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16/12/2010 | FRANCE | N°328006

France | France, Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 16 décembre 2010, 328006


Vu l'arrêt n° 08BX00471 du 5 mai 2009, enregistré le 14 mai 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour par la SCP LES AUDES ;

Vu le pourvoi, enregistré le 18 février 2008 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, présenté par la SCP LES AUDES, dont le siège est Chéniers à Sacierges-Saint-Martin (36170), et le mémoire complémentaire présenté pour cette socié

té, enregistré le 24 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil ...

Vu l'arrêt n° 08BX00471 du 5 mai 2009, enregistré le 14 mai 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi présenté à cette cour par la SCP LES AUDES ;

Vu le pourvoi, enregistré le 18 février 2008 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, présenté par la SCP LES AUDES, dont le siège est Chéniers à Sacierges-Saint-Martin (36170), et le mémoire complémentaire présenté pour cette société, enregistré le 24 août 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; la SCP LES AUDES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 0600676 du 24 janvier 2008 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre exécutoire émis le 24 octobre 2005 pour avoir paiement des taxes d'assainissement auxquelles elle a été assujettie, ainsi que du commandement de payer correspondant émis le 1er juin 2006 ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Sacierges-Saint-Martin le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Matthieu Schlesinger, Auditeur,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SCP LES AUDES,

- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SCP LES AUDES ;

Considérant que la SCP LES AUDES, propriétaire d'un immeuble au hameau Chéniers à Sacierges-Saint-Martin (Indre), a refusé de se raccorder au réseau public d'assainissement mis en service dans ce hameau par la commune en juillet 2003 ; qu'en application de l'article L. 1331-8 du code de la santé publique, elle a été assujettie par celle-ci à la taxe représentative de la redevance d'assainissement et s'est vu notifier un titre exécutoire en date du 24 octobre 2005 et un commandement de payer en date du 1er juin 2006, émis pour obtenir le paiement de cette taxe ; qu'elle se pourvoit en cassation contre le jugement du 24 janvier 2008 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à être déchargée du paiement de la taxe, s'élevant à un montant de 2 026,66 euros ;

Sur la demande en décharge :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales : L'administration, ainsi que le contribuable dans la limite du dégrèvement ou de la restitution sollicités, peuvent faire valoir tout moyen nouveau, tant devant le tribunal administratif que devant la cour administrative d'appel, jusqu'à la clôture de l'instruction... ; que cette disposition s'applique à la contestation de la taxe représentative de la redevance d'assainissement recouvrée en application de l'article L. 1331-8 du code de la santé publique, qui est une imposition de toute nature ; que, dès lors comme le soutient la société, le tribunal administratif de Limoges a commis une erreur de droit en considérant que la société requérante ne pouvait, dans un mémoire produit après l'expiration du délai de recours contentieux, soulever un moyen fondé sur une cause juridique distincte de ceux soulevés dans ce délai et en écartant par suite comme tardif le moyen tiré de l'insuffisante motivation du titre exécutoire du 24 octobre 2005 ; que, dès lors, son jugement doit être annulé en tant qu'il statue sur la demande de la SCP LES AUDES tendant à la décharge du paiement de la somme de 2 026,66 euros ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande présentée par la SCP LES AUDES :

