Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 juin 2010 et 5 août 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B... A..., demeurant au ...à Meaux (77351) ; M. A...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le décret du 28 mai 2010 accordant son extradition aux autorités belges ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Potier de la Varde - Buk Lament au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;
Vu la convention établie sur la base de l'article K3 du traité sur l'Union européenne, relative à l'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne, signée à Dublin le 27 septembre 1996 ;
Vu le code pénal ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Constance Rivière, Auditeur,
- les observations de la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de M. A...,
- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, Rapporteur public,
La parole ayant à nouveau été donnée à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de M. A...;
Considérant que le décret attaqué accorde l'extradition de M. A...aux autorités belges pour l'exécution d'une mesure de sûreté consistant en un internement en hôpital psychiatrique, prononcée le 19 mars 1992 pour une durée indéterminée, révisable tous les six mois, par la cour d'appel d'Anvers, pour des faits de tentative de meurtre ;
Sur la légalité externe du décret attaqué :
Considérant qu'il ressort des mentions de l'ampliation du décret attaqué figurant au dossier, et certifiée conforme par le secrétaire général du gouvernement, que ce décret a été signé par le Premier ministre et contresigné par la ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés ; que l'ampliation notifiée à M. A...n'avait pas à être revêtue de ces signatures ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le décret serait entaché d'incompétence doit être écarté ;
Sur la légalité interne du décret attaqué :
Considérant, en premier lieu, que l'extradition d'une personne qui encourt une mesure d'internement psychiatrique prononcée par un juge pénal pour une durée illimitée, pour des faits de crime, dans des conditions telles que celles prévues par la législation belge, n'est contraire ni à l'ordre public français, ni à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la seule circonstance qu'il ne soit pas tenu compte dans la demande d'extradition de l'état psychique de M. A...vingt ans après les faits n'est pas de nature à rendre cette mesure, à laquelle il peut en tout état de cause être mis fin si son état de santé ne constitue plus un danger pour la société, incompatible avec ces dispositions ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du second alinéa de l'article 1er des réserves émises par la France lors de la ratification de la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 : " L'extradition pourra être refusée si la remise est susceptible d'avoir des conséquences d'une gravité exceptionnelle pour la personne réclamée " ; que si M. A...soutient que l'exécution du décret attaqué serait de nature à porter gravement atteinte à sa santé mentale et physique en raison des conditions d'internement dans les centres psychiatriques belges, les pièces du dossier n'établissent pas les risques personnels qu'il allègue ; que, par suite, le Premier ministre n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de mettre en oeuvre la possibilité de refuser l'extradition résultant des réserves et déclarations émises par la France ; que le moyen tiré de ce que son extradition l'exposerait à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit aussi être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation du décret du 28 mai 2010 accordant son extradition aux autorités belges ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.