La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/12/2010 | FRANCE | N°310946

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 23 décembre 2010, 310946


Vu le pourvoi, enregistré le 27 novembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 04LY00609 du 27 septembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son recours tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 02-0541 et 02-0553 du 30 décembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Dijon a déchargé la SA Société de produits pharmaceutiques et d'hygiène des cotisations supplémentaires de taxe p

rofessionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des an...

Vu le pourvoi, enregistré le 27 novembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 04LY00609 du 27 septembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son recours tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n° 02-0541 et 02-0553 du 30 décembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Dijon a déchargé la SA Société de produits pharmaceutiques et d'hygiène des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1998 et 1999 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés et de contribution temporaire sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1997, 1998 et 1999 et, d'autre part, au rétablissement de la société aux rôles correspondants de la taxe professionnelle, de l'impôt sur les sociétés, de la contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés et de la contribution temporaire sur l'impôt sur les sociétés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Aladjidi, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de la Société de produits pharmaceutiques et d'hygiène,

- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Bouzidi, Bouhanna, avocat de la Société de produits pharmaceutiques et d'hygiène ;

Considérant qu'en application de conventions passées les 31 décembre 1990 et 23 décembre 1997, la SA Société de produits pharmaceutiques et d'hygiène a bénéficié de la part de la SA COFIGE, sa société mère, puis de la SA SGME, société soeur, de prestations d'assistance administrative, juridique, comptable, financière et commerciale, rémunérées forfaitairement à hauteur de 4 % de son chiffre d'affaires ; qu'elle leur a versé en vertu de ces conventions les sommes de 8 563 825 F en 1997, 9 163 008 F en 1998 et 9 392 492 F en 1999 ; que l'administration fiscale a estimé que cette rémunération était excessive et, qu'ainsi, en versant des sommes supérieures à 6 554 896 F en 1997, 4 738 487 F en 1998 et 4 468 603 F en 1999, la SA Société de produits pharmaceutiques et d'hygiène s'était livrée à un acte anormal de gestion ; qu'elle a, en conséquence, réintégré les sommes de 2 008 929 F, 4 424 521 F et 4 923 889 F dans les résultats de la société, respectivement pour les années 1997, 1998 et 1999 ; que le tribunal administratif de Dijon, saisi par la SA Société de produits pharmaceutiques et d'hygiène, a déchargé cette société des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés et de contribution temporaire sur l'impôt sur les sociétés, auxquelles elle a été assujettie de ce fait respectivement au titre des années 1997, 1998 et 1999 ainsi, que par conséquence du mécanisme de plafonnement en fonction de la valeur ajoutée, de cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1998 et 1999 ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE se pourvoit en cassation contre l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté son appel dirigé contre ce jugement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'administration soutenait devant la cour non seulement que les prestations dont bénéficiait la Société de produits pharmaceutiques et d'hygiène au sein du groupe auquel elle appartenait lui avaient été facturées à un prix très supérieur au coût qu'elles avaient représenté pour les prestataires mais également que, faute pour la société de quantifier précisément les différentes diligences accomplies en sa faveur, le taux horaire qu'elle mettait en avant pour le comparer avec celui, bien supérieur, qui lui aurait été facturé par un cabinet extérieur, était dénué de portée ; qu'ainsi, la cour administrative d'appel de Lyon a dénaturé les écritures dont elle était saisie en jugeant que l'administration ne contestait pas que le prix facturé soit resté inférieur au prix du marché ; que le ministre est, par suite, fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ; que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du même code que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant, d'une part, que, pour justifier du montant et de la correction de l'inscription en comptabilité de la redevance de 4 % de son chiffre d'affaires hors taxe qu'elle a versée à la SA COFIGE puis à la SA SGME en rémunération des prestations que celles-ci lui fournissaient, la Société de produits pharmaceutiques et d'hygiène a soutenu que ces prestations consistaient en des missions d'assistance administrative, juridique, comptable et commerciale occupant à plein temps, avec les missions comparables réalisées pour une autre société soeur, une vingtaine de personnes, alors qu'elle-même n'emploie que des personnels techniques affectés à une activité de fabrication industrielle au profit de l'ensemble des société du groupe ; que faute pour l'administration de contester l'existence de ces prestations, la société doit, ainsi, être regardée comme ayant apporté la preuve du principe même de la déductibilité des sommes litigieuses ;

Considérant, d'autre part, qu'en se bornant à faire valoir que la rémunération des prestations en cause était environ trois fois supérieure aux charges supportées par les prestataires qui les assuraient, l'administration ne peut être regardée comme apportant la preuve de ce que cette rémunération serait excessive par rapport aux contreparties obtenues par la société ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 30 décembre 2003, le tribunal administratif de Dijon a déchargé la Société de produits pharmaceutiques et d'hygiène des suppléments de cotisations qui avaient été mises à sa charge ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à cette société d'une somme de 5 000 euros au titre des instances d'appel et de cassation ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 27 septembre 2007 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé.

Article 2 : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE devant la cour administrative d'appel de Lyon est rejeté.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 5 000 euros à la Société de produits pharmaceutiques et d'hygiène au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT et à la Société de produits pharmaceutiques et d'hygiène.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 310946
Date de la décision : 23/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 23 déc. 2010, n° 310946
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Frédéric Aladjidi
Rapporteur public ?: M. Collin Pierre
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2010:310946.20101223
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award