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15/12/2010 | FRANCE | N°321869

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 15 décembre 2010, 321869


Vu la requête, enregistrée les 24 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jacques A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) de condamner l'Etat au versement de la somme de 452 052 euros, ou à tout le moins de 268 066,80 euros, en réparation des préjudices subis du fait de son absence d'affectation depuis 2002, avec les intérêts au taux légal et la capitalisation des intérêts ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administr

ative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvie...

Vu la requête, enregistrée les 24 octobre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Jacques A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) de condamner l'Etat au versement de la somme de 452 052 euros, ou à tout le moins de 268 066,80 euros, en réparation des préjudices subis du fait de son absence d'affectation depuis 2002, avec les intérêts au taux légal et la capitalisation des intérêts ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pascal Trouilly, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. A ;

Considérant que M. A, titularisé en 1968 en qualité d'attaché d'administration centrale du ministère de l'industrie, a été nommé en 1994 administrateur civil au tour extérieur, puis titularisé dans ce grade ; qu'il a été placé en disponibilité de 1987 à 1996 pour assurer des fonctions de directeur du marketing et du développement auprès de la société Alsthom-International, puis mis à disposition, à compter de septembre 1996, auprès de la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement d'Ile-de-France en tant que chargé de mission pour les affaires économiques ; qu'après avoir été promu administrateur civil hors classe, il a été affecté à compter du 1er septembre 1998 au sein des services du ministère de l'économie en qualité de chef adjoint de la mission euro , jusqu'en avril 2002 ; qu'à compter de cette date, il est resté sans affectation jusqu'à ce qu'il soit atteint par la limite d'âge en mai 2009, soit pendant une période de sept ans ; qu'il demande la réparation des préjudices en résultant ;

Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat :

Considérant que, sous réserve de dispositions statutaires particulières, tout fonctionnaire en activité tient de son statut le droit de recevoir, dans un délai raisonnable, une affectation correspondant à son grade ;

Considérant qu'en maintenant M. A en activité avec traitement mais sans affectation pendant sept ans, le ministre chargé de l'économie a méconnu cette règle et, par suite, commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; que, toutefois, si M. A était en droit de se voir attribuer une affectation correspondant à son grade, il lui appartenait également, compte tenu tant de son niveau dans la hiérarchie administrative que de la durée de la période pendant laquelle il a bénéficié d'un traitement sans exercer de fonctions, d'entreprendre les démarches en vue de recevoir une affectation ; qu'il résulte de l'instruction que si M. A a engagé de telles démarches, l'administration lui a proposé, au cours de la période pendant laquelle il est resté sans affectation, au moins deux emplois correspondant à son grade, dont l'un était à pourvoir par voie de mise à disposition ; que l'intéressé les a refusés, en faisant valoir pour le premier des raisons personnelles et en se prévalant pour le second des dispositions de l'article 41 de la loi du 11 janvier 1984 qui prévoient que la mise à disposition d'un fonctionnaire de l'Etat ne peut avoir lieu qu'avec son accord ; que le comportement ainsi témoigné par le requérant est de nature à exonérer l'Etat de la moitié de sa responsabilité ;

Considérant que M. A, qui n'a exercé aucun travail effectif au cours de la période considérée, ne saurait prétendre à obtenir une somme correspondant aux primes dont le versement est lié à l'exercice effectif de fonctions, et qu'il a au demeurant perçues jusqu'au 1er avril 2005 ; qu'en raison de son comportement, il n'est pas davantage fondé à demander l'indemnisation d'une prétendue perte de chance d'accéder à des fonctions auxquelles il aurait pu prétendre au regard de son grade ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis par le requérant en raison de l'absence d'affectation effective pendant sept ans, compte tenu du partage de responsabilité retenu ci-dessus, en condamnant l'Etat à lui verser une indemnité de 10 000 euros, tous intérêts compris au jour de la présente décision ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de ces dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. A la somme de 10 000 euros, tous intérêts compris au jour de la présente décision.

Article 2 : L'Etat versera à M. A la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jacques A, à la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 321869
Date de la décision : 15/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 15 déc. 2010, n° 321869
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Arrighi de Casanova
Rapporteur ?: M. Pascal Trouilly
Rapporteur public ?: Mme Vialettes Maud
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:321869.20101215
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