitant qu'une croissance désordonnée des formes nouvelles de distribution ne provoque l'écrasement de la petite entreprise et le gaspillage des équipements commerciaux et ne soit préjudiciable à l'emploi ; qu'aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie : Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. / Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 752-6 du même code, dans sa rédaction issue de la même loi du 4 août 2008 : Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission départementale d'aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ; / b) l'effet du projet sur les flux de transport ; / c) Les effets découlant des procédures prévues aux articles L. 303-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 123-11 du code de l'urbanisme ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet ; / b) Son insertion dans les réseaux de transports collectifs. ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce ; que, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 4 août 2008, la densité d'équipement commercial de la zone de chalandise concernée ne figure plus au nombre de ces critères ;

Considérant que, pour apprécier la conformité du projet litigieux avec les dispositions précitées, la commission nationale a relevé que, situé en périphérie de la commune de Telgruc-sur-Mer, ce projet ne contribuera pas à favoriser le maillage commercial et s'inscrira en rupture avec la gestion équilibrée de l'espace ; qu'implanté à proximité d'un axe routier très fréquenté, il risque de porter atteinte à l'animation du centre-bourg ; qu'enfin, se trouvant dans une zone rurale non desservie pas les transports en commun, il occasionnera un important surcroît de circulation et ne favorisera pas l'utilisation des modes de déplacement doux ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet contesté, d'une surface de 1 480 m2, eu égard à son implantation en périphérie du bourg de Telgruc-sur-Mer, dans une zone rurale d'habitat dispersé que traverse un axe routier très fréquenté, spécialement en période estivale, risque de créer un effet d'attraction vers l'extérieur de cette petite commune sans permettre, pour autant, une diminution des flux de transport ou une amélioration sensible du confort d'achat des consommateurs qui disposent déjà d'un magasin de la même enseigne à une dizaine de kilomètres de distance ; qu'il entre d'ailleurs en contradiction avec les orientations de la charte d'urbanisme et de développement commercial de la presqu'île de Crozon, utilisée dans les travaux d'élaboration en cours du schéma de cohérence territorial ; que, dans ces conditions, la commission n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que le projet litigieux ne satisfaisait pas au critère d'aménagement du territoire ; que la commission n'a pas davantage fait une inexacte application des dispositions législatives précitées en ce qui concerne les effets du projet en matière de développement durable dès lors que celui-ci ne s'insère nullement dans le réseau des transports collectifs ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE CROZONDIS n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision attaquée ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la SOCIETE CROZONDIS de la somme que celle-ci demande à ce titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la SOCIETE CROZONDIS est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE CROZONDIS, à la commission nationale d'aménagement commercial et à la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Formation : 4ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 334628
Date de la décision : 17/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 17 nov. 2010, n° 334628
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Dandelot
Rapporteur ?: M. Olivier Talabardon
Rapporteur public ?: Mme Dumortier Gaëlle

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:334628.20101117
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