Considérant, en premier lieu, qu'un état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la dette, alors même qu'il est émis par une personne publique autre que l'Etat pour lequel cette obligation est expressément prévue par l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ; qu'en application de ce principe, une commune ne peut mettre en recouvrement la taxe représentative de la redevance d'assainissement sans indiquer, soit dans le titre lui même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels elle se fonde pour mettre les sommes en cause à la charge des redevables ; qu'en l'espèce, la commune de Sacierges-Saint-Martin a satisfait à cette obligation en joignant une fiche de calcul et en faisant référence, dans le titre exécutoire contesté, à la délibération du conseil municipal du 20 novembre 2003, précédemment adressée à la société requérante, qui fixait le montant de la redevance ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'alinéa premier de l'article L. 1331-1 du code de la santé publique : Le raccordement des immeubles aux égouts disposés pour recevoir les eaux usées domestiques et établis sous la voie publique à laquelle ces immeubles ont accès soit directement, soit par l'intermédiaire de voies privées ou de servitudes de passage, est obligatoire dans le délai de deux ans à compter de la mise en service de l'égout ; qu'aux termes de l'article L. 1331-8 du même code : Tant que le propriétaire ne s'est pas conformé aux obligations prévues aux articles L. 1331-1 à L. 1331-7, il est astreint au paiement d'une somme au moins équivalente à la redevance qu'il aurait payée au service public d'assainissement si son immeuble avait été raccordé au réseau ou équipé d'une installation d'assainissement autonome réglementaire, et qui peut être majorée dans une proportion fixée par le conseil municipal dans la limite de 100 % ; que seuls peuvent être regardés comme soumis à l'obligation de raccordement, au sens des dispositions de l'article L. 1331-1 précité du code de la santé publique, les immeubles dont, compte tenu de leur implantation par rapport au réseau public des égouts, le raccordement ne comporte pas de difficultés excessives ; qu'il résulte de l'instruction que si la situation de l'immeuble de la société requérante, en contrebas du hameau desservi par le réseau public de collecte des eaux usées domestiques, a pu faire obstacle à son raccordement, la commune a remédié à cette difficulté par l'acquisition d'une pompe de refoulement individuelle, dont elle a en outre décidé de prendre en charge le coût de la consommation électrique par déduction de celui-ci du montant de la redevance d'assainissement ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le raccordement de son immeuble présentait des difficultés excessives, faisant obstacle à ce qu'elle soit soumise à l'obligation de raccordement et que, par conséquent, la commune lui réclame le paiement de la taxe représentative de la redevance d'assainissement en application des dispositions de l'article L. 1331-8 du code de la santé publique ;

Considérant, en troisième lieu, que la société requérante ne peut utilement se prévaloir de la circonstance qu'elle n'est pas raccordée au réseau d'assainissement, s'agissant du paiement d'une taxe mise à la charge, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 1331-8 du code de la santé publique, notamment des propriétaires qui ne se conforment pas à l'obligation de raccordement prévue à l'article L. 1331-1 du même code ; qu'elle n'est pas plus fondée à se prévaloir des dispositions de l'article L. 1331-7 du même code, applicables aux propriétaires des immeubles édifiés postérieurement à la mise en service de l'égout auquel ces immeubles doivent être raccordés, qui sont sans incidence sur l'obligation de raccordement prévue à l'article L. 1331-1, lequel s'applique à l'ensemble des immeubles raccordables, quelle que soit la date de leur édification ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à demander la décharge de la somme de 2 026,66 euros mise à sa charge au titre de la taxe représentative de la redevance d'assainissement ;

Sur la demande en décharge de l'obligation de payer :

Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des dispositions de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, le juge de l'impôt n'est pas compétent pour connaître d'une contestation tenant à l'insuffisante motivation d'un commandement de payer, qui touche à la régularité en la forme de l'acte ; que ce motif, qui est d'ordre public et dont l'examen n'implique l'appréciation d'aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif erroné tiré de la tardiveté de la contestation retenu par le jugement attaqué, dont il justifie le dispositif ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le tribunal administratif n'a ni entaché son jugement d'erreur de droit ni dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en jugeant que la SCP LES AUDES ne s'était pas conformée à l'obligation de raccordement de son immeuble au réseau d'assainissement public, qui ne présentait pas de difficulté excessive, et pouvait dès lors être légalement assujettie au paiement de la taxe représentative de la redevance d'assainissement en application des articles L. 1331-1 et L. 1331-8 du code de la santé publique ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCP LES AUDES n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque en tant qu'il statue sur ses conclusions aux fins de décharge de l'obligation de payer ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Sacierges-Saint-Martin, qui n'est pas, dans la présente affaire, la partie perdante, le versement de la somme que demande la SCP LES AUDES au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges du 24 janvier 2008 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de la SCP LES AUDES aux fins de décharge.

Article 2 : Les conclusions aux fins de décharge présentées par la SCP LES AUDES devant le tribunal administratif de Limoges et le surplus des conclusions de son pourvoi sont rejetés.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SCP LES AUDES et à la commune de Sacierges-Saint-Martin.


Synthèse
Formation : 9ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 328006
Date de la décision : 16/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 16 déc. 2010, n° 328006
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Jouguelet
Rapporteur ?: M. Matthieu Schlesinger
Rapporteur public ?: M. Collin Pierre
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:328006.20101216
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